Les criminels mineurs ne sont plus passibles de la peine de mort aux Etats-Unis, qui restaient l'un des derniers pays au monde à recourir à cette pratique, a décidé mardi la Cour suprême américaine.
Cette décision serrée, à une majorité de cinq voix contre quatre, a été largement saluée par les abolitionnistes, estimant qu'elle était conforme au souhait des Américains et permettait de replacer les Etats-Unis "dans le rang des pays honorables ayant abandonné cette pratique archaïque depuis longtemps", selon les termes de la branche américaine d'Amnesty International.
La plus haute cour du pays a ainsi décidé d'interdire l'exécution de personnes âgées de moins de 18 ans au moment de leurs crimes, qui était encore en vigueur dans douze Etats.
Elle avait déjà aboli en 1988 l'exécution de jeunes de moins de 16 ans.
A ce jour, 72 jeunes criminels attendaient leur exécution dans les "couloirs de la mort" de prisons américaines et devraient ainsi voir leurs peines commuées en prison à vie, selon le Centre d'information sur la peine de mort.
Les Etats comptant le plus grand nombre de ces condamnés sont le Texas (sud) et l'Alabama (sud).
La Cour Suprême a confirmé mardi une décision de la Cour Suprême du Missouri, affirmant que l'exécution de personnes ayant commis des crimes lors de leur minorité était contraire au 8e amendement de la Constitution interdisant tout châtiment "cruel ou disproportionné".
La Cour Suprême s'était montrée divisée en octobre, lors de l'argumentation de cette affaire. Ses neuf juges avaient vivement débattu de l'évolution de la société américaine face à ce châtiment mais aussi de l'isolement des Etats-Unis sur la scène internationale alors que seuls la Chine, l'Iran ou le Pakistan, le pratiquent.
Le juge Anthony Kennedy, qui a rédigé l'opinion de la cour au nom de sa majorité, a expliqué prendre en compte "l'immense poids de l'opinion internationale", opposée à la peine de mort pour les mineurs. Cette opposition se base largement sur "l'acceptation que l'instabilité et le déséquilibre émotionnel" des jeunes peut être un facteur de leurs crimes, explique-t-il.
Les quatre juges les plus progressistes de la Cour se sont rangés à ses côtés. En revanche, l'autre "centriste" de la Cour, Sandra O'Connor, s'est jointe aux conservateurs, opposés à la décision. Parmi ces derniers, figure le président de la Cour, William Rehnquist, soigné pour un cancer de la thyroïde et dont le possible départ fait l'objet d'intenses spéculations.
Le cas soumis à la Cour était celui de Christopher Simmons, condamné en 1993 pour avoir tué, à l'âge de 17 ans, une femme qu'il avait ligotée avant de la jeter vivante du haut d'un pont.
Son avocat Seth Waxman avait notamment argumenté que la peine de mort n'avait pas de pouvoir dissuasif sur les adolescents dans la mesure où ils "n'évaluent pas les riques comme des adultes".
Ces vingt dernières années, 22 mineurs au moment de leurs crimes ont été exécutés aux Etats-Unis, dont 13 au Texas. Neuf de ces exécutions ont eu lieu depuis 2000, selon la Coalition nationale contre la peine de mort (NCADP).
La décision de la Cour Suprême "confirme ce que nous savions tous et que la science a récemment démontré: les gamins sont différents" des adultes, s'est félicitée la directrice de cette ONG, Diann Rust-Tierney. Et "leur nature interdit de les ranger dans la catégorie des 'pires des pires', utilisée comme repère par certains pour justifier la peine de mort", assure-t-elle.