BRUXELLES (AP) - La Cour européenne des droits de l'Homme a jugé mercredi que le leader kurde Abdullah Öcalan n'a pas bénéficié d'un procès équitable devant la justice turque.
Le gouvernement turc a annoncé son intention de faire appel estimant que les raisons qui ont motivé la décision de la cour ne sont "pas saines", selon un communiqué du ministère turc des Affaires étrangères. Si la décision était maintenue en appel, Ankara ferait face à une force pression pour accorder un nouveau procès à Öcalan, dont les avocats ont dit envisagé également de faire appel de certaines parties de l'arrêt.
Dans son arrêt, la cour européenne des droits de l'Homme de Strasbourg conclut que "la cour de la sûreté de l'Etat d'Ankara, qui a condamné le requérant, n'était pas un tribunal indépendant et impartial".
Sur quelques-unes des onze autres plaintes déposées par les avocats du leader kurde emprisonné, la Cour européenne a jugé en faveur de la Turquie. Elle a notamment rejeté les accusations selon lesquelles les conditions de détention d'Öcalan sont inhumaines ou encore qu'il soit illégalement détenu.
Sur la peine de mort, la cour a jugé qu'il n'y avait eu violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'Homme portant sur l'interdiction des traitements inhumains et dégradants "en ce que la peine de mort a été prononcée à l'issue d'un procès inéquitable". En revanche, elle n'a pas retenu de violation de l'article 3 quant à l'application de la peine de mort ni de violation de l'article 2 (droit à la vie).
Les sept juges ont estimé que ces constats de violation constituaient en soi "une satisfaction équitable suffisante pour tout dommage subi par le requérant" et a accordé à ses avocats 100.000 euros pour frais et dépens.
"Cette décision appuie nos arguements sur la violation des droits de la défense, concernant le fait que l'on a fait pression sur nous, avocats, et sur le caractère inéquitable du procès", a commenté l'un des avocats d'Öcalan, Ercan Kanar.
Abdullah Öcalan avait été capturé par des commandos turcs au Kenya en 1999 et emmené en Turquie. Les séparatistes kurdes avaient décrété un cessez-le-feu après sa capture. La Turquie accusait le chef de l'ancien Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) d'avoir conduit les 15 années d'insurrection kurde qui se sont soldées par 37.000 morts.
Jugé pour trahison Öcalan avait été condamné à mort en 1999, une sentence commuée en prison à vie l'an dernier quand la Turquie a aboli la peine capitale. Mais un appel de deux syndicats contre cette décision doit encore être examiné par un tribunal turc. Depuis son procès, Öcalan est le seul détenu de l'île-prison d'Imrali en mer de Marmara.