L'Iran a convoqué lundi l'ambassadeur allemand à Téhéran, Hans-Udo Muzel, pour protester contre des tweets condamnant l'exécution d'un lutteur iranien, Navid Afkari, condamné pour meurtre lors de manifestations antigouvernementales en 2018, a annoncé le ministère des Affaires étrangères iranien. Le ministère a « fermement condamné » devant l'ambassadeur les tweets publiés sur le compte de l'ambassade et jugés comme une « interférence dans les affaires internes » de l'Iran, selon un communiqué.
L'Iran a annoncé samedi avoir exécuté Navid Afkari, 27 ans, condamné à mort en vertu du « qesas » (la « loi du talion ») pour le meurtre d'un fonctionnaire poignardé le 2 août 2018 lors de manifestations contre le gouvernement à Chiraz (Sud). Le verdict, annoncé début septembre, avait fait polémique et les soutiens avaient afflué en Iran comme à l'étranger après la publication d'informations affirmant que Navid Afkari avait été condamné sur la base d'aveux extorqués sous la torture. Ces accusations avaient été rejetées par les autorités judiciaires en Iran.
Des « droits juridiques élémentaires ignorés »
L'exécution du lutteur a été largement dénoncée sur les réseaux sociaux et à l'étranger. L'ambassade d'Allemagne à Téhéran a réagi dimanche dans un tweet publié en persan sur son compte officiel : « Nous avons été profondément choqués par l'exécution de Navid Afkari. Il n'est pas acceptable que les droits juridiques élémentaires soient ignorés pour faire taire les voix de l'opposition. »
Le ministère iranien a appelé dans son communiqué l'ambassade allemande à « reconnaître les limites de ses responsabilités diplomatiques et à ne pas les dépasser », ajoutant que « l'interférence dans les lois et procédures judiciaires iraniennes […] n'était en aucun cas tolérable ». Plus tôt lundi, Ali Bagheri, un responsable de la justice iranienne, avait condamné les « interférences de certaines ambassades européennes », les appelant à « ne pas se faire le porte-voix des mensonges comme [le ferait] un groupe d'opposition ».
Un panel d'experts indépendants des droits humains rassemblés par l'ONU a condamné « fermement » l'exécution dans un communiqué publié lundi, appelant la communauté internationale « à réagir » à ces actions. Dans son tweet, l'ambassade d'Allemagne a ajouté que les deux frères de Navid Afkari « sont toujours emprisonnés et ont besoin de solidarité ». L'organisation de défense des droits humains Amnesty International s'était alarmée vendredi de l'« exécution secrète imminente » de Navid Afkari, affirmant que lui et ses deux frères, condamnés à de lourdes peines de prison dans la même affaire, étaient les « dernières victimes du système judiciaire iranien déficient ».
Avec au moins 251 exécutions en 2019, l'Iran est, après la Chine, le pays qui a le plus recours à la peine capitale, selon le dernier rapport mondial sur la peine de mort publié par Amnesty International.