Une adolescente nigériane enceinte, condamnée à mort par lapidation pour adultère par un tribunal coranique, a comparu mercredi devant une juridiction d'appel islamique à Dass (nord du Nigeria), qui a mis son jugement en délibéré au 10 novembre.
Le procès se déroule dans l'Etat de Bauchi, un des douze Etats du pays - qui en compte 36 - à avoir rétabli la charia (loi islamique) depuis 1999.
Hajara Ibrahim, 18 ans, est restée silencieuse pendant cette audience, assise dans un petit box, tandis que son avocat exposait les arguments de la défense et réclamait son acquittement. Elle avait été condamnée à mort par lapidation le 8 octobre dernier.
Le défenseur, Abdulkadir Suleiman, a plaidé que l'adultère ne pouvait être constaté, le mariage arrangé de Hajara avec son époux n'ayant pas été consommé avant qu'elle n'ait de relation sexuelle avec son petit ami et ne tombe enceinte.
"Avec ces arguments nous prions Dieu de casser le jugement de la juridiction inférieure et d'acquitter l'accusée", a conclu l'avocat.
"Nous disons que la charia doit être appliquée comme le prescrit l'islam et sans que subsiste un quelconque doute", a-t-il dit.
Le juge Mohammed Mustafa Umar a accepté d'étudier les arguments de la défense et a annoncé qu'il rendrait son jugement le 10 novembre.
Après l'audience, la jeune fille a confié à l'AFP qu'elle avait bon espoir d'être acquittée par la cour.
"J'ai confiance dans la décision de la cour d'appel, j'ai confiance dans mon avocat", a-t-elle indiqué.
Hajara est originaire du village de Sidai, dans l'Etat de Bauchi. Mariée à un homme de Lafia, une ville d'un autre Etat à quelque 220 kilomètres, elle était tombée amoureuse de Dauda Sani, un garçon du village.
"J'étais mariée à cet homme de Lafia, mais avant que je m'installe chez lui Dauda a promis de m'épouser donc j'ai insisté pour divorcer. Après sa promesse de m'épouser, je me suis donnée à lui et voici le résultat", avait-elle raconté plus tôt, en désignant son ventre rebondi.
Si la cour décide qu'elle a bien été mariée à l'homme de Lafia avant sa relation avec Dauda, elle sera coupable d'adultère - qu'elle soit divorcée ou non - et passible de lapidation.
Si, au contraire, elle peut être considérée comme non mariée, elle sera coupable du seul crime de fornication, passible de 100 coups de fouet.
Le cas de Hajara est le dernier en date dans les Etats du nord du Nigeria à avoir instauré la charia.
Plusieurs femmes ont déjà été condamnées à mort par lapidation au Nigeria, mais aucune de ces sentences n'a jusqu'à présent été exécutée.
Plusieurs personnes, hommes ou femmes, ont également été condamnées à mort par des tribunaux islamiques, notamment pour viol, adultère ou sodomie, et attendent le résultat de leur appel.
Dans le seul Etat de Bauchi, cinq condamnés à la peine capitale - hommes et femmes - sont en instance d'appel.
Me Suleiman, payé pour défendre Hajara par Baobab, une association de défense des droits de la femme du Nigeria, a indiqué à l'AFP qu'il défend également le dossier d'une seconde jeune fille de Bauchi.
Selon lui, l'audience d'appel dans ce cas doit avoir lieu à la haute cour islamique de Ningi le 3 novembre.
Il a expliqué que Daso Amadu a été mariée à cinq hommes différents avant d'avoir 18 ans, et a eu trois enfants. Elle est accusée d'avoir eu le dernier hors mariage et risque donc la même peine qu'Hajara.