(PAPIER D'ANGLE)
LA HAVANE - Il y a un an, le 11 avril 2003, la justice cubaine mettait fin à un moratoire de près de trois ans sur la peine de mort en exécutant, après un procès sommaire, trois des auteurs du détournement d'un bateau avec 50 passagers à bord dans la baie de La Havane.
"Les sentences ont été exécutées à l'aube": le communiqué laconique du gouvernement cubain avait semé la consternation dans l'île et ravivé la polémique internationale déjà soulevée par l'arrestation de 75 dissidents le mois précédent, condamnés à des peines allant de six à 28 ans de prison.
Le 2 avril, onze Cubains, dont trois femmes, s'étaient emparés sous la menace d'armes d'une vieille embarcation dans le port de La Havane, avec 50 passagers à bord, en exigeant de l'équipage qu'il se rende à Miami, ville américaine distante de quelque 150 kilomètres. A court de carburant, le bateau avait dû s'arrêter dans un port près de La Havane et les forces de sécurité cubaines en avaient repris le contrôle. Aucune victime n'avait été à déplorer.
Après un procès expéditif, les trois principaux auteurs du détournement avaient été passés par les armes et les autres condamnés à des peines de prison.
Le président Fidel Castro avait justifié ces exécutions en les qualifiant de "mesures d'exception" après le détournement sur la Floride de deux avions en trois semaines et la découverte, selon lui, de "29 projets et idées de détournement d'avions ou de bateaux".
"Il fallait faire cesser radicalement cette vague de détournements", avait-il ajouté.
Ce faisant, les autorités communistes mettaient fin à un moratoire décidé en 2000 sur les exécutions capitales, une initiative alors saluée comme un signe d'assouplissement du régime.
Le président de la Commission cubaine pour les droits de l'homme et la réconciliation nationale (CCDHRN, interdit), Elizardo Sanchez Santa Cruz, a estimé que les trois personnes fusillées avaient été "assassinées" sous couvert de justice.
"Cela a été une lourde déception pour nous qui avions pratiquement applaudi le moratoire", a-t-il ajouté dans un entretien vendredi avec l'AFP.
Plusieurs dizaines de Cubains condamnés à mort pour des délits de droit commun attendent en prison une éventuelle exécution.
Après les lourdes condamnations des dissidents, prononcées presque au même moment que les trois exécutions, l'Union Européenne, principal investisseur et partenaire commercial de Cuba, a gelé ses relations avec l'île communiste. De nombreux intellectuels, européens et français notamment, longtemps partisans du régime cubain, ont également pris leurs distances.
La Commission des droits de l'homme de l'ONU doit se prononcer à Genève vers le 17 avril sur Cuba. Les autorités cubaines sont engagées dans une intense campagne pour éviter une nouvelle condamnation.