En cette Journée mondiale contre la peine de mort, nous réaffirmons notre engagement en faveur de l'abolition universelle de ce châtiment.
Il est positif d'observer, depuis quelques décennies, une tendance mondiale à abolir la peine capitale et à limiter son application. Sur les 193 États membres de l'ONU, seuls 36 pays, soit un peu moins d'un cinquième, l'appliquent encore effectivement. Alors que la peine de mort était courante dans les années 1980, elle fait figure d'exception aujourd'hui. Ce châtiment cruel est quasiment banni d'Europe, à une exception près. Il est grand temps que le Bélarus mette lui aussi un terme aux exécutions, de sorte que l'Europe en soit complètement et définitivement débarrassée.
Nous constatons cependant avec inquiétude que certains pays envisagent sérieusement de rétablir la peine capitale et que dans d'autres, les exécutions ont repris après des années de moratoire, ce qui s'inscrit à contre-courant de la tendance mondiale et contrevient partiellement au droit international. Nous appelons donc tous les États à honorer leurs obligations internationales et à respecter l'esprit du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui prévoit l'abolition progressive de la peine de mort.
Au niveau mondial, de nombreuses personnes vivent encore dans des pays où la peine de mort représente une menace. Elles sont exposées au risque d'être condamnées à mort et exécutées de façon arbitraire, voire à tort. Or, la peine de mort frappe souvent les personnes pauvres car celles-ci n'ont pas les moyens de se défendre efficacement contre des accusations. En cette journée mondiale consacrée au thème « Pauvreté et justice : un duo mortel », nous attirons l'attention sur cette injustice. Les membres de minorités ethniques, religieuses ou sexuelles sont également plus souvent victimes de la peine de mort. Par des résolutions que nous venons d'adopter au sein du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, nous appelons tous les États qui n'ont pas encore aboli la peine de mort à supprimer toute discrimination et toute inégalité de traitement impliquées par cette peine et à ne jamais prononcer cette peine contre des personnes mineures au moment des faits, des personnes avec un handicap mental et des femmes enceintes.
Qu'elle soit utilisée de façon discriminatoire ou non, qu'elle frappe des innocents ou non, qu'elle serve à éliminer des adversaires politiques ou non, la peine capitale est incompatible avec notre conception des droits de l'homme. Nos législations nationales l'interdisent, et nous nous sommes engagés à l'échelon international à ne plus jamais la prononcer ni l'appliquer, en ratifiant des protocoles additionnels à la Convention européenne des droits de l'homme et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Un total de 85 États ont pris la même voie et se sont engagés pour l'abolition de la peine de mort en ratifiant le deuxième protocole additionnel au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
À ceux qui pensent que la peine de mort représente un moyen de lutter contre la violence, le crime et le terrorisme, nous répondons ceci : des études scientifiques prouvent qu'elle ne dissuade ni les criminels, ni les terroristes. Au lieu de prévenir la violence, la peine capitale ne fait que l'accroître. Si elle peut satisfaire un désir de vengeance, elle n'apporte aucune réparation aux victimes de crimes et à leurs proches. La peine de mort aggrave donc les problèmes au lieu de les résoudre.
Nous nous engageons pour la protection de la dignité humaine et des droits de l'homme, et ce non seulement dans nos pays ou en Europe, mais dans le monde entier. À nos yeux, la peine de mort représente de manière exemplaire les innombrables violations des droits de l'homme dans le monde d'aujourd'hui. Elle n'a plus sa place au XXIe siècle.
Nous allons nous investir pour l'abolir et limiter son application en dialoguant avec les États concernés. Un moratoire universel représenterait une étape importante sur cette voie. Nous continuerons aussi à aborder la question de la peine de mort dans les enceintes multilatérales et à nous engager en faveur de son abolition par des initiatives mondiales et régionales. Nous reconnaissons et soutenons les efforts des femmes et des hommes de la société civile, du monde politique, des instances judiciaires, des milieux scientifiques et culturels dans le monde entier. Ensemble, engageons-nous pour un monde sans peine de mort.
(Les ministres des affaires étrangères d'Allemagne, d'Autriche, du Liechtenstein, du Luxembourg, de Slovénie et de Suisse.)