Karachi - Des responsables pakistanais tentaient lundi soir d'empêcher la pendaison mardi de Shafqat Hussain, un condamné à mort devenu le symbole de l'opposition à la reprise des exécutions au Pakistan, pour un meurtre commis à l'adolescence, selon ses avocats, et au terme d'un procès ne respectant pas les normes internationales d'après l'ONU.
Au lendemain du raid des talibans contre une école de Peshawar (nord-ouest) qui avait fait 154 morts en décembre, le Pakistan avait repris les exécutions de condamnés à mort, y compris de ceux n'ayant aucun lien avec des mouvements considérés comme terroristes.
L'ONU, l'Union européenne et des organisations de défense des droits de l'Homme ont fustigé cette nouvelle politique, ce qui n'a pas empêché le gouvernement de faire pendre environ 180 condamnés à mort parmi les 8.000 qui croupissent dans les geôles du Pakistan
Devant la fronde, les autorités avaient toutefois reporté l'exécution du jeune Shafqat Hussain, condamné pour le meurtre d'un enfant en 2004, afin d'enquêter sur son âge réel au moment des faits.
Des documents de justice suggéraient qu'il était alors mineur et donc qu'il ne pouvait être pendu, la loi et les traités internationaux ratifiés par le Pakistan lui interdisant l'exécution de personnes reconnues coupables de crimes avant leurs 18 ans.
Selon son certificat de naissance présenté par ses avocats, Shafqat Hussain, qui plaide son innocence, était un adolescent au moment des faits qui lui sont reprochés. Aussi, d'après un groupe d'experts de l'ONU, son procès ne respectait pas les normes internationales.
Mais ces éléments n'ont pas convaincu les autorités. Et après de nombreux sursis, l'exécution de Shafqat Hussain est désormais prévue pour mardi matin, a indiqué à l'AFP un responsable de la prison centrale de Karachi (sud), où il est écroué depuis une décennie.
Mais tard dans la soirée de lundi, le président de la région extrêmement stratégique du Cachemire, dont Shafqat Hussain est originaire et qui avait émis son certificat de naissance, a écrit au président pakistanais Mamnoon Hussain pour lui demander de surseoir à cette exécution pour des motifs humanitaires, d'après le texte obtenu par l'AFP.
Dans cette requête à caractère exceptionnel, le président du Cachemire pakistanais, Sardar Muhammad Yaqoob Khan, s'est engagé à faire procéder à une enquête sur l'âge de Shafqat Hussain, un sujet crucial sur lequel le Bureau fédéral des enquêtes n'a pas juridiction, a-t-il plaidé.
Simultanément, la province du Sind, dont Karachi est la capitale et où Shafqat Hussain est emprisonné, a recommandé au gouvernement central de surseoir à l'exécution, a indiqué un responsable local à l'AFP.
Il est absolument honteux que le Pakistan maintienne l'exécution de Shafqat qui était mineur lorsqu'il a été condamné après des jours de tortures policières. Quand le gouvernement pakistanais écoutera-t-il les voix, à l'international et dans le pays, qui appellent en choeur à un sursis ?, s'est par ailleurs indignée lundi l'organisation britannique Reprieve.
En juin, un Pakistanais confronté à une situation similaire, Aftab Bahadur Masih, avait été pendu dans une prison de Lahore, la deuxième ville du Pakistan, pour un meurtre confessé sous la torture et alors qu'il était mineur, selon ses défenseurs.