Une experte des droits humains de l'ONU demande au gouvernement français de rapatrier et de juger en France sept de ses ressortissants condamnés à mort en Irak pour "terrorisme" à l'issue de procès qu'elle juge "inéquitables".
Agnès Callamard, rapporteure spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a adressé une lettre en ce sens au Premier ministre français Edouard Philippe. Comme tous les experts de l'ONU, l'avis de Mme Callamard n'engage pas les Nations unies et n'a pas de pouvoir contraignant.
Dans un communiqué, la rapporteure spéciale cite les noms de sept jihadistes français, arrêtés en Syrie et transférés en Irak "à la demande alléguée du gouvernement français ou avec l'implication soupçonnée de ce dernier". "Une fois en Irak, ils auraient subi des tortures ou d'autres formes de mauvais traitements", affirme-t-elle. "Selon de graves allégations, les condamnations auraient été prononcées au terme de procès inéquitables, sans que les accusés puissent bénéficier de représentation juridique adéquate ni d'assistance consulaire effective", poursuit Mme Callamard. Elle accuse le système juridique irakien d'être "marqué par des problèmes structurels très sérieux où la peine de mort est régulièrement appliquée à l'encontre des membres présumés de l'Etat islamique".
"Dans ces conditions, les transferts des personnes vers l'Irak pour y être poursuivies sont illégaux", estime l'experte, qui se dit "particulièrement troublée" par les allégations selon lesquelles Paris aurait joué un rôle dans ces transferts. "Un Etat ne peut pas imposer la peine de mort en violation du droit international. Aucun Etat, par conséquent, ne peut lui fournir une assistance lorsque la peine de mort pourrait être imposée de cette manière", rappelle Mme Callamard. Elle demande en conséquence à la France de faire en sorte que ses ressortissants condamnés, ainsi que ceux en attente de procès en Irak, "puissent retourner chez eux pour être poursuivis de manière conforme au droit international, afin que justice soit rendue".
Des centaines d'étrangers ont été condamnés à la peine capitale ou à la prison à vie en Irak pour appartenance au groupe jihadiste Etat islamique (EI). Parmi eux, 11 Français ont été condamnés à mort et trois à la perpétuité. La semaine dernière, le Premier ministre irakien Adel Abdel Mahdi avait déclaré que son gouvernement n'était pas habilité à alléger les peines des jihadistes étrangers condamnés à mort. Les 11 Français condamnés début juin avaient été transférés en Irak par les forces kurdes en Syrie. La France et d'autres pays européens se montrent particulièrement réticents à récupérer leurs ressortissants soupçonnés d'avoir rejoint l'EI.