SOIXANTE-DIX-SEPTIÈME SESSION
48E ET 49E SÉANCES PLÉNIÈRES – MATIN & APRÈS-MIDI
La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a continué de se prononcer sur ses projets de résolution, adoptant six textes, dont quatre par consensus. Un vote a été nécessaire pour le texte sur le moratoire sur l'application de la peine de mort ainsi que pour le texte sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, pour lequel un amendement visant à éliminer les références à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre a été rejeté.
Adoptée sous les applaudissements par 126 voix pour, 37 voix contre et 24 abstentions, le projet de résolution relatif au moratoire sur l'application de la peine de mort exprime une profonde inquiétude de voir cette sentence continuer à être appliquée. Il demande aux États de veiller à ce que toute procédure aboutissant à l'imposition de la peine de mort soit conforme aux garanties de procès équitable reconnues à l'échelle internationale. Par ce texte, les États sont également appelés à donner aux personnes condamnées à mort accès à des informations relatives à la méthode d'exécution, en particulier la procédure précise qui sera suivie.
Singapour a mené l'opposition au texte au motif principal que le droit international n'interdit pas la peine de mort, prévue par l'article 6.2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans le cas des crimes les plus graves. Singapour a également présenté un amendement et adopté, lui aussi sous les applaudissements, par 103 voix pour, 68 voix contre et 13 abstentions, réaffirmant notamment le droit souverain des États à élaborer leur propre système juridique et à déterminer les peines adéquates. S'exprimant au nom de l'Union européenne, la République tchèque a estimé que le moratoire envoyait un message en faveur de la dignité humaine et qu'à aucun endroit le texte ne remettait en cause la souveraineté des États.
Également mis aux voix, le projet de résolution sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a été adopté par 131 voix pour, 1 contre (Burundi) et 45 abstentions. Le texte exige que tous les États fassent le nécessaire pour mettre fin à la pratique des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, réaffirme qu'ils sont tenus de mener des enquêtes approfondies, en suivant les meilleures pratiques médico-légales et demande de faire le nécessaire pour que la police fasse preuve de retenue.
L'Égypte, avec le soutien de plusieurs délégations, a présenté un amendement demandant que la référence aux groupes vulnérables sur la base de leur orientation sexuelle ou leur identité de genre soit remplacée par la simple mention de « leur sexe ». L'amendement a été rejeté par 88 voix contre, 51 voix pour et 26 abstentions. La République tchèque, au nom de l'Union européenne, a déploré la décision « de dernière minute » de présenter un amendement allant à l'encontre des valeurs fondamentales des Nations Unies. À l'instar de nombreuses autres délégations, elle a souligné que la résolution n'obligeait pas les États à modifier leur droit interne.
Le rejet de l'amendement a été un motif d'abstention sur le projet de résolution pour des États tels que l'Iran, l'Arabie saoudite, le Yémen, le Nigéria et l'Indonésie. Le Pakistan, qui s'est lui aussi abstenu, a estimé que certains États cherchaient à « imposer leurs vues à d'autres ». De leur côté la Chine, la Fédération de Russie, le Nicaragua, Cuba et les Philippines ont notamment invoqué les références à la Cour pénale internationale (CPI) pour expliquer leur abstention.
Le projet de résolution sur le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a été adopté par consensus, la République arabe syrienne expliquant que les « bonnes pratiques » durant les négociations menées par la Suède, justifiait qu'elle s'abstienne de demander une mise aux voix cette année. Le texte, qui prend note du rapport annuel du HCR, s'inquiète notamment des problèmes majeurs liés à l'accueil des réfugiés compte tenu des ressources limitées des États et souligne l'importance de répartir les responsabilités de manière plus équitable. Il déplore la multiplication des cas de refoulement et d'expulsion illicites de réfugiés et de demandeurs d'asile, ainsi que les pratiques consistant à refuser l'accès au droit d'asile. Par ce texte, l'Assemblée générale se déclarerait en outre gravement préoccupée par l'ampleur sans précédent de la crise mondiale de la sécurité alimentaire et de la nutrition et par les répercussions qu'elle aura sur les personnes relevant de la compétence du Haut-Commissariat.
Aux termes du projet de résolution biennale sur les personnes disparues présenté par l'Azerbaïdjan et adopté par consensus, l'Assemblée générale exhorterait les États à prendre toutes les mesures nécessaires pour s'attaquer, sans distinction préjudiciable, au problème des personnes portées disparues à l'occasion de conflits. Elle réaffirmerait aussi qu'il importe de veiller à associer les familles aux processus pertinents liés aux mesures prises lorsque des personnes sont portées disparues et prierait par ailleurs les États d'accorder la plus grande attention au cas des enfants portés disparus à l'occasion de conflits armés. Prenant la parole avant l'adoption, l'Arménie a déploré que le facilitateur du projet applique une politique de recours à la force, sapant les efforts de la communauté internationale visant à déterminer le sort des personnes disparues. Elle a dénoncé « l'hypocrisie » et les « intérêts cachés » de l'Azerbaïdjan.
Comme chaque année, la liberté de religion ou de conviction a été soutenue par l'ensemble des États Membres qui ont appuyé un projet de texte par lequel l'Assemblée générale condamnerait énergiquement les atteintes à la liberté de pensée, de conscience et de religion ou de conviction ainsi que toutes les formes d'intolérance, de discrimination et de violence fondées sur la religion ou la conviction. Le projet constate avec une profonde inquiétude l'augmentation des violences visant les membres de nombreuses communautés religieuses et condamne énergiquement les actes de terrorisme contre les membres de minorités religieuses au nom d'une religion ou d'une conviction.
Adopté par consensus, le texte sur l'Institut africain des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants exhorte ses États membres à s'acquitter de leurs contributions financières annuelles.
La Troisième Commission poursuivra l'adoption de ses projets de résolution mardi 15 novembre, à partir de 10 heures.
