Le Parlement réuni en congrès à Versailles a inscrit lundi par 828 voix contre 26 l'abolition de la peine de mort dans la Constitution.
Ce texte, le plus consensuel des trois révisions constitutionnelles à l'ordre du jour, a été approuvé par tous les groupes de l'Assemblée nationale et du Sénat.
Cette révision constitutionnelle "revêt une portée symbolique et morale considérable", a déclaré Robert Badinter, qui avait présenté en 1981 le projet de loi sur l'abolition de la peine de mort. "Nous accomplissons le voeu de Victor Hugo en 1848, l'abolition pure, simple, irréversible", a lancé le ministre de la Justice de François Mitterrand, applaudi debout par l'ensemble des députés et sénateurs.
Saluant "l'aboutissement du long combat mené en France par tant de hautes consciences", le sénateur des Hauts-de-Seine a remercié le président Jacques Chirac, qui avait voté l'abolition en 1981, et rendu hommage au "courage" et à la "volonté politique" de son prédécesseur François Mitterrand, qui avait décidé de supprimer la peine capitale.
Robert Badinter a estimé que ce vote devait renforcer la mobilisation pour l'abolition universelle de la peine de mort. Il a ainsi souhaité que la France "soutienne l'action de la présidence allemande de l'Union européenne et du Parlement européen qui viennent de demander la mise en place d'un moratoire universel sur les exécutions capitales" et plaidé pour une "trêve olympique" à l'occasion des jeux de Pékin en 2008. Il a aussi appelé à la mobilisation pour sauver les quatre infirmières bulgares et le médecin palestinien condamnés à mort en Libye.
"Tant que dans ce monde on pendra, décapitera, empoisonnera, lapidera, suppliciera, tous ceux qui considèrent le droit à la vie comme un absolu moral ne doivent pas connaître de répit (...) La peine de mort est vouée à disparaître de ce monde. Comme la torture, elle est une honte pour l'humanité", a lancé l'ancien ministre de la Justice.
Le projet de loi constitutionnelle insère dans l'article 66 de la Constitution un premier alinéa qui stipule que "nul ne peut être condamné à la peine de mort". Cette réforme a été voulue par Jacques Chirac pour rendre irréversible l'abolition de la peine de mort, effective depuis la loi du 9 octobre 1981. En inscrivant l'interdiction de la peine capitale dans sa Constitution, la France rejoint les 16 pays européens qui l'ont précédée et devient le 45e Etat au monde à avoir accompli cette démarche.
Grâce à cette révision constitutionnelle, la France va pouvoir ratifier le deuxième protocole facultatif au pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations unies, adopté le 15 décembre 1989, et le protocole européen abolissant la peine de mort en toutes circonstances.
Le Premier ministre Dominique de Villepin a salué une "décision historique" qui permet à la France de "réaliser un progrès majeur dans son combat en faveur de l'abolition universelle de la peine de mort".