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A propos de la résolution sur la question de la peine de mort (E/CN.4/2003/L.93)

DH/G/221
communiqué de presse du 24 avril 2003 - Commission des droits de l'homme de l'ONU
Titre du communiqué : LA COMMISSION PROROGE LE MANDAT DE LA REPRESENTANTE SPECIALE POUR LA QUESTION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME

extraits sur la peine de mort :

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Sur la question de la peine de mort, par une résolution adoptée par 24 voix contre 18, avec 10 abstentions, la Commission engage tous les États qui n'ont pas encore aboli la peine de mort à abolir définitivement la peine de mort et, en attendant, à instituer un moratoire sur les exécutions. Elle prie instamment tous les États qui maintiennent la peine de mort de ne pas la prononcer dans le cas de personnes âgées de moins de dix-huit ans et dans le cas de femmes enceintes. Elle les prie instamment de ne prononcer la peine de mort que pour les crimes les plus graves et en vertu d'un jugement final rendu par un tribunal compétent, indépendant et impartial. Plusieurs paragraphes de ce texte ont fait l'objet d'un vote séparé et ont été maintenus par 24 voix contre 20, avec 8 abstentions. Se sont exprimés à cette occasion: l'Inde, l'Algérie, la République démocratique du Congo, l'Arabie saoudite (au nom de 17 membres de la Commission et 46 observateurs), les États-Unis, le Kenya, la Thaïlande et la Libye.


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Adoption de résolutions et de décisions au titre de la promotion et de la protection des droits de l'homme

[...]
Par une résolution sur la question de la peine de mort (E/CN.4/2003/L.93), adoptée par 24 voix pour, 18 contre et 10 abstentions, la Commission engage tous les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui ne l'ont pas encore fait envisager d'adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, visant à abolir la peine de mort, ou de le ratifier. Elle prie instamment tous les États qui maintiennent la peine de mort: de ne pas la prononcer dans le cas de personnes âgées de moins de dix-huit ans et dans le cas de femmes enceintes; de ne prononcer la peine de mort que pour les crimes les plus graves et en vertu d'un jugement final rendu par un tribunal compétent, indépendant et impartial, et de garantir le droit à un procès équitable et le droit de solliciter la grâce ou la commutation de la peine; de veiller à ce que toutes les procédures légales, notamment celles engagées devant des tribunaux ou des juridictions d'exception et en particulier les procédures relatives aux crimes

emportant la peine capitale, soient conformes aux garanties de procédure minimales énoncées à l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques; de ne pas prononcer la peine de mort dans le cas de personnes atteintes d'une quelconque forme de maladie mentale, ni d'exécuter un condamné atteint de maladie mentale; d'exempter de la peine capitale les mères ayant des enfants en bas âge; de ne pas exécuter une personne tant qu'une procédure juridique la concernant est en cours, au niveau international ou national.

D'autre part, la Commission engage tous les États qui n'ont pas encore aboli la peine de mort à limiter progressivement le nombre d'infractions qui emportent cette peine. Elle les engage aussi à abolir définitivement la peine de mort et, en attendant, instituer un moratoire sur les exécutions. Elle prie enfin les États qui ont reçu une demande d'extradition concernant une personne qui encourt la peine de mort de se réserver explicitement le droit de refuser l'extradition s'ils ne reçoivent pas des autorités compétentes de l'État demandeur des assurances concrètes que la peine capitale ne sera pas appliquée.

Ont voté pour (24): Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Arménie, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Canada, Chili, Costa Rica, Croatie, Fédération de Russie, France, Irlande, Mexique, Paraguay, Pérou, Pologne, Suède, Royaume-Uni, Ukraine, Uruguay et Venezuela.

Ont voté contre (18): Arabie saoudite, Bahreïn, Chine, États-Unis, Japon, Jamahiriya arabe libyenne, Malaisie, Ouganda, Pakistan, République de Corée, Sierra Leone, Soudan, Swaziland, République arabe syrienne, Thaïlande, Togo, Viet Nam et Zimbabwe.

Abstentions (10): Burkina Faso, Cameroun, Cuba, Gabon, République démocratique du Congo, Guatemala, Inde, Kenya, Sénégal et Sri Lanka.

La Commission a décidé par un vote de 24 voix contre 20, avec huit abstentions de maintenir les paragraphes 4(j), 5(b) et 7 du projet de résolution L.93 respectivement libellés comme suit: (la Commission) "prie instamment tous les États qui maintiennent la peine de mort de ne pas exécuter une personne tant qu'une procédure juridique la concernant est en cours, au niveau international ou national"; "engage tous les États qui n'ont pas encore aboli la peine de mort à abolir définitivement la peine de mort et, en attendant, instituer un moratoire sur les exécutions"; "prie les États qui ont reçu une demande d'extradition concernant une personne qui encourt la peine de mort de se réserver explicitement le droit de refuser l'extradition, s'ils ne reçoivent pas des autorités compétentes de l'État demandeur des assurances concrètes que la peine capitale ne sera pas appliquée".