DÉCISION SUR LES PROJETS DE RÉSOLUTION
Rapport du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, questions relatives aux réfugiés, aux rapatriés et aux déplacés et questions humanitaires
Aux termes de son projet de résolution sur le « Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés » (A/C.3/77/L.49) présenté par la Suède au nom du Groupe des pays nordiques et adopté sans vote, l'Assemblée générale ferait sien le rapport du Comité exécutif du Programme du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés sur les travaux de sa soixante-treizième session et se féliciterait de l'adoption d'une conclusion sur la santé mentale et le soutien psychosocial.
Elle constaterait avec inquiétude que la privation arbitraire de la nationalité précipite les personnes dans l'apatridie et est une source de souffrance généralisée, et demanderait aux États de s'abstenir d'adopter des mesures discriminatoires et de promulguer ou de maintenir toute législation qui révoquerait arbitrairement la citoyenneté de leurs ressortissants.
Par ce texte, l'Assemblée générale s'inquiéterait des problèmes majeurs liés à l'accueil, à la protection et à l'intégration des réfugiés dans le cadre des systèmes et stratégies nationaux compte tenu des difficultés socioéconomiques et des ressources limitées des pays (…) et soulignerait qu'il importe d'atténuer la pression qui s'exerce sur les pays d'accueil en répartissant les charges et les responsabilités de manière plus équitable, plus soutenable et plus prévisible entre les États et les autres parties prenantes. Elle engagerait aussi le Haut-Commissariat et les partenaires à soutenir les États dans différentes situations et à faciliter l'appui qui leur est destiné de manière efficace.
Elle déplorerait la multiplication des cas de refoulement et d'expulsion illicites de réfugiés et de demandeurs d'asile, ainsi que les pratiques consistant à refuser l'accès au droit d'asile, et demanderait à tous les États concernés de respecter les principes pertinents relatifs à la protection des réfugiés et aux droits humains.
Outre les risques liés à la traite des êtres humains et le grand nombre de personnes en quête d'asile qui ont péri ou disparu en mer ou sur terre, l'Assemblée générale se déclarerait gravement préoccupée par l'ampleur sans précédent de la crise mondiale de la sécurité alimentaire et de la nutrition et par les répercussions qu'elle aura sur les personnes relevant de la compétence du Haut-Commissariat. Elle appellerait les États, les organisations humanitaires et de développement et les autres partenaires concernés à prendre des mesures coordonnées et immédiates pour sauver des vies et atténuer les souffrances dans les pays menacés par la famine, l'insécurité alimentaire, la faim et la malnutrition aiguë.
Elle exhorterait par ailleurs les États à envisager de créer, d'étendre ou de faciliter (…) un accès à des voies complémentaires et durables de protection et à des solutions pour les réfugiés, notamment dans le cadre de leur admission ou de leur transfert pour raisons humanitaires, du regroupement familial, des migrations de travailleurs qualifiés, des dispositifs de mobilité de la main-d'œuvre, des bourses d'études et des dispositifs de mobilité étudiante.
Enfin, elle demanderait aux donateurs, au Haut-Commissariat et aux autres parties prenantes de mobiliser et de fournir un appui supplémentaire pour faciliter l'adaptation aux conséquences pour l'environnement de l'accueil d'un grand nombre de personnes réfugiées et autres personnes déplacées de force, et l'atténuation de ces conséquences.
Déclarations et explications de position
Après l'adoption du projet de résolution, la République islamique d'Iran a estimé que la responsabilité des réfugiés ne peut être portée par seulement quelques pays ou régions. De même, l'aide apportée par les pays en développement ne peut pas être considérée comme un acquis ou une raison pour d'autres pays de se défausser de leurs responsabilités, a-t-elle argué. Avertissant que certains pays en développement sont aujourd'hui « sous pression », elle a dénoncé les mesures coercitives unilatérales, y voyant des « sanctions illégales et inhumaines » qui affectent des personnes dans le besoin, dont nombre de réfugiés.
Le Canada a estimé que les déplacements forcés et l'insécurité alimentaire rendent l'action du HCR plus importante que jamais. La délégation a rappelé que l'agression injustifiée de la Fédération de Russie contre l'Ukraine a provoqué une vague de réfugiés en Europe. Elle a appelé à un partage plus égal des responsabilités, déplorant la pression indue que subissent certains pays à travers le monde.
Au nom de l'Union européenne, la République tchèque s'est félicitée que le consensus ait prévalu sur ce « défi décisif » qu'est l'action pour les réfugiés. Elle a salué l'ajout de libellés liés aux effets des crises alimentaire et climatique. Selon la délégation, ce texte est humanitaire par essence et doit le rester.
L'Arabie saoudite, qui s'exprimait au nom d'un groupe de pays du Golfe, a dit s'être jointe au consensus, tout en se dissociant des mentions faites à la « santé sexuelle et reproductive » et aux « services de santé sexuelle et reproductive ». Cela ne s'inscrit pas dans nos valeurs traditionnelles et ne correspond pas aux systèmes mis en place dans nos pays, a-t-elle indiqué.
La Hongrie a dénoncé les références faites au Pacte mondial sur les réfugiés et au Forum mondial sur les réfugiés, rappelant qu'elle n'a pas souscrit au Pacte et ne participe pas à sa mise en œuvre.
Singapour s'est félicitée des efforts consentis pour trouver des libellés consensuels mais a regretté que ce projet de résolution ne prenne pas en considération les différents contextes. Les États disposent du droit souverain de contrôler leurs frontières et de gérer les flux migratoires, a fait valoir la délégation, indiquant qu'en raison de sa taille, Singapour n'est pas en mesure d'accepter toute personne demandant l'asile ou le statut de réfugié.
Le Kenya s'est dissocié de la référence faite, au paragraphe 28 du dispositif du projet de résolution, à l'intégration locale des réfugiés et a souligné que les modalités d'accueil relèvent du droit souverain et des prérogatives des États hôtes.
La République arabe syrienne s'est félicitée de l'adoption du projet de texte par consensus. Elle a dit avoir constaté de bonnes pratiques durant les négociations menées par la Suède, justifiant ainsi le fait qu'elle n'a pas demandé de mise aux voix cette année.
