8 avril 2016 – Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) a appelé vendredi le Bangladesh à instaurer un moratoire sur l'utilisation de la peine de mort, en particulier lorsque des doutes existent quant à la régularité des procès, comme lors des récentes condamnations à mort prononcées par le 'Tribunal international des crimes du Bangladesh'.
« Nous sommes préoccupés par les dernières condamnations à mort prononcées contre deux hommes par le 'Tribunal international des crimes du Bangladesh', en particulier compte tenu de la persistance de doutes quant à la régularité de la procédure judiciaire au regard des normes internationales sur l'équité des procès », a précisé une porte-parole du HCDH, Ravina Shamdasani, lors d'un point de presse à Genève.
Selon la porte-parole du HCDH, le chef du parti d'opposition Jamaat-e-Islami, Motiur Rahman Nizami, a récemment été condamné à mort pour avoir planifié, ordonné et commis des meurtres et des viols, entre autres crimes graves, au cours de la guerre d'indépendance de 1971. Mme Shamdasani a précisé que M. Nizami, qui a fait plusieurs fois appel de cette condamnation, sera entendu pour la dernière fois le 10 avril prochain.
« C'est le dernier recours dont il dispose dans le cadre de sa procédure d'appel contre son exécution, à l'exception d'une demande de grâce présidentielle, et nous espérons qu'il sera examiné sérieusement », a déclaré la porte-parole.
Le 8 mars dernier, la Cour suprême du pays a également confirmé la condamnation à mort d'un autre leader du Jamaat-e-Islami, Mir Quasem Ali, qui avait été condamné en novembre 2014 par ce même 'Tribunal international des crimes du Bangladesh', qui a été créé en 2010 par le gouvernement, a précisé Mme Shamdasani.
« Depuis sa création en 2010, le Tribunal a rendu au moins 17 verdicts, dont la majorité ont donné lieu à des condamnations à mort », a-t-elle indiqué, précisant que jusqu'à présent, quatre hommes ont été exécutés.
L'ONU s'oppose à l'utilisation de la peine de mort en toutes circonstances, peu importe la gravité du crime commis et même si les normes les plus strictes en matière de procès équitable ont été respectées, a rappelé la porte-parole.
Tout en reconnaissant la volonté du Bangladesh de lutter contre les crimes du passé, Mme Shamdasani s'est dite préoccupée par le fait que plusieurs experts indépendants de l'ONU ont émis des doutes quant à la régularité des pratiques du Tribunal, notamment le manque d'accès à une assistance juridique et la primauté accordée à l'accusation , au détriment de la défense.
« Nous renouvelons notre appel au gouvernement du Bangladesh à respecter ses obligations en vertu du PIDCP [Pacte international relatif aux droits civils et politiques], auquel il a adhéré en 2000. L'article 14 du PIDCP affirme le droit à un procès équitable. Imposer la peine de mort à l'issue d'un procès n'ayant pas respecté ces dispositions constitue une violation du droit à la vie », a déclaré la porte-parole, appelant également les autorités du pays à mettre un terme à toutes les exécutions et à instaurer un moratoire sur l'utilisation de la peine de mort.