KAMPALA - Les 417 condamnés à mort que compte l'Ouganda ont contesté mercredi devant la Cour constitutionnelle "la légalité et la constitutionnalité" de cette sentence, qu'ils dénoncent comme étant "cruelle, inhumaine et dégradante".
Cinq d'entre eux représentaient l'ensemble des plaignants dans cette audience "sans précédent en Ouganda ou sur le continent africain", selon les propos de leur avocat, Me John Katende. Les 412 autres étaient restés entre les murs de la prison de haute sécurité de Luriza.
"C'est la première fois que la totalité des prisonniers du couloir de la mort portent plainte ensemble", a souligné Me Katende, en énumérant une liste de pays africains qui ont supprimé la peine de mort ou ont entrepris le processus de suppression.
L'avocat du gouvernement, Me Benjamin Bagambe, a réclamé le maintien de la peine capitale, en arguant de son caractère "dissuasif".
Les 417 condamnés à mort avaient porté plainte devant la Cour en septembre 2003, en demandant à la justice de déclarer la peine de mort "anticonstitutionnelle", et, en conséquence, de la faire supprimer du Code pénal.
La peine de mort constitue "une torture, une forme de punition cruelle, inhumaine et dégradante", et qui plus est "interdite par la Constitution ougandaise", ont écrit les condamnés dans leur plainte.
Leur démarche avait été organisée par une association locale, la Fondation pour une initiative en faveur des droits de l'homme (Foundation for Human Rights Initiative, FHRI).
"Nous représentons tous les Ougandais qui pensent que l'on doit être responsable de ses erreurs", a répondu Me Bagambe à l'audience.
La requête en abolition de la peine de mort est "impopulaire", a-t-il ajouté, citant des sondages gouvernementaux, selon lesquels 57,5% de la population est opposée à la suppression du châtiment suprême.
"La plainte signée par 417 prisonniers condamnés à mort cherche à établir si la peine capitale est constitutionnelle, si elle est une punition légale, et si elle est autorisée par la Constitution", a déclaré Me Katende.
Les cinq représentants des condamnés à mort ont pleuré quand leur avocat a décrit les détails du déroulement d'une pendaison, devant une salle remplie par les familles des condamnés et des militants des droits de l'Homme.
Les autorités carcérales elles-mêmes soutiennent la démarche des condamnés à mort, comme en atteste une déclaration sous serment au tribunal par le directeur national de l'administration pénitentiaire, Joseph Etima.
En février 2003, le Département national des prisons avait proposé l'abolition de la peine de mort, expliquant qu'elle "traumatise" les gardiens, et demandant son remplacement par la prison à perpétuité.
Trois cent soixante-dix-sept condamnés à mort, dont une femme, ont été pendus en Ouganda depuis 1938, selon les archives de l'administration pénitentiaire nationale.
Cinquante et un d'entre eux ont été pendus depuis l'arrivée au pouvoir du président Yoweri Museveni en janvier 1986. Les dernières exécutions datent de 1999, lors de la pendaison de vingt-huit condamnés le même jour.
Soixante et onze condamnés par les tribunaux avaient été pendus pendant la dictature d'Idi Amin Dada, entre 1971 et 1979, toujours selon ces archives. Mais les exécutions sommaires se compteraient par milliers pendant cette période.