L'ex-président Pervez Musharraf, dernier dirigeant militaire du Pakistan dont il avait fait un allié des Etats-Unis dans la lutte contre Al-Qaïda, est décédé à Dubaï à l'âge de 79 ans des suites d'une maladie rare.
Arrivé au pouvoir après un coup d'Etat en 1999 et resté à la tête du Pakistan jusqu'en 2008, ce général quatre étoiles s'était autoproclamé président en juin 2001 et occupait donc ce poste au moment des attentats du 11-Septembre contre les Etats-Unis.
Ce fumeur de cigares et buveur de whisky, initialement perçu comme un modéré, s'était érigé en principal allié régional de Washington dans la lutte contre Al-Qaïda. Il avait échappé à au moins trois tentatives d'assassinat de la part de cette organisation.
Le président pakistanais Arif Alvi a prié "pour le repos éternel de l'âme du défunt et pour que soit donné à la famille endeuillée le courage de supporter cette perte", a indiqué son bureau dans un communiqué.
Les hauts responsables militaires "expriment leurs sincères condoléances à la suite du décès du général Pervez Musharraf", a indiqué le service de presse de l'armée. "Qu'Allah bénisse l'âme du défunt et donne de la force à la famille endeuillée".
L'ancien chef d'Etat, qui avait été contraint de quitter le pouvoir sous la menace d'une procédure de destitution, est décédé dimanche matin, ont précisé des médias et un haut responsable de la sécurité.
"Je peux confirmer que le défunt général a rendu son dernier souffle à Dubaï ce matin... Il n'est plus", a indiqué à l'AFP cette source, qui a requis l'anonymat.
- La "guerre contre le terrorisme" -
Pendant ses neuf années au pouvoir, le Pakistan a vu sa croissance économique décoller, sa classe moyenne se développer, les médias se libéraliser et l'armée jouer la carte de l'apaisement face à l'Inde rivale.
"Sous Musharraf, la décision du Pakistan de se rallier à la +guerre contre le terrorisme+ s'est révélée être une aubaine", relève l'analyste Hasan Askari, évoquant l'afflux d'aide internationale dont le pays a bénéficié en conséquence.
"Il restera comme quelqu'un qui aura présidé le Pakistan à un moment très critique", ajoute M. Askari, interrogé par l'AFP.
Pour Mohammad Waqas, un étudiant de 24 ans rencontré à Islamabad, "Musharraf a amélioré le système d'éducation et les infrastructures, contribuant ainsi au développement" du pays.
"Mais d'un autre côté, le pays a subi des pertes face au terrorisme. L'entrée dans la guerre de l'Amérique a affaibli notre propre pays", a-t-il en revanche estimé.
Pervez Musharraf, un ancien commando d'élite né à Delhi le 11 août 1943, quatre ans avant la partition de l'Inde, était chef d'état-major des armées quand il avait renversé en octobre 1999 le gouvernement civil de Nawaz Sharif, sans effusion de sang.
Il s'était autoproclamé président en juin 2001, avant de remporter en avril 2002 un référendum controversé.
"Son seul acte, dont on se souviendra tout au long de l'histoire, a été d'avoir violé la Constitution", a estimé pour part le fonctionnaire à la retraite, Naeem Ul Haq Satti. "La chose la plus importante d'un pays est sa Constitution", a dit à l'AFP cet homme de 69 ans.
En 2007, M. Musharraf avait toutefois atteint des sommets d'impopularité après avoir tenté de limoger le président de la Cour suprême.
Au lendemain de l'assassinat de la dirigeante de l'opposition Benazir Bhutto en décembre 2007, les pertes écrasantes subies par ses alliés lors des élections de 2008 l'avaient laissé isolé.
Soumis à la pression de la justice et de la coalition victorieuse dans les urnes, qui s'était montrée prête à lancer une procédure de destitution à son encontre, il avait été contraint à la démission en août 2008.
En 2013, il avait interrompu un luxueux exil volontaire pour tenter de revenir au pouvoir mais sa candidature avait été invalidée et le scrutin avait été remporté par Nawaz Sharif, l'homme qu'il avait renversé en 1999.
"C'était un bon dirigeant. Il n'y a pas eu de chef comme lui auparavant et il n'y en aura plus jamais comme lui", a déclaré Muhammad Khan, un commerçant d'Islamabad âgé de 70 ans.
Pervez Musharraf avait rejoint Dubaï en 2016 pour des traitements médicaux liés à une amylose, une pathologie rare touchant les organes vitaux.
En 2019, un tribunal spécial l'avait condamné à la peine de mort par contumace pour "haute trahison", pour avoir instauré l'état d'urgence en 2007. Mais sa condamnation avait été annulée peu après.