Le Sénégal s'est dissocié des termes non consensuels portant sur la sexualité, expliquant que ces questions doivent être comprises selon les réalités socioéconomiques et culturelles des pays.
Enfin, le Saint-Siège s'est félicité que le texte attire l'attention sur l'ampleur inédite de la crise alimentaire et que soit mis en avant la contribution des réfugiés dans les pays hôtes. La délégation a cependant exprimé des réserves quant aux références faites à la santé sexuelle et reproductive et aux soins de santé sexuelle et reproductive, estimant que ce ne sont pas des concepts de santé. Elle a également pointé la mention de l'accès à l'avortement et réaffirmé que le terme « genre » ne peut s'appuyer que sur l'identité biologique.
Questions relatives aux droits humains, y compris les divers moyens de mieux assurer l'exercice effectif des droits humains et des libertés fondamentales
Selon les termes du projet de résolution sur les « Personnes disparues » (A/C.3/77/L.41), présenté par l'Azerbaïdjan et adopté sans vote, l'Assemblée générale demanderait aux États parties à un conflit armé de prendre toutes les mesures voulues pour empêcher que des personnes ne disparaissent à l'occasion de conflits armés, de faire la lumière sur le sort des personnes portées disparues du fait d'une telle situation et, en cas de disparition, de prendre les mesures qui s'imposent.
Elle réaffirmerait qu'il importe de veiller à associer les familles aux processus pertinents liés aux mesures prises lorsque des personnes sont portées disparues et prierait par ailleurs les États d'accorder la plus grande attention au cas des enfants portés disparus à l'occasion de conflits armés et de prendre les mesures appropriées pour les rechercher, les identifier et les réunir avec leur famille.
De même, elle exhorterait les États, et encouragerait les organisations intergouvernementales et les organisations non gouvernementales, à prendre toutes les mesures nécessaires aux niveaux national, régional et international pour s'attaquer, sans aucune distinction préjudiciable, au problème des personnes portées disparues à l'occasion de conflits.
L'Assemblée générale inviterait par ailleurs les États, les institutions nationales et, le cas échéant, les organisations intergouvernementales, internationales ou non gouvernementales, concernées à échanger des informations sur les meilleures pratiques et des recommandations techniques et à promouvoir la coopération, selon qu'il convient, notamment entre les mécanismes ayant trait aux personnes disparues.
Enfin, elle inviterait sa présidence à organiser une réunion informelle tous les deux ans à compter de la soixante-dix-neuvième session, et prierait le Secrétaire général de lui présenter à cette occasion un aperçu du rapport détaillé sur l'application de la présente résolution, avant la tenue d'un dialogue.
Déclaration générale
Prenant la parole avant l'adoption, l'Arménie a insisté sur l'importance de la coopération internationale pour déterminer le sort des personnes disparues en lien avec des conflits armés ainsi que pour renforcer les mécanismes régionaux et internationaux de protection des populations civiles en vue d'éviter que des personnes ne soient portées disparues. Hélas, a déploré la délégation, le facilitateur de ce projet de résolution applique une politique de recours à la force, à la violence et à la destruction, ce qui vient saper les efforts de la communauté internationale visant à déterminer le sort des personnes disparues. Pour la délégation arménienne, il s'agit là d'une violation flagrante du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme. Dénonçant l'« hypocrisie » et les « intérêts cachés » de l'Azerbaïdjan, elle a assuré que l'Arménie n'a quant à elle jamais tenté de politiser cette question au détriment des familles des personnes disparues, lesquelles ont « immensément souffert ».
Aux termes de son projet de résolution sur les «Exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires » (A/C.3/77/L.42), présenté par la Finlande, au nom du Groupe des pays nordiques et adopté par 131 voix pour, 1 contre (Burundi) et 45 abstentions, l'Assemblée générale exigerait que tous les États fassent le nécessaire pour qu'il soit mis fin à la pratique des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et prennent des mesures efficaces pour prévenir, combattre et éliminer ce phénomène sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations.
Elle réaffirmerait que tous les États sont tenus de mener des enquêtes rapides, efficaces, exhaustives, approfondies, indépendantes, impartiales et transparentes et en suivant les meilleures pratiques médico-légales. Elle réaffirmerait aussi que ces enquêtes doivent être conduites en gardant à l'esprit l'importance de l'égalité des genres dans l'accès à la justice, en particulier dans le cas de féminicide.
En outre, l'Assemblée générale demanderait instamment à tous les États de prendre toutes les mesures imposées par le droit international des droits humains et le droit international humanitaire pour prévenir la perte de vies humaines, en particulier d'enfants, en cas de détention, d'arrestation, de manifestation publique, de violence au sein de communautés ou entre communautés, de troubles civils, de situation d'urgence ou de conflit armé.
De surcroît, elle demanderait de faire le nécessaire pour que la police, les forces de l'ordre, les forces armées et les autres agents intervenant au nom de l'État fassent preuve de retenue et encouragerait ces derniers à mettre à la disposition des membres de leurs forces de l'ordre, le matériel de protection et les armes semi-létales adéquats, sachant que même les armes à létalité́ réduite peuvent entraîner la mort ou provoquer des blessures graves.
L'Assemblée réaffirmerait par ailleurs que les droits humains dont jouissent les personnes hors ligne doivent également être protégés en ligne, afin de contribuer à prévenir les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires.
À cet égard, elle exhorterait les États à promouvoir et à appliquer une approche respectueuse des obligations ayant trait aux droits humains et soucieuse de l'égalité des genres dans la conception, le développement et l'utilisation des nouvelles technologies et à veiller à ce que ces dernières ne soient pas discriminatoires et ne soient pas utilisées pour violer les droits humains.
