Les autorités de transition abolissent des mesures entrées en vigueur sous le régime islamiste d'Omar el-Béchir, renversé en 2019.
La révolution soudanaise de 2019 se poursuit sur le plan législatif. Les autorités viennent d'abolir la loi sur l'apostasie et d'assouplir plusieurs autres restrictions, notamment celles concernant la consommation d'alcool pour les non-musulmans, qui demeure strictement interdite pour les musulmans.
Le Miscellanous Amendments Act, une loi de réforme du Code Pénal désormais entérinée par le Conseil souverain, compte de nombreuses mesures d'ouverture, comme la criminalisation de l'excision (une pratique qui concernerait encore 90% des femmes soudanaises), la fin de la flagellation, ou encore l'abolition de la peine de mort pour les mineurs.
Mais la mesure la plus emblématique de cette rupture avec l'ancien régime islamiste est donc l'abolition de la peine de mort pour apostasie. Désormais au Soudan, plus personne ne sera condamné à mort pour avoir renoncé à la religion musulmane comme cela avait été le cas avec la situation très médiatisée de Meriam Yahia Ibrahim Ishag, condamnée il y a quelques années à la pendaison pour avoir choisi la religion chrétienne. Le cas de la jeune femme alors enceinte et âgée de 28 ans, avait déclenché une mobilisation internationale et nationale qui avait fini par faire reculer le régime islamiste d'Omar el-Béchir.
Par ailleurs, l'interdiction des mutilations génitales féminines représente une véritable victoire pour de nombreuses femmes soudanaises qui militaient en ce sens. « Nous sommes désireux de démolir toute forme de discrimination qui a été promulguée par l'ancien régime et d'avancer vers l'égalité des citoyens et une transformation démocratique » a indiqué le ministre de la Justice Nasredeen Abdulbari, cité par Bloomberg.
Réintégrer le Soudan dans le concert des nations
Si ces nouvelles réformes judiciaires s'inscrivent dans le processus de démocratisation du pays, elles visent également à convaincre les bailleurs de fonds internationaux de la bonne volonté du gouvernement de transition dirigé par Abdallah Hamdok.
Pour mener à bien son plan de relance économique, celui-ci cherche à obtenir des financements rapides et conséquents de la part des institutions multilatérales de financement qui ne prêtent plus d'argent à Khartoum depuis plusieurs années, non seulement à cause des arriérés de paiement du pays, mais également à cause de l'inscription du Soudan sur la liste des pays finançant le terrorisme, sous le régime de l'ancien président.
La normalisation de la place du Soudan sur la scène internationale semble désormais en bonne voie, mais le Conseil souverain, qui mêle militaires et civils, reste confronté à une crise économique amplifiée par la pandémie de coronavirus et dispose de peu de ressources pour améliorer les conditions de vie de la population. La pression islamiste demeure un danger pour le régime de transition, qui doit procéder avec prudence. Certaines mesures comme l'interdiction de l'excision ne seront pas appliquées à court terme dans toutes les régions du pays, compte tenu de l'ancrage culturel de ces pratiques, qui mettront probablement plusieurs décennies à s'éteindre.
Dépêche reproduite avec l'aimable autorisation de Vatican News