La peine de mort contre un Canadien condamné en Chine pour trafic de drogue, Robert Lloyd Schellenberg, a été confirmée mardi en appel, une décision qui devrait encore aggraver la crise diplomatique entre Pékin et Ottawa.
Ce rebondissement survient au début d'une semaine qui s'annonce très tendue pour les relations bilatérales. La justice chinoise doit en effet annoncer mercredi son verdict dans une autre affaire visant un ressortissant canadien, Michael Spavor, un consultant spécialiste de la Corée du Nord et accusé d'espionnage.
L'arrestation de ce dernier et d'un troisième Canadien, Michael Kovrig, avait provoqué fin 2018 une grave crise diplomatique entre Pékin et Ottawa, dont les relations étaient déjà au plus bas depuis l'interpellation au Canada, sur demande américaine, de Meng Wanzhou, une haute responsable de Huawei.
Pur hasard? La confirmation de la peine de Robert Lloyd Schellenberg intervient alors que Mme Meng est ces jours-ci devant un tribunal canadien pour la dernière série d'audiences consacrées à son éventuelle extradition vers les Etats-Unis. Dans un communiqué publié mardi, le Tribunal populaire supérieur de la province chinoise du Liaoning, à Shenyang (nord-est), la ville où M. Schellenberg était jugé, "a décidé de rejeter l'appel et de confirmer le verdict initial". "Une cour plénière a été constituée" et "a estimé que les faits constatés en première instance étaient clairs, les preuves fiables et suffisantes" et que la peine de mort était donc "appropriée", a-t-il précisé.
"Peine cruelle"
Robert Lloyd Schellenberg s'était vu infliger en janvier 2019 la peine capitale. Le tribunal l'avait accusé d'avoir joué un "rôle clé" dans un trafic de drogue destiné à expédier quelque 222 kilos de méthamphétamine en Australie.
Déjà condamné dans le passé au Canada pour trafic de stupéfiants, il affirmait quant à lui être un simple touriste qui aurait été piégé. Il avait fait appel de la condamnation.
"Nous condamnons le verdict dans les termes les plus forts et appelons la Chine à la clémence vis-à-vis de Robert", a déclaré à la presse Dominic Barton, l'ambassadeur du Canada en Chine. "Nous avons exprimé à plusieurs reprises à la Chine notre ferme opposition à cette peine cruelle et inhumaine et nous continuerons à le faire", a-t-il ajouté.
Le procès en appel était intervenu en mai 2019. Il aura donc fallu plus de deux ans à la justice chinoise pour prononcer son verdict. Elément troublant: le Canadien, arrêté en 2014, avait été condamné en première instance à 15 ans de prison. Mais peu après l'arrestation de Meng Wanzhou, la justice avait subitement estimé le verdict trop "indulgent", avant d'annoncer un nouveau procès ayant conduit à la condamnation à mort.
Secret d'Etat
Âgée de 49 ans et directrice financière du géant des télécoms, Mme Meng a été arrêtée le 1er décembre 2018 à l'aéroport de Vancouver. Les Etats-Unis réclament son extradition pour la juger pour fraude bancaire dans le cadre des sanctions américaines contre l'Iran.
Quelques jours après l'interpellation de Meng Wanzhou, la Chine avait arrêté deux Canadiens: Michael Spavor et Michael Kovrig, un ex-diplomate. Des arrestations vues comme des représailles par le Premier ministre canadien Justin Trudeau, ce que Pékin dément. Les deux hommes ont été jugés pour espionnage au printemps dernier lors de deux procès distincts, tenus à huis clos.
La Chine a réduit en 2015 de 55 à 46 le nombre de crimes passibles de la peine de mort. Ceux-ci comprennent toujours le séparatisme, l'homicide volontaire, le viol et le trafic de drogue, mais excluent désormais le proxénétisme ou la contrebande d'armes. Le nombre de personnes exécutées chaque année dans le pays est un secret d'Etat. L'exécution la plus récente d'un détenteur de passeport occidental serait celle d'Akmal Shaikh, un Britannique exécuté en 2009 pour trafic d'héroïne, selon l'agence de presse officielle Chine nouvelle.