Les trois Palestiniens condamnés pour avoir assassiné un commandant militaire du Hamas, pour le compte d'Israël selon le mouvement islamiste, ont été exécutés jeudi à Gaza, au grand dam des défenseurs des droits de l'Homme qui dénoncent un processus judiciaire expéditif.
Alors que des centaines de personnes se pressaient aux abords du complexe sécuritaire, les trois hommes ont été exécutés, l'un après l'autre sous le regard d'environ 2.500 personnes autorisées à assister à la mise à exécution d'un verdict prononcé en quelques jours. Plusieurs dirigeants du Hamas étaient présents.
L'ensemble des rues environnantes avaient été fermées au trafic routier et de nombreux policiers étaient déployés pour laisser passer les fourgons pénitentiaires, à bord desquels les trois hommes, vêtus de l'uniforme rouge des condamnés à mort, ont été amenés séparément au milieu d'une foule qui appelait à les exécuter.
En fin d'après-midi, Achraf Abou Leïla, 38 ans, condamné pour "assassinat" par la justice militaire à Gaza, a été pendu. De même que Hicham al-Aloul, 42 ans, condamné pour avoir "collaboré avec l'ennemi sioniste, être intervenu dans l'assassinat" du commandant militaire et "avoir causé la mort de nombreux résistants".
"J'ai fait une erreur et je m'excuse auprès du peuple palestinien et de ma famille", a-t-il lancé, avant de rejoindre la potence.
A quelques mètres de là, Hanane al-Dahdouh, 75 ans, la mère d'un combattant du Jihad islamique tué par Israël grâce aux renseignements fournis par M. Aloul selon la justice militaire, assistait parmi la foule aux exécutions. "Mort aux collaborateurs, la résistance vaincra!", a-t-elle lancé.
Le troisième homme, Abdallah al-Nachar, 38 ans, a été "fusillé" parce qu'il était "un officier de la garde présidentielle" de Mahmoud Abbas, le président palestinien basé en Cisjordanie occupée et à couteaux tirés avec le Hamas.
Au terme de quatre jours d'audience et après la diffusion publique d'"aveux" très probablement obtenus sous la coercition selon les défenseurs des droits de l'Homme, les trois hommes ont été condamnés dimanche à la peine capitale.
- Précédent 'dangereux' -
Aussitôt, l'ONG des droits de l'Homme Amnesty International (AI) avait appelé le Hamas à "arrêter de toute urgence ces exécutions prononcées lors d'un procès injuste". Magdalena Mughrabi, vice-directrice d'AI pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, a dénoncé "une violation consternante des droits humains".
De son côté, une coalition d'ONG palestiniennes des droits de l'Homme a dénoncé "des verdicts rendus dans la précipitation sans les garanties d'un procès équitable", redoutant "un précédent dangereux".
L'ONG Human Rights Watch (HRW) a de son côté estimé que la peine de mort était "toujours erronée quelles que soient les circonstances".
Malgré ces critiques, l'exécution des trois hommes a peu surpris dans la petite enclave tenue depuis 10 ans sans partage par le Hamas, alors que dès l'annonce de l'arrestation du principal suspect Abou Leïla, le chef du Hamas Ismaïl Haniyeh avait promis que le "meurtrier sera châtié".
Le 24 mars, Mazen Faqha, commandant de la branche armée du Hamas, a été abattu de plusieurs balles tirées à bout portant à l'aide d'un pistolet muni d'un silencieux. Les dirigeants du Hamas ont ensuite multiplié les accusations contre Israël dont "l'empreinte" était évidente, selon eux, vu la minutie avec laquelle cette élimination a été organisée.
Pour arrêter le ou les auteurs du meurtre de Mazen Faqha, le Hamas était allé, fait exceptionnel, jusqu'à fermer l'unique point de passage vers Israël, visiblement pour éviter toute exfiltration de ce territoire soumis à un sévère blocus aérien, terrestre et maritime d'Israël.
Le mouvement islamiste qui, aux côtés d'autres groupes armés, a mené trois guerres contre l'armée israélienne, s'est également livré à un vaste coup de filet et arrêté 45 Palestiniens accusés de collaboration avec Israël.
Le 6 avril, deux semaines après l'assassinat du commandant militaire, le Hamas avait fait un exemple en pendant trois hommes accusés de faits de "collaboration" avec Israël antérieurs à la mort de Mazen Faqha et sans lien direct avec elle.
De nouveau, jeudi, le ministère de l'Intérieur à Gaza a affirmé envoyer un message aux "collaborateurs": "ils n'ont que deux choix, se rendre ou faire face à leur destin".
Selon le Centre Palestinien des droits de l'Homme, l'ONG qui fait autorité sur la question de la peine de mort dans les Territoires palestiniens occupés, le Hamas a, depuis sa prise du pouvoir à Gaza en 2007, procédé à 25 exécutions et condamné 111 personnes à la peine capitale.