(Associated Press) La ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, s'est dite très préoccupée par la condamnation à mort d'un autre citoyen canadien en Chine, mais n'a pas voulu y voir un signe d'escalade dans sa querelle avec ce pays.
Un tribunal du sud de la Chine a annoncé mardi les peines d'au moins six étrangers impliqués dans une opération internationale de production de méthamphétamine. Parmi eux, un Canadien identifié comme étant « Fan Wei » a été condamné à mort.
À son arrivée à la rencontre hebdomadaire du conseil des ministres, mardi matin, Mme Freeland a rappelé que le Canada s'oppose en toutes circonstances à la peine de mort, « une punition cruelle et inhumaine ».
« Nous sommes évidemment particulièrement préoccupés lorsque pareille sentence est appliquée à des Canadiens », a déclaré la ministre Freeland. Elle n'a pas voulu dire si elle voit un lien entre cette condamnation et le différend qui oppose Ottawa et Pékin depuis cinq mois.
La ministre de l'Agriculture s'est montrée un peu plus candide que sa collègue Freeland. « C'est difficile de faire des relations directes, mais les circonstances font que c'est considéré dans toutes nos analyses », a admis Marie-Claude Bibeau.
Plus tard dans la journée, à la sortie des Communes, la ministre Freeland a précisé sa pensée.
« La Chine utilise la peine de mort et cette cause impliquait un plus grand groupe d'individus », a-t-elle tenu à souligner. Puis, elle a parlé de deux autres Canadiens.
« La chose la plus difficile, ce sont les détentions arbitraires et injustes des Canadiens Michael Kovrig et Michael Spavor. Pour moi, c'est la chose la plus importante. C'est la chose la plus grave », a-t-elle insisté.
Des déclarations qui laissent entendre que la ministre met le cas de Fan Wei dans une catégorie à part.
Les relations sino-canadiennes se sont détériorées depuis l'arrestation par le Canada d'une dirigeante de Huawei, à la demande des États-Unis, en décembre dernier. Depuis lors, la Chine multiplie les gestes de représailles.
Pendant que Meng Wanzhou, directrice financière de la société Huawei, attend à Vancouver que se décide son extradition vers les États-Unis, MM. Kovrig et Spavor sont détenus sur la base de vagues allégations de sécurité nationale et Fan Wei devient le second Canadien, après Robert Lloyd Schellenberg, à être condamné à mort par les autorités chinoises.
La querelle du canola
Pékin a également suspendu certaines exportations canadiennes, dont le canola, en représailles apparentes.
La ministre de l'Agriculture se bute au refus des Chinois de recevoir une délégation canadienne pour discuter du canola.
« Pour le moment, on poursuit les discussions sous forme de vidéoconférence. Nous sommes prêts à aller en Chine, à avoir cette discussion-là en personne, de scientifiques à scientifiques », a soutenu Mme Bibeau.
Les autorités chinoises allèguent que le canola canadien serait infesté par un « quelconque insecte ».
La ministre Bibeau a confirmé qu'une aide gouvernementale sera annoncée cette semaine pour venir en aide aux producteurs canadiens de canola, pris dans ce tir croisé.
Aux Communes, l'opposition conservatrice s'en est prise au gouvernement libéral qui n'en fait pas assez, selon elle, pour protéger les producteurs de canola de la colère chinoise.
Le chef conservateur Andrew Scheer a, de nouveau, réclamé que le gouvernement canadien punisse la Chine en annulant sa participation financière à la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures de la Chine. Le Canada s'est engagé à y verser 256 millions de dollars sur 5 ans.
Le premier ministre Justin Trudeau lui a répondu que cette banque sert à des projets d'infrastructures vertes partout en Asie, y compris dans des pays très pauvres. Pas question, donc, d'en retirer ses fonds.
Le cas de Fan Wei
Le tribunal populaire intermédiaire de Jiangmen, dans la province méridionale du Guangdong, a condamné 11 personnes qui ont produit plus de 63 kilogrammes de méthamphétamine, une drogue illégale.
Parmi eux se trouvaient un Américain et quatre Mexicains, qui ont tous été condamnés à une peine d'emprisonnement à perpétuité ou à une peine de mort avec sursis d'une durée de deux ans. La déclaration du tribunal n'indiquait pas clairement quelle personne avait été condamnée à quelle peine et ne donnait pas de nom complet.
Le Canadien condamné à mort a été identifié comme étant Fan Wei, mais il n'a pas été déterminé s'il s'agissait de son nom légal. Une personne identifiée comme étant Wu Ziping, dont la nationalité n'a pas été précisée, a également été condamnée à mort.
Selon le tribunal, Fan Wei et Wu Ziping ont comploté pour fabriquer et vendre les drogues en 2012 et ont invité les autres - décrits comme des « techniciens en fabrication de drogues » - à bord. Selon la cour, le groupe a créé un « repaire » dans la ville de Taishan, dans le Guangdong, où il a produit et vendu plus de 63 kilogrammes de méthamphétamine et 365,9 grammes de méthylamphétamine.