26 février 2016 – Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC), Marzuki Darusman, a appelé vendredi les autorités russes à ne pas appliquer le traité d'extradition signé début février 2016 entre ce pays et la RPDC.
Environ 10.000 ressortissants nord-coréens se trouvent actuellement en Russie suite à l'obtention d'un visa de travail, a estimé M. Darusman, précisant que certains d'entre eux ont décidé de rester dans le pays après l'expiration de leur visa, dans le but de demander l'asile. L'expert de l'ONU a également indiqué qu'un certain nombre de Nord-Coréens fuient régulièrement la RPDC et tentent d'atteindre la Russie en traversant d'autres pays.
« Je suis alarmé par la signature du nouveau traité d'extradition entre la République populaire démocratique de Corée et la Fédération de Russie, le 2 février 2016. Ce traité appelle à transférer et réadmettre des personnes ayant 'quitté illégalement leur pays' et étant 'restées illégalement' dans un autre territoire », a déclaré le Rapporteur spécial des Nations Unies.
Craignant que cet accord puisse conduire au rapatriement forcé vers la RPDC d'individus dont les droits de l'homme risquent d'être bafoués à leur retour, M. Darusman a averti que de tels agissements constitueraient une violation par la Russie de ses obligations internationales.
« Compte tenu de la pratique de la RPDC consistant à envoyer des travailleurs en Russie, où ils travaillent souvent dans des conditions d'esclavage, il est à craindre qu'un tel traité puisse également être utilisé pour capturer et rapatrier les travailleurs qui tentent de demander l'asile », s'est inquiété l'expert, ajoutant que le simple envoi de travailleurs à l'étranger pour y être exploités peut être considéré comme de l'esclavage cautionné par un État, qui est potentiellement une catégorie à part de crime contre l'humanité.
« Au moment même où l'envoi de ces travailleurs est en train de devenir un grave sujet de préoccupation, la signature d'un tel accord amplifie la crainte de la communauté internationale », a insisté M. Darusman.
Dans son rapport 2014, la Commission d'enquête de l'ONU sur les droits de l'homme en RPDC a constaté que les personnes qui sont rapatriées de force dans le pays sont fréquemment victimes de torture, détention arbitraire, exécutions sommaires, avortements forcés et autres violences sexuelles, a rappelé le Rapporteur spécial, précisant que le rapport invite les pays à respecter le principe de non-refoulement et à s'abstenir de rapatrier de force des personnes en RPDC.
« Je note également que la signature du traité a eu lieu alors que la RPDC continue de commettre des actes de guerre délibérés, comme des essais nucléaires, suivis par le lancement récent de missiles », a indiqué M. Darusman, déclarant que de tels actes ont un impact négatif sur les efforts pour faire face aux violations persistantes et flagrantes des droits humains dans le pays.