Zacarias Moussaoui finira ses jours en prison de haute sécurité. Ainsi en ont décidé mercredi les jurés de son procès devant le tribunal fédéral d'Alexandria (Virginie), qui n'ont pu s'entendre à l'unanimité sur une condamnation à mort de l'accusé pour son rôle dans les attentats du 11 septembre 2001.
Après sept jours de délibérations à huis clos, le jury composé de neuf hommes et trois femmes a recommandé la prison à vie, sans possibilité de réduction de peine, pour le Français d'origine marocaine, le prononcé formel du verdict devant être annoncé jeudi matin par la juge Leonie Brinkema.
Les jurés devaient décider si Moussaoui, 37 ans, unique inculpé aux Etats-Unis dans l'enquête sur le 11-Septembre, devait être condamné à mort ou à la prison à vie, après avoir plaidé coupable de complot en avril 2005. Ils avaient pour cela à répondre à un questionnaire de 42 pages commençant par trois questions-clés: "a-t-il provoqué la mort d'autres personnes?", "a-t-il commis des actes avec cruauté et haine?", "ces actes ont-il été prémédités?"
Le jury, qui avait estimé dans la première phase du procès que Moussaoui était passible de la peine capitale, n'a finalement pu s'entendre sur un verdict de mort, après avoir longuement pesé les circonstances aggravantes et atténuantes concernant l'accusé.
Les jurés sont en revanche tous tombés d'accord pour estimer que l'accusé a "créé sciemment un grave risque de mort" pour des personnes autres que les victimes du 11-Septembre et a commis ces actes avec une "certaine préméditation", deux des facteurs aggravants requis pour une condamnation à mort.
S'ils ont pris en considération plusieurs des éléments atténuants présentés par la défense au cours de ce procès de six semaines, ils n'ont pas accepté l'argument selon lequel Moussaoui souffrait de schizophrénie.
Trois jurés ont considéré que le Français n'avait qu'une connaissance limitée du projet d'attentats du 11-Septembre et trois autres ont décrit comme "mineur" son rôle dans ces attaques terroristes qui ont coûté la vie à près de 3.000 personnes.
"Amérique, tu as perdu (...) j'ai gagné", a lancé Moussaoui en quittant la salle d'audience. Son dernier geste a été d'applaudir. Il a ensuite été reconduit à sa cellule. Il devrait prochainement être transféré au pénitencier de haute sécurité de Florence, dans le Colorado.
Plusieurs familles ont estimé que l'accusé avait obtenu ce qu'il méritait. "Je sais que le jury a pris la bonne décision", a réagi Abraham Scott, qui a perdu son épouse Janice Marie Scott dans l'attentat contre le Pentagone. "Aujourd'hui, la justice a été rendue."
Rosemary Dillard, dont le mari Eddie a péri dans les attaques du 11-Septembre, s'est-elle aussi réjoui du verdict. "C'est un homme mauvais, mais nous avons une société juste", a-t-elle déclaré, observant que même les terroristes étaient "traités avec respect, quoi qu'ils nous aient fait".
Le président américain George W. Bush a quant à lui jugé que ce verdict constituait "la fin de ce procès mais pas la fin de la lutte contre le terrorisme". Selon lui, "notre cause est juste et le résultat certain: la justice sera rendue".
En France, tandis que le ministre de la Justice Pascal Clément déclarait "prendre acte" de cette décision, Me Patrick Baudouin, avocat d'Aïcha El Wafi, la mère de Zacarias Moussaoui, s'est "félicité que la peine de mort n'ait pas été prononcée ce soir". Mais, a-t-il dit à l'Associated Press, "je ne peux pas me réjouir de la condamnation qui vient d'être prononcée, dans la mesure où la prison à vie est une peine qui est elle-même extrêmement sévère et disproportionnée par rapport aux actes pouvant réellement être reprochés à Zacarias Moussaoui, par rapport aux faits".
La mère du condamné s'est elle déclarée anéantie. "Je ne sens rien, je suis morte, parce que mon fils est condamné à tort, condamné pour ce qu'il a dit, mais pas pour ce qu'il a fait", a-t-elle réagi.