OTTAWA - Outrés par l'inaction du gouvernement conservateur, les trois partis d'opposition ont pris l'initiative d'écrire eux-mêmes au gouverneur du Montana, Brian Schweitzer, afin de lui demander de commuer la peine de Ronald Allen Smith, le Canadien condamné à mort pour le meurtre de deux autochtones en 1982.
Le Bloc québécois a fait parvenir jeudi aux libéraux ainsi qu'au Nouveau Parti démocratique un projet de lettre à faire signer à tous leurs députés, qui représentent un total de 175 circonscriptions. La missive pourrait être transmise au gouverneur dès le milieu de la semaine prochaine.
"Nous sommes parfaitement conscients qu'il ne nous appartient pas de nous ingérer dans les affaires juridiques du Montana. C'est pourquoi nous ne vous demandons pas la clémence pour le crime commis", peut-on lire dans le document dont La Presse Canadienne a obtenu copie.
"M. Smith a été condamné et nous respectons ce jugement. Nous insistons pour vous demander que la peine capitale prononcée à son encontre soit commuée en toute autre forme de peine afin de respecter le droit primordial à la vie."
Le chef libéral Stéphane Dion et son homologue du NPD, Jack Layton, ont déjà donné leur accord au projet. Ils ont en outre tous les deux envoyé une lettre personnelle au gouverneur Schweitzer.
M. Dion dit avoir posé ce geste au nom de la majorité de Canadiens qui s'opposent à la peine capitale et dont les vues ne sont pas représentées par les conservateurs de Stephen Harper.
Quant à M. Layton, il a souligné que le fait que le gouvernement ne soit pas intervenu en faveur de Ronald Allen Smith constituait une rupture d'avec la tradition canadienne de demander la clémence pour ses citoyens condamnés à mort dans d'autres pays.
"Je trouve cette situation très dérangeante, écrit-il. Et je ne suis pas le seul".
Jack Layton conserve l'espoir de faire changer les conservateurs d'idée au sujet de Ronald Allen Smith. "Cela démontrerait que le gouvernement n'a pas l'intention de modifier la loi canadienne", a-t-il expliqué à l'issue de la période des questions.
Jusqu'à maintenant, le premier ministre, son ministre des Affaires étrangères, Maxime Bernier, ainsi que le ministre de la Justice, Rob Nicholson, se sont toutefois montrés inflexibles.
Ce dernier a répété toute la semaine que son gouvernement n'entendait plus intervenir en faveur des tueurs condamnés à mort au terme d'un procès équitable dans un Etat de droit.
A l'évidence, ce commentaire faisait référence en premier lieu aux Etats-Unis. Il n'a toutefois pas été possible de savoir lesquels parmi les 64 autres pays qui pratiquent toujours la peine de mort étaient visés par la déclaration.
Le Canada a par ailleurs laissé savoir qu'il ne parrainerait pas une motion réclamant à l'ONU un moratoire sur la peine de mort. Les conservateurs prévoient néanmoins appuyer la proposition quand elle sera soumise aux votes.
En plus de l'opposition, les groupes de défense des droits humains et une partie de la communauté internationale se sont insurgés contre le changement d'attitude du Canada au sujet de la peine capitale.
Le secrétaire du Conseil de l'Europe, Terry Davis, a même accusé cette semaine le Canada de "sous-traiter" l'exécution de ses citoyens et de s'en laver les mains.