TUNIS (AP) — La peine capitale a été requise mercredi contre l'ex-président tunisien Zine el Abidine ben Ali, jugé par contumace par le tribunal militaire du Kef (nord-ouest de la Tunisie) pour son implication dans des homicides volontaires lors du soulèvement populaire qui a fait chuter son régime en janvier 2011, a rapporté l'agence officielle TAP.
Le procureur a également requis "les peines les plus sévères" contre 22 co-accusés, dont l'ancien ministre de l'Intérieur Rafik Haj Kacem et de hauts responsables sécuritaires, la plupart en état d'arrestation.
Le président déchu et ses co-inculpés étaient poursuivis dans l'affaire dite de "Thala, Kasserine, Kairouan et Tajérouine", quatre villes du centre tunisien où la répression policière a fait plusieurs dizaines de morts.
L'avocat de la défense, Sami Souissi, a rejeté la requête du ministère public, la qualifiant de "non fondée dans la forme comme dans le fond".
De son côté, le conseil de Rafik Haj Kacem, Me Othman Oueslati, a avancé que l'ancien ministre de l'Intérieur n'avait reçu aucun ordre de tuer de l'ex-président Ben Ali, demandant le non-lieu pour son client.
C'est la première fois que la peine capitale est requise contre l'ex-président, actuellement réfugié en Arabie Saoudite.
Son avocat libanais, Akram Azoury, a dénoncé la requête du ministère public qui, selon lui, revêt "un caractère politique et non pas judiciaire".
Dans un communiqué transmis jeudi à l'Associated Press, le conseil estime que le réquisitoire "prépare un jugement incompatible avec les normes internationales, à l'instar des jugements prononcés précédemment et de la même manière".
Il espère que "la justice s'opposera d'elle-même à cette tentative, d'autant, plaide-t-il, que tous les responsables interrogés ont nié que le président Ben Ali leur ait donné des ordres pour faire usage de balles réelles" contre les manifestants.
Il souhaite que le tribunal, "pour s'en assurer, exige l'audition des enregistrements des communications relatives à cette période entre le palais présidentiel et les ministères de l'Intérieur et de la Défense".
Me Azoury estime que si, malgré cela, une condamnation venait à être prononcée comme le réclame le parquet, un tel verdict "n'aura aucune valeur juridique ni aucun effet à l'international".
L'ex-président tunisien a déjà été condamné par défaut dans des affaires civiles à 66 ans de prison pour détention illicite d'armes, trafic de drogue, malversations et abus de biens publics.
Une autre affaire similaire est en cours devant le tribunal militaire de Tunis pour les homicides perpétrés dans les régions du nord du pays.
Selon le dernier bilan établi par une commission indépendante conduite par un ancien président de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme, Taoufik Bouderbala, quelque 338 personnes ont trouvé la mort lors de la répression du soulèvement populaire et 2.147 autres ont été blessées.