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Condamnations à mort en Egypte : Michelle Bachelet dénonce « une lourde erreur judiciaire »

communiqué de presse du 9 septembre 2018 - Haut-Commissaire aux droits de l'homme de l'ONU
Pays :
peine de mort / Egypte
La Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet, s'est déclarée extrêmement préoccupée par la confirmation de 75 condamnations à mort par un tribunal égyptien.
Ces peines, si elles sont exécutées, équivaudraient à « une erreur judiciaire grave et irréversible », a déclaré Mme Bachelet dans un communiqué publié dimanche, soulignant le contraste frappant entre la tenue de procès de masse en Égypte et une loi récente qui accorde une immunité totale aux membres des forces de sécurité pour les crimes qu'ils auraient commis.

Les condamnations à mort confirmées samedi par un tribunal égyptien ont été prononcées à l'origine lors d'un procès de masse tenu en juillet dernier, au cours duquel 739 personnes ont été condamnées pour des accusations en lien avec une manifestation menée par les Frères musulmans en août 2013 et qui fut réprimée dans le sang.

Les chefs d'accusations comprenaient le meurtre et l'incitation à la violence, l'appartenance à un groupe illégal, la participation à un rassemblement illégal et d'autres crimes. Outre les condamnations à mort, 47 personnes ont été condamnées à la réclusion à perpétuité, tandis que d'autres individus ont été condamnées à des peines d'emprisonnement de durée variable.

Des procès de masse qui soulève des problèmes de procédure équitable et impartiale

Une série de procès de masse ont été organisés en Égypte. Impliquant des centaines d'affaires examinées simultanément, ces procès ont soulevé de nombreux problèmes de procédure équitable et impartiale.

« Le déroulement du procès devant le tribunal pénal du Caire a été largement critiquée », a déclaré Mme Bachelet. « Et à juste titre. Les 739 personnes ont été jugées en masse et n'étaient pas autorisées à se faire représenter par un avocat devant un tribunal. En outre, les accusés n'ont pas eu le droit de présenter des éléments de preuve à décharge, et le Procureur n'a pas fourni d'éléments de preuve suffisants pour prouver la culpabilité individuelle ».

Pour la Haute-Commissaire, « le mépris évident des droits fondamentaux des accusés » fait douter de la culpabilité de tous les condamnés. « Les 75 condamnations à mort prononcées hier, si elles sont appliquées, représenteraient une erreur judiciaire flagrante et irréversible », a prévenu Mme Bachelet qui espère que la cour d'appel égyptienne examinera ce verdict et veillera au respect des normes internationales de justice en l'annulant.

« La justice doit s'appliquer à tous - personne ne devrait en être exempté »

La répression militaire contre les manifestations menées par les Frères musulmans sur les places Rabaa al-Adawiya et al-Nahda au Caire le 14 août 2013 aurait entraîné la mort de 900 manifestants, pour la plupart non armés, par des membres des forces de sécurité égyptiennes.

Le gouvernement a par la suite déclaré que de nombreux manifestants avaient été armés et qu'un certain nombre de policiers avaient été tués. Malgré le nombre important de morts, aucun membre de la sécurité d'État n'a jamais été inculpé pour ce qui est communément appelé le ‘massacre de Rabaa'.

En juillet dernier, le parlement égyptien a approuvé une loi qui accordera effectivement une immunité de poursuites aux membres des forces de sécurité pour toute infraction commise dans l'exercice de leurs fonctions entre le 3 juillet 2013 – date du renversement du gouvernement du président Morsi - et janvier 2016. La loi autorise le Président à désigner un certain nombre d'officiers en tant que réservistes à vie et leur accorde les immunités et privilèges d'un ministre en exercice, y compris l'immunité diplomatique lors de voyages à l'étranger.

« La justice doit s'appliquer à tous - personne ne devrait en être exempté », a déclaré la Haute-Commissaire. « Les tentatives d'accorder une immunité pour des crimes qui auraient été commis par des membres des forces de sécurité ne font que promouvoir l'impunité et compromettent la confiance du peuple égyptien dans la capacité du gouvernement à rendre justice pour tous ».

Mme Bachelet a exhorté le gouvernement égyptien à veiller à ce que justice soit rendue, « conformément à la loi, vis à vis de toutes les personnes - y compris les membres des forces de sécurité de l'État - soupçonnées d'avoir commis un crime ».

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