Le 10 octobre 2013, la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission africaine), à travers son Groupe de Travail sur la Peine de Mort et les Exécutions Extrajudiciaires, Sommaires ou Arbitraires célèbre, avec le reste du monde, la 11ème Journée mondiale contre la Peine de Mort dont le thème retenu pour cette année est "Arrêtons le Crime, Pas la Vie."
Les recherches scientifiques sur les effets de la peine de mort prouvent que les vertus dissuasives de la peine de mort ne sont pas plus efficaces que celles d'autres peines, en l'occurrence, la peine d'emprisonnement à perpétuité. En procédant à l'exécution des meurtriers, violeurs des enfants et autres auteurs d'actes de barbarie à fin d'apaiser le chagrin des familles des victimes on se rapproche de la notion de la vengeance et on rappelle la période la plus ancienne de la justice privée, au cours de laquelle la victime et sa famille prenaient la justice en otage. La peine de mort, par sa nature absolue et irréparable, est aussi incompatible avec toute politique de récupération du délinquant, bafoue tout le système basé sur le respect de l'être humain, entrave l'unité et la réconciliation des peuples sortants des périodes des conflits ou des crimes graves et fausse la justice pénale en la rendant absolue alors qu'elle doit constamment rester attentive à ses possibles erreurs.
Depuis plus d'une décennie, la Commission Africaine invite les Etats retentionistes à abolir légalement la peine de mort ou à envisager un moratoire de son exécution. On observe à l'échelle mondiale et continentale une évolution vers l'abolition de la peine de mort. Seulement 10% des Etats dans le monde entier exécutent encore les condamnés à la peine de mort.
En Afrique, 17 Etats Africains ont aboli la peine de mort par voie législative ou judiciaire tandis que 20 autres Etats observent un moratoire de fait depuis plus de dix ans. 10 des Etats abolitionnistes de droit ou de fait ont déjà accédé au Deuxième Protocole Facultatif au Pacte International Relatif aux Droits Civils et Politiques visant à interdire la réintroduction de la peine de mort dans les pays abolitionnistes, le dernier Etat en date à ratifier ce Protocole étant le Benin.
La Commission Africaine reste cependant préoccupée par les vagues d'exécutions manifestées ces deux dernières années dans certains pays Africains, notamment dans l'Etat d'Edo au Nigeria, en Somalie, au Soudan du Sud, au Botswana et en Gambie où neuf personnes qui venaient de passer des années en couloir de la mort ont été exécutées en secret.
Elle est également préoccupée par le nombre de plus en plus important des condamnations à mort que les Tribunaux continuent à imposer en augmentant ainsi le nombre des personnes en couloir de la mort.
Elle félicite les Etats Africains qui ont déjà légalement aboli la peine de mort notamment l'Afrique du Sud, l'Angola, le Benin, le Burundi, le Cap Vert, la Côte d'Ivoire, le Djibouti, le Gabon, la Guinée-Bissau, l'Ile Maurice, le Mozambique, la Namibie, le Rwanda, le Sao Tomé-et-Principe, le Sénégal, les Seychelles et le Togo ; et encourage ceux qui observent un moratoire sur la peine de mort à prendre des mesures juridiques en vue de son abolition.
La Commission Africaine invite les pays qui n'ont pas encore aboli la peine de mort à imposer un moratoire sur l'exécution des condamnés à mort en commuant les peines de mort déjà prononcées en peines d'emprisonnement à perpétuité.
La Commission Africaine invite enfin les Etats membres de l'Union Africaine qui ne l'ont pas encore fait, à ratifier les instruments des droits de l'homme qui interdisent la peine de mort, en l'occurrence le Deuxième Protocole Facultatif se rapportant au Pacte International des Droits Civils et Politiques visant l'abolition de la peine de mort, et à harmoniser leur législation nationale dans ce sens.
Fait à Banjul le 10 octobre 2013.