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Jugements contradictoires pour des cas d'adultère au Nigeria

dépêche de presse du 25 mars 2002 - Reuters
Pays :
peine de mort / Nigéria
SOKOTO, Nigeria (Reuters) - Après le tollé suscité dans le monde entier par le jugement, un tribunal islamique nigérian a relaxé en appel une mère de 35 ans condamnée en première instance à la peine de mort par lapidation pour adultère.


Cependant, au moment où Safiya Hussaini Tungar-Tudu, mère de cinq enfants, retrouvait le sourire à Sokoto, des nouvelles en provenance du Nord du Nigeria indiquaient qu'une autre femme avait été condamnée à être exécutée par lapidation pour adultère dans un village isolé d'un autre Etat du même pays.


Une série de condamnations prononcées par ces tribunaux islamiques, mis en place après l'adoption de la charia dans plusieurs Etats à majorité musulmane du Nord du pays ces dernières années, ont ravivé les violences religieuses entre musulmans et chrétiens qui éclatent périodiquement au Nigeria.


La cour d'appel islamique de Sokoto a annulé pour vice de procédure le verdict pris à l'encontre d'Hussaini.


La défense avait fait valoir que la loi sur laquelle s'était fondée la condamnation en première instance n'existait pas au moment des faits reprochés. Elle remettait aussi en cause la compétence du tribunal.


En janvier dernier déjà, une Nigériane de 18 ans également accusée d'adultère avait été acquittée en première instance par un tribunal de Sokoto.


"Aujourd'hui, je suis heureuse. Je remercie Dieu", a déclaré Hussaini, en berçant dans ses bras sa fille âgée de un an.


L'acquittement était assez largement attendu, le gouvernement, dans un souci d'apaisement diplomatique, ayant ordonné la semaine dernière à la douzaine d'Etats appliquant la charia, ou loi islamique, de renoncer aux sanctions telles que la lapidation ou l'amputation.


Le pays le plus peuplé d'Afrique (110 millions d'habitants) est, grosso-modo, divisé en deux. Les musulmans sont majoritaires dans le Nord, tandis que la plus grande partie de la population du sud est animiste ou chrétienne.


"JUGEMENT DETERMINANT"


Le gouverneur de l'Etat où se trouve Sokoto, Attahiru Bafarawa, a jugé que le jugement de lundi était une justification de la charia. Il a ajouté que l'affaire montrait que la loi islamique devait être mieux expliquée aux organisations de défense des droits de l'homme.


Amnesty International avait récolté plus de 600.000 signatures dans une pétition s'opposant à la condamnation de Safiya Hussaini. L'Union européenne avait de son côté exhorté le Nigeria à respecter pleinement les droits et la dignité humaines - faisant allusion aux femmes en particulier.


"Nous devons continuer à faire monter la pression contre l'utilisation de la charia dans les affaires criminelles dans cette époque moderne", a jugé à Lagos Segun Sejede, de la Campagne pour la démocratie et les droits de l'homme.


"C'est un jugement déterminant qui peut sauver les vies d'autres femmes qui risquent toujours la mort par lapidation", a déclaré la Communauté Sant'Egidio, groupe pacifiste romain.


Cependant, au même moment des informations en provenance du village de Bakori, dans l'Etat de Katsina, annonçaient qu'une autre femme, Amina Lawal Kurami, avait été condamnée vendredi à être exécutée par lapidation, pour avoir eu un enfant naturel.


Un responsable a déclaré à Reuters par téléphone que la jeune femme était passée aux aveux et que le bébé constituait une preuve. En outre, l'homme qui l'avait, selon elle, charmé a démenti. Il a été acquitté, car Amina n'avait pas pu présenter quatre témoins comme l'exige la charia, a ajouté le responsable.


Elle a trente jours pour faire appel et son exécution a été reportée de huit mois pour qu'elle puisse donner le sein à son bébé.


En janvier, Sani Rodi a été le premier Nigérian à être exécuté en vertu de la charia. Il a été pendu dans l'Etat de Katsina, dans le nord-ouest du pays, pour avoir commis plusieurs meurtres.
(Par Emmanuel Braun)
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