(Reuters) - Deux hommes âgés de 22 et 39 ans ont été pendus samedi en Iran après avoir été accusés d'avoir tué un responsable de la milice paramilitaire Basij lors de manifestations qui ont suivi la mort de l'Iranienne kurde Mahsa Amini, en septembre.
Trois autres hommes ont été condamnés à mort dans la même affaire, et 11 ont été condamnés à des peines de prison.
"Mohammad Mehdi Karami et Seyyed Mohammad Hosseini, principaux auteurs du crime qui a conduit au martyre injuste de Ruhollah Ajamian, ont été pendus ce matin", ont écrit les autorités judiciaires dans un communiqué diffusé par l'agence de presse officielle IRNA.
Ces dernières exécutions portent à quatre le nombre de manifestants officiellement mis à mort au lendemain des soulèvements.
Le chef de la diplomatie européenne a condamné samedi les exécutions et exhorté l'Iran a cesser de prononcer la peine capitale contre des manifestants ainsi qu'à annuler les peines déjà prononcées"..
"Il s'agit encore d'un nouveau signe de la répression violente des autorités iraniennes contre les manifestations civiles", a dit Josep Borrell dans un communiqué.
La France, par la voix du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, a condamné elle aussi "avec la plus grande fermeté" les deux exécutions.
"Ces exécutions, révoltantes, s'ajoutent aux nombreuses autres violations graves et inacceptables des droits et libertés fondamentales commises par les autorités iraniennes (...)
L'exécution de manifestants ne peut tenir lieu de réponse aux aspirations légitimes de liberté du peuple iranien", a dit le ministère dans un communiqué.
Le gouvernement néerlandais a annoncé de son côté qu'il allait convoquer l'ambassadeur d'Iran aux Pays-Bas pour lui faire part de sa préoccupation, et appelé les autres pays de l'Union européenne à faire de même.
Selon Amnesty International, les autorités iraniennes ont condamné à mort au moins 26 autres personnes lors de "procès fictifs destinés à intimider les manifestants", où les accusés se sont vu refuser l'accès à une défense adéquate et à des avocats de leur choix. Les groupes de défense des droits humains affirment que les accusés des avocats nommés par l'État peu enclin à les défendre.
Amnesty a déclaré que le tribunal qui a condamné Karami, un champion de karaté de 22 ans, s'est appuyé sur des aveux forcés.
L'avocat de Hosseini, Ali Sharifzadeh Ardakani, a écrit un tweet le 18 décembre que son client avait été torturé et que les aveux obtenus sous la torture n'avaient aucune base légale.
L'Iran nie que des aveux aient été obtenus sous la torture.
Mahsa Amini est décédée en détention en septembre après avoir été arrêtée par la police des moeurs qui lui reprochait de mal porter le voile islamique. Les manifestations qui ont suivi constituent l'un des plus grands défis de la République islamique depuis sa création en 1979.
L'Iran, qui a imputé les troubles à ses ennemis étrangers, dont les États-Unis, considère sa répression des manifestations comme une façon de protéger la souveraineté nationale.
Selon groupe de défense des droits humains HRANA, 517 manifestants ont été tués lors des troubles, dont 70 mineurs, ainsi que 68 membres des forces de sécurité.
Pas moins de 19.262 manifestants auraient été arrêtés, selon la même source.
D'après des responsables iraniens, 300 personnes, dont des membres des forces de sécurité, ont trouvé la mort.
(dubai.newsroom@thomsonreuters.com ; Version française Elizabeth Pineau et Gilles Guillaume)