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Rapport d'activités d'intersession (mai - octobre 2018) (extrait)

rapport du 24 octobre 2018 - Commission africaine des droits de l'homme et des peuples
Noura Hussein Hamad Uyapo Poloko
63ème SESSION ORDINAIRE DE LA COMMISSION AFRICAINE DES DROITS DE L'HOMME ET DES PEUPLES

RAPPORT D'ACTIVITÉS D'INTERSESSION (mai - octobre 2018)

Présenté par LA COMMISSAIRE KAYITESI ZAINABO SYLVIE

BANJUL, GAMBIE

24 octobre – 13 novembre 2018


INTRODUCTION

1. Le présent Rapport est préparé conformément aux Articles 23(3) et 72 du Règlement intérieur de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission). Il couvre les activités menées pendant la période d'intersession, de mai à octobre 2018. 


2. Le rapport est divisé en trois parties : la Partie I couvre les activités menées en ma qualité de Commissaire et de Présidente du Groupe de travail sur la peine de mort et les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires en Afrique, la Partie II présente la situation de la peine de mort et des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires en Afrique et la Partie III qui conclut en formulant un ensemble de recommandations. 


[…]

D. Activités du Groupe de travail

a. Atelier sur la Peine de mort

7. Le Groupe de travail, représenté par Mme Alice Mogwe, a participé à un atelier d'une journée sur la peine de mort, organisé par la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (CAfDHP) et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme (HCDH), le 15 septembre 2018 à Arusha, Tanzanie. 


8. L'atelier a donné lieu à une réflexion sur les questions suivantes liées à la peine de mort : le statut de la peine de mort en vertu du droit international en matière des droits de la personne ; les Systèmes régionaux : la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples et la peine de mort en Afrique, le Système interaméricain des droits de l'homme et la peine de mort et le Système européen des droits de l'homme et la peine de mort ; l'abolition ou la limitation de l'application de la peine de mort – le rôle des tribunaux ; le droit à un procès équitable et le droit de solliciter une grâce ou une commutation et la peine de mort dans la pratique : les conditions de détention des personnes dans le couloir de la mort et les méthodes d'exécution. L'atelier a publié un Communiqué final présentant les recommandations de l'atelier. 


[…]

F. Lettre d'Appel urgent

11. En ma qualité de Présidente du Groupe de travail sur la peine de mort et les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires en Afrique, j'ai envoyé une Lettre d'Appel urgent au Président de la République du Soudan, le 11 mai 2018, concernant l'exécution possible d'une jeune femme soudanaise âgée de 19 ans, Noura Husein, pour avoir tué son mari qui l'avait violée. La lettre d'Appel urgent exhorte le Soudan à surseoir à son exécution, à enquêter sur l'allégation et à donner des précisions à la Commission tout en se conformant à ses obligations en vertu de la Charte africaine et d'autres instruments régionaux et internationaux des droits de l'homme auxquels le Soudan est parti.

12. Le 11 octobre 2018, une Lettre d'Appel urgent a été transmise au Président de la République du Botswana concernant l'exécution de M. Uyapo Polok en exprimant la préoccupation de la Commission sur cette affaire et en exhortant le Botswana notamment de surseoir à l'exécution de détenus dans le couloir de la mort, d'observer un moratoire sur l'application de la peine de mort, en conformité avec la Résolution CADHP/Res.136 (XXXXIV) de la Commission et à se conformer à ses obligations en vertu de la Charte africaine et d'autres instruments régionaux et internationaux des droits de l'homme auxquels le Botswana est partie.

G. Lettres de félicitations

13. En qualité de Présidente du groupe de travail sur la peine de mort et les exécutions extrajudiciaire, sommaires ou arbitraires en Afrique, une lettre de félicitations a été envoyée à S.E. M. Roch Marc Christian Kaboré, Président du Burkina Faso, le 8 juin 2018, à l'occasion de l'abolition de la peine de mort au Burkina Faso. J'ai également envoyé une lettre de félicitations à S. E. M. Adama Barrow, Président de la République de Gambie, le 11 octobre 2018, pour la ratification par la Gambie, le 28 septembre 2018, du Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort. A cette occasion, le gouvernement a été rappeler d'abroger toutes les lois relatives à la peine de mort contenues dans la Constitution de la Gambie et le Code pénal.


Partie II. Situation de la peine de mort et des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires en Afrique

La peine de mort

14. Le Groupe de travail prend notes avec satisfaction de certains développements positifs en Afrique concernant l'abolition de la peine de mort. En octobre 2018, quarante-trois (43) États parties à la Charte africaine ont aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Vingt-et-un (21) en ont abandonné la pratique par la promulgation d'une législation nationale, 1 dont douze (12) ont également ratifié le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au PIRDCP sur l'abolition de la peine de mort.2 Vingt-deux (22) États parties n'ont pas pratiqué d'exécution depuis dix ans.3

15. Le Groupe de travail salue également d'autres développements positifs réalisés sur le continent durant la période considérée par le rapport, tels que : l'abolition de la peine de mort par le Parlement du Burkina Faso en juin 2018 et la ratification par la Gambie du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à l'abolition de la peine de mort en septembre 2018. Le Groupe de travail saisit cette occasion pour exprimer sa gratitude aux Présidents du Burkina Faso et de la République de Gambie pour ces importantes mesures positives dans le sens de l'abolition de la peine de mort en Afrique.

16. Le Groupe de travail note la tenue du premier colloque national sur l'abolition de la peine de mort au Niger, organisé par la Commission nationale des droits de l'homme du Niger en partenariat avec des organisations de la société civile4

17. Il est à souhaiter que des positionnements et actions d'une telle importance donneront le ton à des débats nationaux constructifs et favorables à l'abolition de la peine de mort au Niger.

