AFP - La mortelle randonnée islamophobe de Mark Stroman à Dallas (Texas) juste après le 11-Septembre s'est soldée par deux morts et un blessé: Rais Bhuiyan. Ce musulman a perdu un oeil dans l'agression, mais il demande la clémence pour Stroman, qui doit être exécuté mercredi.
A la veille des attentats du 11 septembre 2001, le tailleur de pierre texan Mark Stroman a 31 ans. Il aime le groupe de rock Lynyrd Skynyrd et "les armes", comme le rappellera son avocate, Lydia Brandt, dans un ultime recours auprès d'une Cour d'appel.
Surviennent les attentats lors desquels la demi-soeur de Mark Stroman aurait péri. Le jeune homme est "bouleversé", pétri d'une douleur qui bientôt fait place à la "rage". Parti pour "venger l'Amérique", le jeune homme "ne peut pas aller au Moyen-Orient, il s'en prend donc à ceux dont il pense qu'ils ont quitté le Moyen-Orient pour s'installer aux Etats-Unis", note Lydia Brandt.
Pourtant, Mark Stroman n'est, de l'aveu de Me Brandt, "pas en mesure de faire la différence entre un sikh et un musulman, entre l'arabe et l'ourdou".
Quatre jours après les attentats, Mark Stroman fait sa première victime: Waqar Hasan, un musulman d'origine pakistanaise, sur lequel il tire à bout portant sans poser de question. Hasan décède sur le coup.
Le 21 septembre, c'est le tour de Rais Bhuiyan, originaire du Bangladesh. Grièvement blessé au visage, Bhuiyan s'en tire miraculeusement mais perd l'usage d'un oeil.
La dernière victime de Mark Stroman s'appelle Vasudev Patel et est hindou.
C'est pour le meurtre de ce dernier que Stroman est condamné en avril 2002 à la peine de mort au cours d'un procès où, selon des images diffusées par la chaîne CBS, Stroman n'hésite pas à brandir le drapeau américain et à clamer sa filiation avec "l'Aryan Brotherhood" (fraternité aryenne), une confrérie qui prône la supériorité des Blancs.
Dix ans plus tard et quelques jours avant son exécution programmée pour mercredi à Huntsville, c'est un Mark Stroman transformé que le New York Times a interviewé. "La haine doit s'arrêter, nous faisons tous partie de la même planète (...) Nous avons besoin de plus de pardon et d'empathie et de moins de haine", a-t-il expliqué au quotidien dans son édition de mardi.
C'est que "le coeur" de Mark Stroman a été touché par Rais Bhuiyan, l'employé de station-service sur lequel il avait fait feu près de dix ans auparavant.
"Quelle force d'inspiration", a lancé Stroman à propos de sa victime.
Car Bhuiyan, musulman pratiquant, milite pour que la peine de mort de Stroman soit commuée en prison à vie.
"S'il vous plaît, ayez pitié. S'il vous plaît, épargnez Mark Stroman"
Dans le New York Times de mardi, M. Bhuiyan a justifié son combat par son éducation: "Mes parents m'ont appris à me mettre dans la peau des autres. Si on te blesse, ne te venge pas. Pardonne. Vis ta vie. Cela ne peut que t'être bénéfique à toi et aux autres". Mais à quelques heures de l'exécution de Mark Stroman, il y a peu de chances pour que M. Bhuiyan obtienne gain de cause.
Ses recours ont tous échoué et la Cour suprême américaine a refusé le 27 juin qu'un délai supplémentaire soit accordé au condamné, dont l'exécution doit avoir lieu à 23H00 GMT mercredi. Le seul à pouvoir sauver Stroman serait le gouverneur républicain du Texas, candidat potentiel à l'investiture de son parti pour la présidentielle de 2012. Mais les chances que Rick Perry obtempère sont infinitésimales.
Lundi soir, Rais Bhuiyan, au bord des larmes, a tout de même supplié les autorités dans un reportage diffusé par CBS. "S'il vous plaît, ayez pitié. S'il vous plaît, épargnez Mark Stroman", a-t-il lancé.
Comme pour donner du poids a ses paroles, Rais Bhuiyan a attaqué M. Perry en justice dans l'espoir de stopper l'exécution. Il accuse le gouverneur du Texas d'avoir violé ses droits en ne l'autorisant pas a rencontrer Mark Stroman.