Décision sur le projet d'amendement L.66
Avant l'adoption du projet de résolution, l'Égypte a présenté un projet d'amendement (A/C.3/77/L.66), regrettant que les appels de nombre de pays pour supprimer certaines références polémiques contenues dans l'alinéa b) du paragraphe 7 du projet de résolution aient été ignorées. L'amendement propose ainsi de remplacer « leur orientation sexuelle ou leur identité de genre» par « leur sexe » et reprend le libellé de la déclaration universelle. La délégation a également souhaité la suppression de la liste de groupes particuliers qui figure dans le projet de résolution, y voyant une tentative d'exclure certains individus au profit d'autres.
Explications de vote sur le projet d'amendement
Avant la mise aux voix du projet d'amendement, la Tchéquie, au nom de l'Union européenne, a déploré la décision de dernière minute de présenter un amendement qui va à l'encontre à l'efficacité du multilatéralisme et des valeurs fondamentales que doivent protéger les Nations Unies. Le paragraphe incriminé se concentre pourtant sur les obligations des États de mener des enquêtes sur des groupes vulnérables les plus susceptibles d'être visés par des exécutions, et la résolution n'oblige pas les États à modifier leur droit interne. La liste reprenant les groupes les plus vulnérables doit être conservée, a insisté la délégation qui a précisé qu'elle votera contre le projet d'amendement.
Ces critiques à l'encontre du projet d'amendement ont trouvé un écho chez nombre de délégations, comme celle de la Finlande qui a noté que la vulnérabilité accrue face aux exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires de certains groupes est prouvée par plusieurs rapports officiels, et arguant que des exécutions ont lieu en fonction de l'identité de genre, réelle ou perçue. Ne pas conserver cette liste de groupes les plus vulnérables constituerait un pas en arrière pour la résolution comme pour la communauté internationale, a renchéri l'Argentine, tandis que le Mexique a remarqué que ladite liste suit les principes d'universalité de la Déclaration des droits de l'homme. Également favorable au maintien de la liste, la Nouvelle-Zélande, s'exprimant au nom d'un groupe de pays, a noté que les États qui seraient réfractaires à la liste peuvent adopter la résolution sans avoir à modifier leur droit interne concernant ces groupes. Le Royaume-Uni s'est dit préoccupé que la protection des personnes les plus vulnérables du fait de leur identité de genre ou leur orientation sexuelle doit de nouveau faire l'objet d'un vote. Pour les États-Unis, la suppression de la mention des groupes les plus ciblés reviendrait à ôter une notion pourtant adoubée par un grand nombre de délégations depuis une décennie.
« Est-on en train de dire que des raisons autorisent en toute légalité de tuer quelqu'un », s'est émue la Colombie, fustigeant à son tour le projet d'amendement.
Mais le changement implique la prise en considération des traditions de chaque État, a argué la République arabe syrienne pour qui imposer un libellé n'est pas la solution et le projet d'amendement n'aurait pas lieu d'être si les préoccupations de tous avaient été prises en compte lors des négociations. La délégation syrienne a précisé qu'elle votera pour le projet d'amendement, à l'instar de la Jordanie qui a dans le même temps affirmé le droit à la vie de toutes et tous y compris les personnes membres de groupes spécifiques ou se distinguant par leur identité sexuelle ou de genre.
Le projet d'amendement L.66 a été rejeté par 88 voix contre, 51 pour et 26 abstentions.
Explications de vote sur le projet de résolution L.42
Avant le vote, l'Arabie saoudite a salué l'inclusion du handicap dans le préambule du texte. La délégation, qui a précisé qu'elle s'abstiendra de voter, a également expliqué que le concept d'orientation sexuelle et d'identité de genre va à l'encontre des valeurs du pays et ne fait pas non plus partie de ses engagements internationaux.
Ces réserves ont été soutenues par plusieurs délégations, telles que la République islamique d'Iran, qui s'est dissociée de tous les libellés non consensuels et qui s'est déclarée préoccupée par les exécutions extrajudiciaires menées par des pays occidentaux, en mentionnant la mort du général Soleimani. Le Yémen a expliqué que son opposition à la mention d'un groupe de personnes plus vulnérables ne signifie pas que « nous sommes en faveur de l'exécution de ces personnes, mais que nous les protégeons en tant qu'homme ou femme ». Les concepts d'identité de genre et d'orientation sexuelle ne sauraient nous être imposés, a-t-il ajouté.
L'Égypte a dénoncé la volonté de certains États de se concentrer sur certains groupes non reconnus de personnes de façon discriminatoire. Cela sème la division au sujet d'une résolution qui aurait pourtant mérité d'être adoptée de manière consensuelle a déploré la délégation, annonçant son abstention. La Fédération de Russie a déploré la création de hiérarchies artificielles dans la société civile, pointant par ailleurs les paragraphes qui font les louanges de la CPI, « qui n'est pourtant pas un instrument idoine d'administration de la justice ». En outre, le concept de la responsabilité de protéger n'est pas reconnu par tous les États, a ajouté la délégation. Le Pakistan s'est inquiété que certains État tentent d'imposer leurs vues à d'autres et a rejeté tout parallèle entre l'application de la peine de mort par un État et les exécutions extrajudiciaires.
Les délégations ayant voté pour le projet de résolution sans réserve, ont argué, comme le Pérou, que le droit à la vie étant universel, on ne peut le refuser à quiconque. La Suède, au nom du Groupe des pays nordiques, a déploré que certaines délégations aient décidé de ne pas approuver la résolution dans sa totalité, les exhortant à lire la totalité du paragraphe incriminé « au lieu de se focaliser sur certains mots ». Les Pays-Bas, ainsi que les États-Unis, ont eux aussi soutenu le projet de résolution dans des termes apparentés.
À l'issue du vote, la Suisse s'est félicitée que le contexte particulier des manifestations soit mentionné dans le projet de résolution, mais a estimé que le libellé de la résolution 50/21 (2002) du Conseil des droits de l'homme sur la promotion et protection des droits humains dans le contexte des manifestations pacifiques aurait dû être repris entièrement dans le paragraphe 12 du dispositif.
