PARIS (AFP) - Un quart de siècle après son abolition, l'Assemblée nationale a donné mardi, à l'unanimité des groupes, son feu vert à l'inscription de l'interdiction de la peine de mort dans la Constitution.
L'UMP, l'UDF, le PS et le PCF ont apporté leur soutien au projet de loi constitutionnelle qui inscrit dans le texte fondateur de la Ve République: "Nul ne peut être condamné à la peine de mort".
25 ans après son abolition par François Mitterrand, le 10 octobre 1981, alors que l'opinion publique et une grande partie de la droite parlementaire y étaient défavorables, l'interdiction de la peine de mort fait désormais consensus.
Jacques Chirac, qui avait voté cette abolition en 1981, avait annoncé début 2006 une révision de la Constitution afin d'en consacrer le principe, pour que celui-ci ne puisse être annulé par une simple loi. A l'exception d'une poignée de députés UMP, la quasi-totalité des députés ont rendu hommage à son initiative.
Présentant le texte, le ministre de la Justice Pascal Clément a jugé que "l'on ne répond pas à l'horreur par la barbarie", expliquant que par l'inscription de l'abolition dans le marbre constitutionnel "la France veut porter ses valeurs dans le monde entier".
"Notre démocratie est plus forte que le crime, notre République plus forte que les terroristes, notre justice plus forte que la pire des injustices", a déclaré le rapporteur UMP du projet, Philippe Houillon.
Apportant le soutien "enthousiaste" de son groupe, André Vallini (PS) s'est attaché au cas des Etats-Unis où "la peine de mort est de surcroît une injustice sociale et une injustice raciale".
Il a appelé à "amplifier les initiatives contre cette pratique d'un autre temps... et tant pis si M. Sarkozy va encore se croire obligé d'aller à Washington excuser l'arrogance française".
Pour Philippe Foliot (UDF), le texte, à portée "symbolique plus que juridique", est "un acte d'espoir dans l'homme" et un "message aux Chinois et aux Etats-Unis".
Michel Vaxès (PCF) a jugé que la France pouvait ainsi "poursuivre son action contre la peine de mort alors que 78 pays l'appliquent encore", en premier lieu "la Chine, l'Iran, l'Arabie saoudite, les Etats-Unis".
Noël Mamère (Verts) s'est félicité du "dépassement des clivages partisans" autour de cette "décision historique de bannir définitivement cette peine barbare".
Mais pour Jacques Myard (UMP), "il n'y a pas de réelle peine de substitution", tandis que Lionnel Luca (UMP) a défendu le principe d'une "réserve" à l'abolition en temps de guerre.
Députés de droite et de gauche ont repoussé deux des amendements dont MM. Myard et Luca étaient coauteurs, avec 14 UMP, pour rendre possible la peine capitale "lorsque l'existence de la Nation est menacée" et "pour les auteurs de crimes militaires d'une gravité extrême en temps de guerre".
L'Assemblée a encore rejeté deux autres amendements de députés UMP visant à rétablir la peine de mort pour les cas d'homicide volontaire contre un membre des forces de l'ordre ou contre un mineur.
L'inscription de l'interdiction de la peine de mort dans la Constitution permettra à la France de ratifier deux protocoles internationaux qui prescrivent son abolition définitive.
S'agissant d'une révision de la Constitution, ce texte sera soumis, après son adoption au Sénat, le 6 février, au vote du Parlement réuni en Congrès à Versailles, probablement le 19 février.