Ahmadreza Djalali, un universitaire irano-suédois dans le couloir de la mort en Iran depuis huit ans, a demandé des comptes au Premier ministre suédois après un échange de prisonniers dans lequel il n'était pas inclus, selon un enregistrement audio.
"Monsieur le Premier ministre, je vous parle depuis la prison d'Evin, à l'intérieur de l'horrible grotte où j'ai passé huit ans et deux mois de ma vie, presque 3.000 jours", dit-il dans l'audio envoyé à l'AFP mercredi par son épouse Vida Mehrannia.
"Vous m'avez laissé ici, sans défense", a lancé M. Djalali au chef du gouvernement suédois Ulf Kristersson, après la libération samedi de deux Suédois d'Iran à la faveur d'un échange de prisonniers entre Stockholm et Téhéran.
Cette libération concernait Johan Floderus, un diplomate de l'UE détenu en Iran depuis avril 2022, accusé d'espionnage et qui risquait la peine de mort, et Saeed Azizi, arrêté en novembre 2023.
"Pourquoi pas moi?", a déclaré dans son audio Ahmadreza Djalili, qui est dans le couloir de la mort en Iran depuis 2017 après avoir été reconnu coupable d'espionnage à l'issue d'un procès dénoncé par Amnesty International.
"Je suis tellement en colère, je n'ai plus les mots, qu'ont-ils fait?", a réagi auprès de l'AFP Vida Mehrannia, faisant référence au gouvernement suédois.
Le ministre des Affaires étrangères suédois Tobias Billstrom assure avoir tenté d'obtenir sa libération, mais Téhéran a refusé de discuter de son cas car l'Iran ne reconnaît pas la double nationalité.
"Ce ne sont que des excuses", a balayé son épouse. "Ils n'ont pas voulu obtenir sa libération, ce n'était pas important pour eux, ils n'ont pas voulu défier l'Iran".
"Monsieur le Premier ministre, vous avez décidé de m'abandonner au risque énorme d'être exécuté", poursuit Ahmadreza Djalali dans son audio enregistré mardi, rappelant que le Conseil des droits de l'homme des Nations unies l'avait déclaré innocent en 2017.
"Mon fils avait quatre ans lorsque j'ai été incarcéré et il a maintenant douze ans et demi. Il a passé les deux tiers de sa vie sans père. Il est né à Solna, comme tant d'autres garçons suédois", a-t-il ajouté, la voix fébrile.
"Pour montrer votre honnêteté et votre humanité en tant que valeur fondamentale (...) rencontrez mon fils et ma famille devant les caméras de télévision et dites à mon fils pourquoi vous avez laissé son père (en Iran) et ce que vous ferez pour lui si je suis exécuté", a-t-il dit.
M. Djalali a été privé d'appel vers la Suède après la diffusion de cet enregistrement, a dit son épouse à l'AFP. "Mais cela valait le coup, c'était important" de faire entendre sa voix.
Amnesty International a exhorté les autorités suédoises à "prendre d'urgence toutes les mesures nécessaires" pour obtenir la libération immédiate d'Ahmadreza Djalali et son retour auprès de sa famille.