La Gambie ayant voté pour le projet, et aussi le projet d'amendement, a estimé que ce dernier ne fait que présenter un libellé acceptable reflétant les valeurs de toutes les délégations. Le Sénégal a regretté que certains prétendent que le libellé à l'origine du projet d'amendement existe depuis des années sans se demander pourquoi certaines délégations s'y opposent, elles aussi, depuis des années. Mais si le Sénégal est initiateur du projet d'amendement apporté par l'Égypte, il a aussi voté pour le texte, ce qui montre son attachement à la promotion des droits humains pour tous.
Le Mali s'est aussi dissocié des paragraphes controversés, de même que la Malaisie, qui a exprimé de vives réserves au sujet des termes d'orientation sexuelle et d'identité de genre, et le Bélarus qui, déplorant que l'utilisation de libellés non consensuels ait prévalu, a dit s'être abstenu de vote.
Le Nicaragua s'est dissocié des paragraphes se référant à la CPI, de même que les Philippines qui ont rappelé qu'elles se sont retirées du Statut de Rome. Les libellés concernant la CPI, les défenseurs des droits humains ou le Statut de Rome ne recueillant pas l'approbation de tous ni celle de la Chine, qui s'est conséquemment abstenue.
Le Bangladesh a expliqué que les concepts d'orientation sexuelle ou d'identité de genre ne sont pas compatibles avec son droit interne et a regretté que la position de certains États n'ait pas été prise en compte. Des regrets partagés par l'Indonésie qui s'est abstenue de vote, tandis que la République-Unie de Tanzanie a expliqué avoir voté pour le projet de résolution, tout en se dissociant de l'alinéa b) du paragraphe 7. Le Nigéria a souligné que les réserves contenues dans le projet d'amendement sont connues de longue date.
La délégation de Cuba a rejeté le concept de responsabilité de protéger et la compétence de la CPI, et a émis plusieurs réserves au texte, notamment au paragraphe 17 du préambule ainsi qu'au paragraphe 15 du dispositif. La délégation a aussi argué que la prévention des exécutions incombe exclusivement aux autorités de chaque État.
La République arabe syrienne a affirmé se dissocier de certains éléments, tandis que le Saint-Siège a fait part de sa déception au sujet du paragraphe 7 du projet de résolution, déplorant un libellé ambigu concernant l'identité de genre, un concept en contradiction avec l'identité biologique.
Liberté de religion ou de conviction
Selon les termes du projet de résolution sur la « Liberté de religion ou de conviction » (A/C.3/77/L.43), présenté par la République tchèque au nom de l'Union européenne et adopté sans vote, l'Assemblée générale condamnerait énergiquement les atteintes à la liberté de pensée, de conscience et de religion ou de conviction ainsi que toutes les formes d'intolérance, de discrimination et de violence fondées sur la religion ou la conviction.
Elle constaterait avec une profonde inquiétude que le nombre de cas de discrimination, d'intolérance et de violence visant les membres de nombreuses communautés religieuses et autres dans diverses régions du monde augmente, notamment les cas motivés par l'islamophobie, l'antisémitisme ou la christianophobie.
Elle condamnerait énergiquement les actes de violence et de terrorisme qui continuent d'être commis contre les membres de minorités religieuses, sous le couvert ou au nom d'une religion ou d'une conviction, de même que tout appel à la haine fondée sur la religion ou la conviction qui constitue une incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence.
Elle se déclarerait profondément préoccupée par la persistance d'obstacles à l'exercice du droit à la liberté de religion ou de conviction ainsi que par la multiplication des cas d'intolérance, de discrimination et de violence fondés sur la religion ou la conviction.
Le texte cite notamment les actes de violence et d'intolérance; la montée de l'extrémisme religieux; l'usage de stéréotypes insultants, la pratique négative du profilage et la stigmatisation; les attaques perpétrées contre des sites religieux, des lieux de culte et des sanctuaires; ainsi que les systèmes constitutionnels et législatifs qui ne garantissent pas de manière adéquate et effective la liberté de pensée, de conscience et de religion ou de conviction de tous sans distinction.
Par conséquent, l'Assemblée générale demanderait instamment aux États de redoubler d'efforts pour protéger et promouvoir la liberté de pensée, de conscience et de religion ou de conviction.
Prévention du crime et justice pénale
Par le projet de résolution intitulé « Institut africain des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants » (A/C.3/77/L.11/Rev.1), présenté par l'Ouganda au nom du Groupe des États d'Afrique et adopté sans vote, l'Assemblée générale engagerait les États Membres à faire mieux connaître les travaux que mène l'Institut et leur importance pour la bonne mise en œuvre du Programme de développement durable à l'horizon 2030.
Elle exhorterait également les États membres de l'Institut qui ne se sont pas acquittés de leurs contributions financières annuelles à l'Institut, à verser la totalité ou une partie de leurs arriérés, sachant que les États membres doivent financer 80% du budget approuvé. En outre, elle exhorterait tous les États Membres et les organisations non gouvernementales à aider l'Institut à mettre en œuvre ses programmes et activités visant à renforcer les systèmes de prévention de la criminalité et de justice pénale en Afrique.
De même, elle engagerait les États d'Afrique qui ne sont pas encore membres de l'Institut à envisager de le devenir en vue d'appuyer son action collective, de gagner plus de soutiens à sa cause et de renforcer ainsi la lutte contre la criminalité et le terrorisme.
Elle demanderait, enfin, à l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime de continuer à travailler en étroite collaboration avec l'Institut et demanderait à celui-ci de présenter à l'Office, ainsi qu'à la Conférence des ministres africains des finances, de la planification et du développement économique de la Commission économique pour l'Afrique, un rapport annuel sur ses activités.
Questions relatives aux droits humains, y compris les divers moyens de mieux assurer l'exercice effectif des droits humains et des libertés fondamentales
Selon les termes du projet de résolution sur le « Moratoire sur l'application de la peine de mort » (A/C.3/77/L.44/Rev.1), présenté par l'Australie au nom d'un groupe de pays et adopté tel qu'amendé par 126 voix pour, 37 voix contre et 24 abstentions, l'Assemblée générale réaffirmerait le droit souverain de tous les pays d'élaborer leur propre système juridique et notamment de déterminer les peines appropriées, conformément aux obligations que leur impose le droit international.
