La justice pakistanaise a annulé la condamnation à mort prononcée en 2014 contre un chrétien accusé de blasphème dans une affaire qui avait conduit une foule en colère à incendier des églises et 150 maisons, a annoncé mercredi son avocat. Sawan Masih, travailleur sanitaire et père de trois enfants, avait été arrêté en 2013 dans la ville de Lahore (Est) pour avoir insulté le prophète Mahomet, puis condamné à mort en 2014, bien qu'il ait clamé son innocence.
Suite à son arrestation, une foule avait mis le feu à sa maison, ainsi qu'à deux églises et à environ 150 autres habitations d'un quartier chrétien de la ville.
Lundi, la Haute Cour de Lahore a annulé sa condamnation, a déclaré son avocat à l'AFP. "Le dossier de l'accusation manquait de preuves et était plein de contradictions", a déclaré l'avocat Nadeem Anthony.
"Nous avons payé un prix élevé pour cet acquittement... Qui rendra ces sept années de vie à Masih ?", a-t-il questionné.
Le blasphème est une question très sensible au Pakistan, deuxième pays musulman le plus peuplé avec près de 220 millions d'habitants, où même des allégations non prouvées d'offense à l'islam peuvent entraîner assassinats et lynchages.
Les lois très controversées sur la question, qui prévoient la peine de mort pour insulte au prophète, sont utilisées de manière disproportionnée contre les minorités religieuses, notamment la communauté chrétienne.
Ses critiques affirment qu'elles servent souvent à régler des comptes personnels. Pour Sawan Masih, les graves accusations portées à son encontre faisaient partie d'un complot de négociants en fer locaux qui voulaient s'emparer des terres du quartier chrétien où il vivait.
En 2017, un autre tribunal pakistanais avait acquitté 115 personnes accusées d'avoir participé à l'attaque contre son quartier, faute de preuves.
En octobre 2018, l'acquittement de la chrétienne Asia Bibi, qui avait passé plus de huit ans dans les couloirs de la mort pour blasphème, ce qu'elle a toujours nié, avait provoqué des marches violentes dans tout le Pakistan.
En août, un Américain faisant face à de telles accusations a été abattu dans l'enceinte d'un tribunal à Peshawar (Nord-Ouest).
Environ 80 personnes sont emprisonnées au Pakistan pour blasphème, dont la moitié risquent la prison à vie ou la peine de mort, selon la Commission américaine sur la liberté religieuse.