Dakar - Trois soldats accusés d'être impliqués dans un coup d'Etat manqué fin décembre 2014 en Gambie ont été condamnés à mort, et trois à la prison à vie après leur procès tenu en secret devant un tribunal militaire, selon Amnesty International et des militaires gambiens jeudi.
Annoncés par Amnesty dans un communiqué diffusé par son bureau pour l'Afrique de l'Ouest et du Centre, basé à Dakar, le procès et les condamnations ont été confirmés à l'AFP par des militaires à Banjul joints jeudi soir.
Un tribunal militaire a condamné trois soldats à mort et trois autres à la réclusion à perpétuité à l'issue d'un procès ayant eu lieu lundi 30 mars, a affirmé Amnesty. Le procès s'est déroulé en secret, les médias et des observateurs indépendants se sont vu interdire d'y assister.
Les militaires joints, ayant tous requis l'anonymat, ont confirmé les six condamnations qui, selon l'un d'eux, ont été prononcées lundi matin (30 mars) lors d'une audience placée sous forte surveillance sécuritaire.
Parmi les accusés, figuraient Modou Njie, Saikou Jarju et Lamin Sanneh, qui ont écopé de la peine de mort. Trois autres, Abdoulie Jobe, Amadu Sow et Buba Bojang, ont été condamnés à la prison à vie, a précisé la même source.
Modou Njie, blessé lors du coup d'Etat manqué de fin décembre 2013, ne semblait pas avoir complètement recouvré la santé, a-t-elle indiqué, sans plus de détails.
Un proche d'un des condamnés à mort a indiqué à l'AFP que sa famille n'a pas été autorisé à le voir depuis le 30 mars.
Amnesty a indiqué que d'après ses informations, il est possible que les soldats aient été déclarés coupables de trahison, de conspiration, de mutinerie et d'aide à l'ennemi.
A Banjul, le palais présidentiel a été attaqué le 30 décembre 2014 par des hommes armés, en l'absence du chef de l'Etat Yahya Jammeh, alors en séjour privé à l'étranger.
Les autorités gambiennes ont annoncé avoir identifié une quinzaine de participants à l'attaque, dont certains ont été tués durant les combats.
M. Jammeh, qui dirige la Gambie d'une main de fer depuis le coup d'Etat qui l'a porté au pouvoir en 1994, a déclaré vouloir faire un exemple, promettant de se débarrasser des meneurs de l'attaque un par un, jusqu'au dernier.
Selon Amnesty, en janvier, au moins 30 proches des suspects identifiés ont été incarcérés sans inculpation et privés de la possibilité de s'entretenir avec des avocats et avec leur famille. Beaucoup ont été remis en liberté depuis lors, mais un certain nombre sont toujours détenus au secret trois mois plus tard.
L'ONG demande que les condamnations à mort soient commuées en peines d'emprisonnement, en attendant l'ouverture d'un nouveau procès respectant les normes internationales d'équité en la matière sans que la peine de mort ne puisse être requise.
Le système gambien de justice présente de graves déficiences et l'équité de ce procès nous inspire des doutes, étant donné qu'il s'est tenu en secret, a déclaré Stephen Cockburn, un responsable adjoint du bureau régional d'Amnesty à Dakar.
Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme est profondément préoccupé par ces condamnations en Gambie, à l'issue d'un procès tenu en secret qui jette par ailleurs des doutes sur le respect des droits de la défense, selon porte-parole, Rupert Colville.
Nous espérons que les six détenus seront autorisés à faire appel, comme c'est leur droit, et nous appelons le gouvernement gambien à maintenir son moratoire sur l'application de la peine de mort, a déclaré M. Colville à Genève.
Neuf prisonniers, dont deux Sénégalais, qui étaient dans le couloir de la mort en Gambie y ont été exécutés en août 2012.