Profondément inquiète de ce que la peine de mort continue d'être appliquée, elle demanderait à tous les États de respecter les normes internationales garantissant la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort, en particulier les normes minimales énoncées dans l'annexe de la résolution 1984/50 du Conseil économique et social.
Elle leur demanderait également de veiller à ce que toute procédure aboutissant à l'imposition de la peine de mort soit conforme aux garanties de procès équitable reconnues à l'échelle internationale.
L'Assemblée générale demanderait aussi aux États de donner aux personnes condamnées à mort accès à des informations relatives à la méthode d'exécution, en particulier la procédure précise qui sera suivie; de faire en sorte que la peine de mort ne soit pas appliquée sur la base de lois discriminatoires, notamment de lois ciblant les personnes ayant exercé leurs droits humains; et d'améliorer les conditions de détention des personnes poursuivies pour des crimes passibles de la peine capitale ou dans le couloir de la mort, entre autres.
Préalablement au vote sur le projet de résolution A/C.3/77/L.44/Rev.1 dans son ensemble, Singapour a présenté la proposition d'amendement A/C.3/77/L.54, coparrainée par 39 pays et demandant d'insérer, avant le paragraphe 1 du dispositif, un nouveau paragraphe libellé comme suit: « Réaffirme le droit souverain de tous les pays d'élaborer leur propre système juridique et notamment de déterminer les peines appropriées, conformément aux obligations que leur impose le droit international ».
Singapour a relevé que ce projet d'amendement « simple, neutre et constructif » n'est pas nouveau, puisqu'il reprend un libellé de résolutions précédemment adoptées. Cette proposition réaffirme un principe fondamental de la Charte des Nations Unies, à savoir le droit souverain de tous les pays à prendre leur propre décision concernant leur système juridique et leurs sentences, a expliqué la délégation.
Déclarations et explications de vote sur la proposition d'amendement A/C.3/77/L.54
Avant le vote, la République tchèque, parlant au nom de l'Union européenne, a précisé que le projet de résolution a pour but d'envoyer un message indiquant que proclamer un moratoire sur la peine de mort contribue à respecter la dignité humaine. L'amendement proposé va dans le sens inverse, a critiqué la délégation, selon laquelle la souveraineté des États n'est aucunement remise en cause par le projet de résolution. Elle a également déploré que Singapour ait rejeté les tentatives de discussion, avant d'indiquer qu'elle votera la proposition d'amendement.
Le Venezuela a salué les efforts des coauteurs du projet de résolution, remerciant également Singapour d'avoir fait tout son possible pour parvenir à un texte équilibré. L'appel au respect du principe de souveraineté ne suppose aucune contradiction avec un appel mondial pour l'abolition de la peine de mort, a souligné la délégation, espérant qu'à l'avenir une formule acceptable sera trouvée pour tous les États.
Le Canada a indiqué qu'il votera contre la proposition d'amendement, qui, selon lui, n'a pas été présentée dans un esprit de compromis.
De son côté, la Nouvelle-Zélande s'est dite déçue que le consensus n'ait pu être atteint sur une nouvelle formulation du texte et a indiqué qu'elle votera contre le projet d'amendement.
Sri Lanka a fait valoir qu'il n'est pas possible de mettre à mal le concept de souveraineté. La décision de maintenir ou non la peine de mort dépend des opinions des sociétés, a insisté la délégation, pour qui l'imposition de la peine de mort est une décision souveraine prise par chaque État. C'est une question de justice pénale qui doit être traitée dans son contexte propre, a-t-elle ajouté, indiquant qu'elle votera en faveur de l'amendement.
La Micronésie, reconnaissant le droit souverain de chaque État de créer son propre système juridique, a toutefois indiqué qu'elle s'abstiendra. Selon elle, l'inclusion d'un paragraphe tel que prévu par la proposition d'amendement atténuerait le message essentiel du projet de résolution.
La Chine a regretté que cette proposition d'amendement, qui a bénéficié du soutien d'une grande majorité d'États Membres, n'ait pas été inséré dans le texte initial du projet de résolution. Elle votera en faveur de cette proposition.
Une position partagée par le Botswana, qui a estimé que l'adoption de cet amendement montrerait le respect du principe d'indépendance politique.
La Jamaïque a également estimé que l'application de la peine de mort relève de la justice pénale et doit être déterminée par les États. Rappelant d'autre part qu'elle lutte contre une « épidémie de crimes et de violences » qui fait peser des menaces sur sa sécurité, elle a dit vouloir garder la peine de mort comme « dernier recours ».
L'Argentine a indiqué qu'elle votera contre la proposition d'amendement, ne voyant dans le projet de résolution aucune disposition qui impose aux États de modifier ou d'adapter leur ordre juridique ou leur système pénal.
L'Indonésie a regretté que ses préoccupations aient été ignorées au cours des négociations, avant de rappeler l'importance de la non-ingérence dans les affaires internes des États. Elle a ainsi encouragé les États Membres à voter en faveur de l'amendement.
La République islamique d'Iran a dit vouloir voter contre la résolution, estimant que le recours à la peine de mort comme sanction pénale relève de chaque État Membre.
Le Liechtenstein a regretté cette nouvelle présentation d'un amendement qui mine l'engagement des États Membres, indiquant vouloir voter contre celui-ci.
La peine de mort et le moratoire sur son application relèvent de chaque État, a souligné l'Égypte, précisant qu'elle votera en faveur de la proposition d'amendement.
La Papouasie-Nouvelle-Guinée a regretté le manque de flexibilité des auteurs du projet de résolution au moment d'envisager l'inclusion de l'amendement. Celui-ci vise justement à rétablir un équilibre, a estimé la délégation.
