Le Caire - Une cour égyptienne a ajourné samedi son verdict dans le procès du guide spirituel des Frères musulmans, Mohamed Badie, et de 37 co-accusés, jugés pour des violences ayant fait deux morts en 2013 dans le delta du Nil.
Dans la même affaire, elle a néanmoins condamné à la peine de mort dix accusés en fuite, la décision finale sur ces peines étant attendue le 5 juillet, comme le verdict contre M. Badie et les 37 autres accusés.
Depuis la destitution le 3 juillet du président islamiste Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, les nouvelles autorités installées par l'armée mènent une sanglante répression contre ses partisans et ont arrêté 15.000 d'entre eux. M. Badie lui même est poursuivi au total dans une quarantaine d'affaires, et encourt à chaque fois la peine de mort, selon un des avocats de la défense, Mohamed Abou Leila.
L'audience de samedi a été chaotique: après être entrés dans le box des accusés, les 38 accusés emprisonnés ont scandé des slogans contre l'armée, artisane de la destitution de M. Morsi, et ont été insultés par un témoin, selon un correspondant de l'AFP.
Le verdict concernant les dix accusés en fuite condamnés à la peine capitale doit être confirmé en juillet, après avis du mufti.
En Egypte, les peines de mort doivent en effet être soumises à ce représentant de l'islam auprès de l'Etat, mais son avis n'est pas contraignant. La cour peut ensuite décider de commuer ces peines, qui seront susceptibles d'appel.
Les accusés jugés en leur absence ont droit à un nouveau procès s'ils sont arrêtés.
M. Badie a déjà été condamné en avril à la peine capitale par une cour de Minya (centre), en même temps que 682 partisans présumés de M. Morsi, pour avoir incité à des violences ayant conduit à la mort d'au moins un policier lors d'une manifestation dans cette ville en août 2013. Ce verdict doit être confirmé le 21 juin par ce tribunal.
Le 24 mars, la même cour avait prononcé 529 peines capitales contre d'autres islamistes présumés, avant d'en commuer 492 en prison à vie fin avril.
Ces peines prononcées à l'issue de procès expéditifs ont provoqué un tollé international.
Dans l'affaire examinée samedi, M. Badie est accusé d'avoir incité aux violences ayant conduit à la mort de deux personnes à Qalioub, dans le delta du Nil, quelques jours après la destitution de M. Morsi.
Il est accusé d'incitation au meurtre et d'incitation à répandre le chaos et à mener des attaques contre des biens publics et privés, a précisé Me Abou Leila.
Parmi les autres accusés figurent un cadre des Frères musulmans, Mohamed al-Beltagui, le prédicateur islamiste Safwat Hegazy, deux anciens ministres de M. Morsi et deux anciens membres du Parlement appartenant aux Frères musulmans.
Les peines capitales étaient attendues, étant donné le climat général qui (encourage) les abus contre les accusés, a déclaré un avocat de la défense, Ali Kamal.
Le ministère public ne fournit pas de preuves, mais l'institution judiciaire continue à prononcer des verdicts sévères, a-t-il ajouté.
Tout comme M. Morsi, MM. Badie, Beltagui et Hegazy comparaissent également dans le cadre d'un procès pour des évasions de prisons et des attaques de commissariats durant le soulèvement populaire ayant renversé le président Hosni Moubarak début 2011.
Une nouvelle audience dans ce procès est prévu samedi devant une cour du Caire.
M. Morsi est aussi jugé pour espionnage, en relation notamment avec le mouvement islamiste palestinien Hamas, et pour avoir incité au meurtre de manifestants devant le palais présidentiel en décembre 2012 alors qu'il était à la tête du pays.
L'ex-chef de l'armée, Abdel Fattah al-Sissi, architecte de l'éviction de M. Morsi, a remporté avec 96,9% des voix l'élection présidentielle organisée fin mai et devrait prêter serment dimanche.