18. Le Groupe de travail prend note en outre de la commutation de la condamnation à mort de la jeune Noura Hussein, âgée de 19 ans en peine de prison de cinq ans. Il encourage le Soudan a multiplié ces actions positives, en commuant les peines de mort, en peine à perpétuité pour d'autres condamnes a mort.

19. Malgré ces développements positifs, l'Afrique continue à être aux prises avec l'application de la peine de mort. En mai 2018, le Botswana a procédé à sa seconde exécution dans l'année en pendant M. Uyapo Poloko, âgé de 37 ans, et la Somalie a fait passer au peloton d'exécution, le premier anniversaire de ces attentats, l'homme accusé d'avoir orchestré les attentats à la bombe d'octobre 2017. À nouveau, en octobre 2018, la Cour pénale de Kassala, au Soudan, a déclaré un « muezzin » âgé de 60 ans coupable du viol d'une fillette de cinq ans et l'a condamné à mort par pendaison.5 Selon des rapports parvenus à la Commission, en septembre 2018, des juridictions égyptiennes ont confirmé les peines de mort de plus de 75 détenus déclarés coupables6 qui doivent désormais être exécutés au moment opportun tandis qu'en octobre, la Cour militaire a condamné à mort 17 personnes qui aurait commis des attentats à la bombe contre des églises en 2016 et en 2017.7

20. Le Groupe de travail souhaite réitérer que la situation dans les États susvisés continue à être inquiétante en dépit des nombreux appels de la Commission africaine et de la communauté internationale à la cessation de l'application de la peine de mort et des exécutions. Ces actes présumés sont en violation du droit à la vie et à la dignité qui sont fondamentaux, alors que les peines alternatives tel que l'emprisonnement à la vie sont dans les textes notamment et ont l'effet de persuasion. 


[…]

Partie III. Conclusion et recommandations

24. Le Groupe de travail a observé une récente évolution positive sur le continent en faveur de l'abolition de la peine de mort pendant la période visée par le rapport et il continuera à œuvrer avec ses parties prenantes au maintien du plaidoyer pour l'abolition de la peine de mort.

25.Malgré les gains enregistrés à ce jour, le Groupe de travail est également conscient des défis encore posés à la protection de droit à la vie en Afrique, en particulier dans les États parties appliquant toujours la peine de mort ou dans les cas de morts consécutives à la brutalité de la police, à des homicides, à des conflits armés et/ou au terrorisme.

26. Au vu de cette analyse de la situation de la peine de mort et des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires en Afrique, le Groupe de travail souhaite formuler les recommandations suivantes aux différentes parties prenantes :

Aux États parties :

- Exhorter les Gouvernements du Botswana, de l'Égypte, de la Somalie et du Soudan à observer un moratoire sur l'abolition de la peine de mort, suspendre l'exécution de prisonniers dans le couloir de la mort et commuer leur peine en emprisonnement à vie ;

- Appeler la République Centrafricaine, le Cameroun et le Mali à entreprendre des enquêtes indépendantes sur ces exécutions présumées, à poursuivre les auteurs et à prendre des mesures concrètes pour trouver une solution durable aux causes sous-jacentes des différentes crises dans leurs États respectifs. 


-  Appeler les États parties à la Charte africaine à adopter toute mesure de précaution raisonnable pour protéger la vie et empêcher l'utilisation excessive de la force par ses agents de sécurité, de leur donner la formation appropriés et si possible, assurer la planification rigoureuse des différentes opérations ; 


-  Continuer à collaborer au niveau national, régional et international dans la lutte contre la résurgence du terrorisme dans la plupart des pays africains, en particulier en Afrique de l'Ouest, Centrale et du Nord ; 


-  Renforcer au niveau national le cadre juridique protégeant le droit à la vie et à la dignité en soutenant l'adoption du projet de Protocole à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatif à l'abolition de la peine de mort en Afrique à tous les niveaux des processus internes de l'UA.

Aux organisations de la société civile : 


-  Poursuivre le plaidoyer et l'action au niveau national en faveur de l'abolition formelle de la peine de mort, collaborer et soutenir des efforts de plaidoyer similaires au niveau sous régional et continental. 


Aux autres partenaires : 


-  Soutenir le Groupe de travail pour lui permettre de s'acquitter effectivement de son mandat. 



_____________

1 L'Afrique du Sud, l'Angola, le Bénin, le Burkina Faso, le Burundi, le Cabo Verde, la (République du) Congo, la Côte d'Ivoire, Djibouti, le Gabon, la Guinée-Bissau, Madagascar, Maurice, le Mozambique, la Namibie, le Rwanda, Sao Tomé et Principe, le Sénégal, les Seychelles et le Togo.


2 Outre ces États parties abolitionnistes, la Gambie et le Liberia ont ratifié le Deuxième Protocole facultatif mais n'ont pas encore aboli la peine de mort dans leur législation national. L'Angola et Sao Tomé et Principe ont signé le Protocole mais ne l'ont pas ratifié.

3 L'Algérie, le Cameroun, les Comores, l'Érythrée, le Ghana, le Kenya, le Lesotho, le Liberia, le Malawi, le Mali, la Mauritanie, le Niger, la République arabe sahraouie démocratique, la République Centrafricaine, la République démocratique du Congo, la Sierra Leone, le Swaziland, la Tanzanie, la Tunisie, la Zambie et le Zimbabwe.


4 http://www.worldcoalition.org/Latest-news.html

5 Comme 4 ci-dessus


6 https://www.aljazeera.com/news/2018/09/kerdasa-trial-court-upholds-death-sentences-20-egyptians-180924121408958.html

7 https://www.aljazeera.com/news/2018/10/egypt-military-court-sentences-17-death-church-bombings-181011133541831.html.
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