Explications de vote et observations générales

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S'exprimant au sujet du projet de résolution portant sur la peine de mort (E/CN.4/2003/L.93) le représentant de l'Inde a rappelé qu'aucun consensus n'a pu être atteint au niveau mondial sur cette question. Il est clair qu'un processus progressif doit présider à l'examen de ce problème. En Inde, cette peine n'est appliquée qu'à titre exceptionnel, pour les crimes particulièrement odieux. Elle n'est appliquée ni aux femmes enceintes, ni aux mineurs. Le texte demande par contre de façon inacceptable que le moratoire soit prononcé au niveau international sur les exécutions qui font l'objet d'une procédure juridique. Seuls les États ont la compétence pour juger les crimes commis sur leur sol.

Concernant le projet de résolution L.93 sur la question de la peine de mort, le représentant de l'Algérie a déclaré que sa délégation comprend parfaitement l'esprit humaniste de ce texte et adhère à la philosophie qui le sous-tend. Il a rappelé que son pays observe depuis 1993 un moratoire sur les exécutions capitales. Par conséquent, l'Algérie ne peut aller qu'à la rencontre des coauteurs de ce projet de résolution. Il n'en demeure pas moins que sa préférence va aux dynamiques progressives. Avant d'évoquer entre autres l'assassinat il y a plusieurs années de Dulcie September à Paris, le représentant algérien a en outre rappelé que la délégation de la République démocratique du Congo avait soulevé il y a quelques jours un problème important: à savoir comment les pays abolitionnistes peuvent-ils admettre qu'un premier magistrat ordonne à leurs services spéciaux de perpétrer des assassinats extrajudiciaires? L'Algérie ne prendra pas part au vote sur ce projet de résolution.

Le représentant de la République démocratique du Congo a déclaré que sa délégation est d'avis que dans le droit international, la peine de mort n'est pas hors-la-loi. En République démocratique du Congo, cette peine est réservée à des crimes très graves, crimes de sang notamment. Il reviendra au Parlement, ou au peuple par référendum, de décider de l'abolition de cette peine. Cela suppose un effort d'information en direction de la population. Quoi qu'il en soit la République démocratique du Congo vise, à terme, l'abolition, c'est pourquoi elle a maintenu un moratoire sur l'application de la peine de mort. La délégation s'abstiendra lors du vote sur la résolution L.93.

Le représentant de l'Arabie saoudite a déclaré qu'il se dissociait du projet L.93 de l'Union européenne.

Le représentant des États-Unis a déclaré que son pays ne peut souscrire au projet de résolution L.93 sur la question de la peine de mort car le droit international n'interdit pas la peine de mort lorsque les règles de la procédure et les garanties de la défense sont respectées. Les États-Unis seront donc une fois encore obligés de voter contre le projet de résolution L.93.

Le représentant du Kenya s'est associé à la déclaration que vient de faire l'Arabie saoudite. Il a rappelé qu'il n'existe pas de consensus sur la question de la peine de mort au niveau international. La peine de mort reste applicable au Kenya pour certains crimes, à savoir les crimes les plus graves, mais n'a pas été appliquée dans le pays depuis plus de dix ans, a rappelé le représentant kenyan. Le Président de la République du Kenya a exercé sa prérogative lui permettant de libérer des prisonniers condamnés à mort et ayant déjà purgé de longues peines, mais le Parlement a pour sa part examiné la question à deux reprises récemment sans parvenir à obtenir l'appui nécessaire à l'abrogation des textes existants, de sorte que la peine de mort reste inscrite dans les textes. Aussi, le Kenya s'abstiendra-t-il lors du vote sur le projet de résolution L.93.

La représentante de la Thaïlande a rappelé qu'il n'existe aucun consensus international sur l'abolition de la peine de mort, qui ne constitue pas une violation des droits de l'homme. Le problème réside plutôt dans le respect des garanties des personnes qui encourent de telles peines, notamment la non-application aux personnes mineures, ou aux femmes enceintes, comme c'est le cas en Thaïlande. La résolution présentée par l'Union européenne ne peut donc être acceptée par la Thaïlande.

La représentante de la Libye a également relevé qu'il n'y avait pas de consensus au sujet de la peine de mort, mais a expliqué que son pays n'appliquait cette peine qu'au terme d'un processus très long. La charte des citoyens de la Libye restreint d'ailleurs très fortement son application. La Libye ne votera pas en faveur du projet L.93.
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