AUSTIN (Etats-Unis), 10 déc (AFP) - Un condamné à mort canadien qui devait être exécuté jeudi soir au Texas a obtenu mercredi un sursis in extremis, lorsqu'un juge fédéral a remis en question la procédure utilisée dans cet Etat lors d'appels à la clémence de la part de prisonniers.
Le Texas a aussitôt annoncé qu'il interjeterait appel de ce jugement qui accorde un sursis au Canadien Joseph Stanley Faulder jusqu'au 21 décembre, alors qu'une audition devra tirer l'affaire au clair.
Le juge Sam Sparks de la cour fédérale de district de l'Ouest du Texas a rendu son jugement quelques heures après que la Commission de recours en grâce du Texas eut rejeté un appel à la clémence de dernière minute de la part de M. Faulder.
Le juge Sparks a fondé sa décision sur un jugement rendu en mars par la Cour suprême des Etats-Unis concernant un cas survenu en Ohio. Ce jugement faisant maintenant jurisprudence stipule que "des clauses minimales de procédure s'appliquent dans le cas d'appels à la clémence".
Or, selon le juge Sparks, la Commission des recours en grâce du Texas a fait fi de ces clauses mercredi lorsque M. Faulder, 61 ans, a demandé la clémence. Ces clauses, a rappelé le juge, ont précisément pour objectif "d'éviter des décisions arbitraires et capricieuses ou des décisions (dans le cas d'appel) à la clémence ne répondant pas aux procédures prévues".
"Par conséquent, la cour ne peut affirmer si la procédure du Texas relative à la clémence satisfait aux standards minimaux requis" depuis le jugement de l'Ohio, a écrit le juge Sparks.
La même commission texane avait refusé plus tôt dans la journée de commuer la condamnation de M. Faulder en peine de prison à vie, malgré d'ultimes interventions de la part du Canada et de l'Union européenne (UE).
Ottawa et l'UE avaient demandé la grâce pour M. Faulder en faisant valoir que ses droits d'obtenir un contact avec les autorités consulaires canadiennes n'avaient pas été respectés ni lors de son arrestation ni lors de son jugement.
En fait, ce n'est que des années après qu'il eut été reconnu coupable pour le meurtre en 1975 d'une riche Texane, Ines Phillips, que les autorités canadiennes ont appris que M. Faulder, originaire de Jasper (Alberta), avait été condamné à mort, en violation flagrante de la Convention de Vienne, accord international régissant les relations consulaires. Le Canadien a déjà passé 21 années en prison.
Les autorités texanes, le gouverneur George Bush Jr en tête, étaient également demeurées sourdes à l'appel du secrétaire d'Etat américain Madeleine Albright pour que l'exécution soit repoussée d'un mois.
Interrogé par la presse pour savoir s'il ne craignait pas que cette décision n'entache la réputation du Texas à l'étranger, M. Bush avait rétorqué: "Nous sommes un Etat pour la peine de mort. Nous croyons que c'est un châtiment rapide et sûr".
Pendant ce temps à l'extérieur de l'édifice du Capitole de l'Etat, une délégation canadienne dénonçait la façon cavalière et "inadmissible" dont elle avait été reçue par le président de la Commission des recours en grâce de l'Etat, à qui elle était venue demander de suspendre l'exécution de M. Faulder.
En fin de journée cependant, l'ambiance était à la fête parmi les Canadiens après la décision du juge Sparks, celui-là même qui avait rejeté en février dernier un appel à la clémence de dernière minute de la condamnée à mort Karla Faye Tucker, suscitant un concert de protestations à l'étranger.
Quel que soit le sort final du Canadien, ce jugement est susceptible de ralentir la cadence des exécutions dans cet Etat, celui qui a exécuté le plus grand nombre de condamnés à mort depuis le rétablissement de la peine capitale aux Etats-Unis en 1976.
Depuis cette date, 163 exécutions ont en effet eu lieu au Texas et 453 prisonniers, dont 7 femmes, attendent encore le même sort, tous dans la prison de Huntsvile, où M. Faulder est aussi emprisonné.