Le Nigéria a regretté à son tour que ses préoccupations n'aient pas été prises en compte, s'agissant notamment de l'existence de plusieurs systèmes de justice pénale. Rappelant à cet égard qu'il a toujours maintenu un moratoire non officiel sur l'application de la peine de mort, il a fait valoir que cette décision relève de la souveraineté de chaque État.
L'Arabie saoudite a regretté que le paragraphe prévu dans la proposition d'amendement n'ait pas été inclus dans le projet de résolution alors qu'il a été adopté lors de la soixante-quinzième session. Elle votera donc en faveur du paragraphe supprimé.
Singapour a ensuite demandé au Président de la Commission de préciser qui a demandé un vote sur la proposition d'amendement. Il s'agit du Costa Rica et de l'Australie, a répondu le Président
La proposition d'amendement A/C.3/77/L.54 a été adoptée par 103 voix pour, 68 voix contre et 13 abstentions.
Après l'adoption du projet d'amendement, Singapour a déposé une motion d'ordre pour demander si les coauteurs du projet de texte initial entendent retirer leur parrainage du projet de texte tel qu'amendé. Le Secrétariat de la Commission a répondu que toute délégation souhaitant retirer son coparrainage du projet de résolution tel qu'amendé peut le faire et que cela sera reflété dans le procès-verbal de la séance. Singapour a repris la parole pour déclarer qu'à moins d'avoir retiré leur coparrainage du texte tel qu'amendé, il sera entendu que les coauteurs du texte initial acceptent le nouveau paragraphe 1 du dispositif.
Dans une nouvelle motion d'ordre, Singapour a souhaité que, dans deux ans, la Commission évite de se retrouver dans la dynamique actuelle, qui veut qu'un groupe de pays continue de retirer une décision prise par une majorité de membres avant de pointer du doigt d'autres pays au motif qu'ils auraient rejeté le dialogue. La délégation a réaffirmé son attachement au dialogue, « mais pas un dialogue fondé sur l'arrogance ». Cette façon de faire n'est pas acceptable au Nations Unies, a-t-elle insisté, « ce n'est pas le système multilatéral auquel nous avons souscrit ».
Après le vote, la Sierra Leone s'est félicitée d'avoir aboli la peine de mort en octobre 2021 et d'avoir voté en faveur de cet amendement, en vertu de son respect de la Charte des Nations Unies.
Le Chili a exprimé son opposition à l'amendement adopté, estimant que le respect la vie humaine devrait l'emporter sur toutes autre considération. La délégation a estimé que cet amendement sape l'esprit du projet de résolution, en faveur duquel le Chili votera malgré tout.
Le Bélarus a défendu la souveraineté juridique et pénale des États, regrettant qu'en dépit des voix qui se sont élevées pour défendre ce principe, les auteurs du projet de résolution continuent d'en faire fi, au mépris de la Charte des Nations Unies.
L'Australie a ensuite demandé au Président de la Commission de préciser qui a demandé cette mise aux voix. Il s'agit de Singapour, a répondu le Président. Singapour a confirmé sa demande de vote, indiquant n'avoir « pas hésité » à le faire et s'être fondé sur l'article 130 du règlement de l'Assemble générale.
Déclarations et explications de vote sur le projet de résolution A/C.3/77/L.44/Rev.1 dans son ensemble
Avant le vote, le Mexique s'est dit favorable au projet de résolution. Rappelant qu'il s'oppose à la peine de mort en toute circonstance, il s'est réjoui que de plus en plus d'États adoptent un moratoire ou abolissent la peine capitale, conformément à l'article 6, paragraphe 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Sur cette même ligne, la Suisse, qui parlait aussi au nom de la Nouvelle-Zélande, a réitéré son opposition à la peine de mort en toute circonstance. Les deux pays sont en faveur de cette résolution depuis sa première présentation, a-t-elle rappelé, avant de regretter que l'amendement adopté dilue la portée du projet du texte en suggérant que la souveraineté des États l'emporterait sur l'universalité des droits humains.
Trinité-et-Tobago a fait valoir que l'application de la peine de mort est une question de justice pénale qui relève exclusivement de la juridiction des États souverains. Elle s'est dite fière de se joindre aux 102 autres États Membres qui ont soutenu l'amendement de Singapour.
Prenant à nouveau la parole, Singapour s'est dite heureuse de voir son amendement désormais inclus dans le projet de résolution. Il a toutefois estimé que le texte tel qu'amendé contient encore des contradictions, notamment le paragraphe 2 de son dispositif, selon lequel l'Assemblée générale s'inquiéterait profondément de ce que la peine de mort continue d'être appliquée. De l'avis de Singapour, le projet de résolution représente les vues d'un groupe de pays qui essaie d'exporter son modèle de société au reste du monde, sans la moindre empathie. Le « à prendre ou à laisser » n'est pas un ingrédient du dialogue, a martelé la délégation, invitant « certains États » à ne pas « dénigrer » l'avis des autres. Nous sommes ici sur un pied d'égalité avec vous, a-t-elle conclu, indiquant qu'elle votera contre le projet de résolution.
Le Canada s'est à son tour déclaré contre la peine de mort en toute circonstances, estimant que ce châtiment va à l'encontre de la dignité de l'être humain et ne garantit pas l'absence d'erreurs judiciaires, à l'origine d'exécutions infondées.
Un risque déploré aussi par les Palaos, qui se sont enorgueillis d'embrasser non seulement l'héritage du passé mais aussi les nouvelles normes internationales du droit international. Pour la délégation, qui votera pour le projet de résolution, la peine de mort est incompatible avec les droits humains et affecte en particulier les plus désavantagés.
L'Australie s'est, elle aussi, émue des erreurs judiciaires pouvant conduire à des exécutions, tout en affirmant respecter la souveraineté des États, conformément à la première phrase du préambule du projet de résolution, qui renvoie à la Charte des Nations Unies. Ce projet de résolution respecte l'égalité souveraine des États, a insisté la délégation, qui s'est félicitée que 144 pays aient aboli la peine de mort dans la pratique ou le droit, reflétant ainsi le « soutien transrégional » à l'abolition de cette peine.
