ANKARA - La presse turque exaltait mercredi la condamnation à mort du chef rebelle kurde Abdulalh Ocalan, mais les éditorialistes s'interrogeaient sur l'opportunité de le pendre, la plupart appelant à prendre une décision de sang froid et dans l'intérêt du pays.
Les gros titres, sans nuance, louaient la condamnation à mort pour trahison et séparatisme du chef du parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK).
"La peine de mort: Le bourreau livré au bourreau", titrait le quotidien populaire Sabah sur une photo pleine page d'Ocalan, en arrière-fond, accompagné d'une corde déjà nouée pour la pendaison et d'une photo figurant la joie des familles des soldats tués dans les combats avec la guérilla.
"Apo (diminutif d'Abdullah Ocalan) sera pendu", assurait un éditorialiste du quotidien à grand tirage Hurriyet, avec une photo de bébé tué dans une attaque du PKK. "Est-il possible pour une nation qui a exécuté plusieurs sultans et pendu son propre Premier ministre (NDLR: Adnan Menderes en 1961) de laisser échapper un meurtrier qui a tué nos enfants?"
Bon nombre d'éditorialistes relevaient le risque qu'une exécution ne détériore encore les relations entre Turcs et Kurdes, et avec l'étranger.
"Qu'(Ocalan) soit pendu ou pas, l'important est de calculer ce que rapportera cette décision", estimait le quotidien libéral Milliyet, en appelant le gouvernement à fournir une aide financière au sud-est sous-développé, théâtre de la rébellion du PKK, et à accorder des droits culturels à la population kurde.
"La Turquie est à un croisement", soulignait un autre éditorialiste. "Serons nous capables de traiter les identités ethniques au niveau privé et culturel et de les amalgamer sur la base d'une "nation turque" ou bien allons-nous tomber dans la balkanisation?".
Pour le quotidien libéral Radikal, "le terrorisme du PKK finira-t-il si Ocalan est pendu? Si oui, il devrait être pendu. Sinon, personne n'a le droit de procéder à un exécution qui exposerait la Turquie sans défense dans l'arène internationale".
Le quotidien islamiste Zaman soulignait que "la vraie question n'est pas de savoir si Ocalan sera exécuté, mais si la Turquie sera capable de prendre des mesures historiques pour résoudre un problème dont elle n'a pu s'extriquer dans les 15 dernières années", en allusion à la rébellion kurde.
"N'oublions pas qu'un jour après l'exécution (d'Ocalan), les relations étrangères de la Turquie pourraient être dans une impasse et, plus important, cela pourrait empêcher la paix sociale et détériorer les sentiments mutuels de confiance" entre Kurdes et Turcs, soulignait un autre quotidien islamiste, Yeni Safak.
Pour le quotidien de langue anglaise Turkish Daily News, il faut "éviter la discussion oiseuse de savoir si nous devons pendre ou pas Ocalan. Concentrons nous plutôt sur les moyens de faire de la Turquie un pays plus démocratique où les libertés existent pleinement et qui croie à la suprématie de la loi".