NAIROBI - Au terme de trois années de débats houleux, le parlement rwandais a donné le feu vert à une loi, qui si elle est approuvée par la Cour suprême et le
président Paul Kagamé, devrait entraîner une plus grande liberté de la
presse au Rwanda.
« Les obstacles qui freinaient l'avancée des dernières étapes ont été
résolus, » a confirmé mercredi à IRIN, James Vuningoma, le chef de l'Association des journalistes rwandais.
Ce dernier a expliqué que cette nouvelle loi autoriserait l'ouverture de stations de radio et télévision et d'agences de presse privées locales. Si
le calendrier législatif est respecté, a-t-il précisé, le projet de loi
pourrait être adopté dans les quatre semaines à venir. Des mesures sont en
train d'être prises pour libéraliser les médias face à « l'évolution
politique et économique et au besoin de dialogue du Rwanda ». Le projet de
loi prévoit également la création d'un conseil de médias composé de
fonctionnaires du gouvernement, ainsi que de représentants de médias privés.
Une des grandes surprises de ce projet de loi est la suppression de trois
articles controversés qui auraient permis d'administrer de longues peines de prison et la peine capitale aux personnes reconnues coupables d'inciter à commettre le génocide. Tandis que les journalistes et les politiques ont, dans l'ensemble, reconnu la nécessité d'une législation contre le génocide en ce qui concerne l'utilisation des médias, les représentants des médias
ont, en revanche, contesté la façon dont ce projet de loi était proposé.
« Il n'existe pas un pays au monde qui ait été victime d'un génocide et qui n'ait pas par la suite édicté de telles lois, » avait antérieurement déclaré à IRIN M. Vuningoma, « mais un consensus a été réalisé au sein de notre profession selon lequel cette législation doit faire partie intégrante d'un ensemble de lois sur le génocide qui ne concerne pas uniquement les journalistes. »
Le Rwanda n'avait pas de loi sur le génocide après décembre 1994, a-t-il
dit, laissant « un vide quant au contexte de ces lois », et faisant prendre conscience aux législateurs du caractère pressant d'élaborer une
législation.
Les trois articles en question prévoyaient une peine de 20 ans de prison pour toute personne reconnue coupable d'intention d'utiliser les médias pour inciter le peuple à la violence, une peine capitale pour toute personne reconnue coupable d'utiliser les médias à commettre le génocide, l'interdiction de revenir au Rwanda pour toute personne reconnue coupable d'utiliser les médias à l'extérieur du pays dans le but d'inciter au génocide.
Cependant, a ajouté M. Vuningoma, ce dernier article aurait été invalidé en
vertu du droit international puisqu'il aurait permis de priver un citoyen
rwandais de patrie.
Entre avril et juin 1994, environ 800 000 Tutsis et Hutus modérés
politiquement ont été tués par des éléments hutus extrémistes de la
population et du gouvernement, y compris les milices hutues et les anciennes forces armées du pays. De nombreux journalistes ont été tués pendant le génocide, au cours duquel un certain nombre de propagandistes ont participé activement en encourageant les massacres de masse.