BANGUI (AFP) - L'ancien président centrafricain, le général André Kolingba, et une vingtaine de militaires centrafricains, jugés par contumace dans le cadre du procès sur le coup d'Etat manqué du 28 mai 2001, ont été condamnés à mort lundi par la Cour criminelle de Bangui.
L'ex-chef de l'Etat, au pouvoir de 1981 à 1993, a été reconnu "coupable du crime d'atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat" par la Cour criminelle qui a rendu son verdict lundi.
La Cour a suivi le réquisitoire du procureur général, Joseph Bindoumi, qui avait requis vendredi la peine capitale contre le général Kolingba pour avoir "préparé et exécuté" l'attaque, dans la nuit du 27 au 28 mai 2001, de la résidence de l'actuel président Ange-Félix Patassé, au pouvoir depuis 1993.
En fuite, comme la plupart des 615 présumés putschistes jugés vendredi dernier par contumace, le général Kolingba avait de toute façon endossé la paternité de ce putsch sur les ondes de Radio France internationale (RFI) quelques jours plus tard.
Ce coup de force, suivi de près de deux semaines de combats entre putschistes et troupes loyalistes, avait fait 59 morts, selon un bilan officiel, davantage selon des témoignages, et provoqué l'exode d'environ 80.000 Banguissois.
La Cour criminelle, une juridiction spéciale dépendant de la cour d'appel de Bangui, a également condamné à mort, comme l'avait demandé le procureur général, 22 officiers et sous-officiers reconnus coupables du même crime.
Trois fils d'André Kolingba, Serge, Francis, et Arthur, ainsi que le commandant Anicet Saulet, qui avait mené l'une des mutineries militaires de 1996-97 en Centrafrique, font partie de ce groupe.
La Cour pouvait difficilement être clémente au regard des témoignages recueillis par la Commission mixte d'enquête judiciaire sur le coup d'Etat. Ces témoignages, lus au cours de l'audience de vendredi, étaient accablants pour la plupart des condamnés, souvent cités nommément dans certaines phases du putsch.
Dans le cas du général Kolingba, des témoins ont rapporté la tenue de réunions secrètes à son domicile, où des armes avaient également, selon eux, été entreposées.
La Cour criminelle, présidée par Zacharie Ndouba, a créé la surprise en condamnant aussi à mort le député d'opposition Charles Massi, un militaire en disponibilité et en exil depuis début 2001 en France, ainsi qu'un colonel des douanes, pourtant présentés par le procureur général parmi les "co-auteurs" du putsch.
Le général Guillaume Lucien N'djengbot, un proche d'André Kolingba incarcéré au moment des faits avant d'être libérés par les putschistes, contre lequel avait été requis la peine capitale, a en revanche été placé dans ce groupe des "co-auteurs", dix personnes au total, condamnés à "20 ans de travaux forcés". Pour tous ces condamnés, la Cour a par ailleurs ordonné la "confiscation des biens meubles et immeubles".
Le verdict a également été sévère envers ceux que le procureur avait décrit comme des "déserteurs", un groupe d'environ 580 militaires en fuite ou qui, rentrés à Bangui dans l'anonymat, ne se sont pas présentés à la justice de leur pays.
Elle les a reconnus coupables de "désertion pour complot", avant de les condamner "à dix ans de réclusion", alors que les peines requises étaient de "10 ans de travaux forcés".
La Cour criminelle a par ailleurs délivré à l'issue du verdict un "mandat d'arrêt" contre l'ensemble des condamnés jugés par contumace, qui ont également été "déchus de leurs droits civiques".
A la suite d'une courte suspension, la Cour a repris le procès de quelque 82 autres présumés putschistes, militaires et civils, présents à Bangui, et parmi lesquels figure l'ancien ministre de la Défense de l'époque, Jean-Jacques Démafouth, accusé d'avoir ourdi un complot parallèle.