Le Royaume-Uni a regretté l'inclusion de l'amendement au projet de résolution, jugeant que cet ajout sape l'esprit du texte. Le projet de résolution, a insisté la délégation, est un appel à un moratoire pour l'application de la peine de mort, mais pas pour l'imposition d'un changement des systèmes juridiques des États Membres. Elle a également rejeté toute accusation de prétention à une « supériorité culturelle ».
La Zambie s'est réjouie que la dernière exécution décrétée par le pays remonte à 1997 et que la peine capitale soit en passe d'être remplacée par l'emprisonnement à vie, après une révision du code pénal et un référendum. Elle a indiqué qu'elle s'abstiendra sur le projet de résolution.
Le Yémen a quant à lui dit vouloir voter en faveur de la souveraineté de chaque État et a appelé chacun à suivre le vote de la majorité contre le projet de résolution.
Après le vote, la République tchèque, s'exprimant au nom de l'Union européenne, s'est félicitée de l'adoption du texte à une large majorité, estimant que les chiffres parlent d'eux-mêmes. Après avoir rappelé que la peine de mort ne suffit pas à dissuader les auteurs de crimes graves, elle a également déploré que l'application de cette peine capitale donne lieu à des erreurs.
Le Costa Rica s'est réjoui d'avoir aboli la peine capitale il y a plus d'un siècle. Il a toutefois dit ne pas vouloir imposer son point de vue aux autres mais plutôt partager une expérience. Le contenu du projet de résolution n'est pas un déni de la souveraineté, a-t-il estimé, invitant chaque État à adopter les mécanismes nécessaires à l'application des droits humains sur son territoire. Les chemins vers l'abolition peuvent être différents, à chaque État de trouver ce chemin, a résumé la délégation.
L'Inde a assuré que ses lois préservent les plus vulnérables dans le cadre de l'application de la peine de mort. La loi en la matière prévoit aussi des mesures de grâce sur la base de circonstances atténuantes, a-t-elle fait valoir. Pour la délégation, le projet de résolution entend abolir la peine de mort mais n'arrive pas à reconnaître le droit de chaque État à sanctionner les auteurs de crimes comme il l'entend. En raison de cette contradiction avec son système juridique interne, elle a dit avoir voté en faveur de l'amendement.
Le Viet Nam a fait valoir le droit souverain des États à choisir leur propre système judiciaire. La peine capitale n'est applicable au Viet Nam que pour un nombre restreint de crimes graves et abjects, a précisé la délégation, selon laquelle les erreurs sont évitées et la transparence assurée.
Le Ghana s'est déclaré en faveur du projet de résolution dans son ensemble, mais aussi de l'amendement adopté car, a-t-il dit, les États sont souverains et ce principe est consacré par la Charte des Nations Unies
Le Pakistan a souligné à son tour ce droit inaliénable des États, arguant qu'il n'existe aucun consensus en matière de peine de mort à l'échelle internationale, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques faisant référence à la peine de mort dans certains contextes. Affirmant respecter ses obligations internationales ainsi que le droit international humanitaire, il a ajouté que la peine de mort n'est appliquée sur son territoire qu'après l'épuisement des recours et autres suites. La délégation a indiqué avoir voté pour l'amendement mais contre le projet de résolution dont elle rejette le cadre général.
Le Japon a, lui aussi, indiqué s'être prononcé pour l'amendement et contre le projet de résolution, qui, selon lui, fait fi du principe selon lequel le moratoire sur la peine de mort relève de la décision souveraine de chaque État. La peine capitale au Japon s'applique seulement pour les crimes les plus graves et les plus abjects, a assuré la délégation.
Le Myanmar a relevé que la peine de mort n'est pas formellement abolie dans le pays, même si un moratoire a été mis en place depuis plusieurs décennies. Rappelant par ailleurs qu'à la suite du coup d'État militaire de 2021, la junte au pouvoir a exécuté des défenseurs des droits humains, la délégation a accusé cette dernière d'avoir eu recours à la peine de mort de manière extrajudiciaire. Elle a précisé avoir voté en faveur du projet de résolution.
L'Indonésie, qui s'est abstenue, a indiqué qu'en 2021, plus de 4 millions de ses citoyens ont été victimes de drogues illicites. À cette aune, elle s'est dite convaincue que les droits des auteurs de ces crimes doivent être « mis en perspective » et qu'il convient de faire valoir le droit des victimes.
Le Qatar a indiqué avoir voté contre le projet de résolution, estimant que le droit souverain des pays n'est pas pris en compte dans ce texte.
Les États-Unis ont rappelé que le droit humanitaire international établit très clairement que les pays peuvent avoir recours à cette sanction conformément aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Un tribunal indépendant peut évaluer la possibilité d'appliquer à la peine de mort, a ajouté la délégation, qui a indiqué ne pas avoir voté en faveur du texte mais être disposée à poursuivre le dialogue pour parvenir à des libellés consensuels.
La République de Corée, qui a voté en faveur du projet de résolution, a expliqué qu'il n'y a plus eu d'exécutions depuis 26 ans dans le pays, ce qui constitue de facto une abolition. Selon elle, la question de l'abolition de la peine de mort est un point qui a trait au respect des droits humains. Elle a ajouté qu'elle continuera à examiner la question avec prudence.
L'Égypte a jugé que le projet de résolution va à l'encontre de la souveraineté des États Membres, raison pour laquelle elle a voté contre.
Les Fidji, qui ont voté en faveur du projet de résolution, ont souhaité se dissocier du nouveau paragraphe 1 du dispositif, qui figure désormais dans le texte.
La Macédoine du Nord a demandé à changer son vote sur l'amendement et sur la résolution.
Enfin le Saint-Siège s'est félicité que le projet de résolution fasse apparaître des tendances positives et reconnaisse l'impact de l'imposition de la peine de mort sur la famille des personnes exécutées, en particulier les enfants. La délégation a cependant regretté qu'aucun consensus n'ait été atteint lors des négociations.