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Evènement sur la peine de mort - Déclaration de Mme Annick Girardin, secrétaire d'Etat chargée du développement et de la francophonie

déclaration du 25 septembre 2014 - Ministère des Affaires Etrangères français - France
Pays :
peine de mort / France
25 septembre 2014 - AGNU69 - Evènement sur la peine de mort - Déclaration de Mme Annick Girardin, secrétaire d'Etat chargée du développement et de la francophonie


Monsieur le Secrétaire général,
Mesdames et Messieurs les Chefs d'Etat,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,

Je suis heureuse de clôturer cet évènement consacré à l'abolition universelle de la peine de mort. Je constate avec satisfaction que ce combat, qui constitue une priorité pour la France, est l'objet d'une mobilisation toujours plus soutenue, au plus haut niveau.

Il y a deux ans, Laurent Fabius avec son collègue du Bénin, a présidé cet événement. Le Costa Rica et la Mongolie nous ont rejoints en 2013. La Tunisie et l'Italie s'engagent cette année en première ligne. Je les salue et les en remercie. Ce sont désormais quatre continents qui sont représentés, quatre continents qui symbolisent l'universalité du combat contre la peine de mort.

Mesdames, Messieurs,

L'abolition de la peine de mort est une question de principe. Inefficace, injuste, sujette aux erreurs, la peine de mort ne peut être une décision de justice : elle n'a rien à voir avec la notion de justice.

Ce n'est qu'au XXème siècle que la peine de mort a commencé à être légitimement récusée pour ce qu'elle : un acte cruel, inhumain et dégradant. Au cours des dernières décennies, elle a continué de reculer. Deux tiers des Etats de la planète l'ont désormais abolie ou ont adopté un moratoire, contre seulement 16 en 1977. Je tiens à cet égard à saluer les ratifications récentes par le Salvador, le Gabon, la Guinée-Bissau et la Pologne. Mais, chaque année, à travers le monde, des milliers de femmes et d'hommes sont encore condamnés à la peine capitale. Les chiffres restent accablants : une cinquantaine de pays l'appliquent et plusieurs Etats sont revenus récemment sur leur moratoire. D'autres continuent les exécutions, parfois en secret. En 2013, le nombre d'exécutions a augmenté de presque 15 % par rapport à 2012, selon le dernier rapport d'Amnesty International. Face à cette réalité, il faut refuser le fatalisme ou le découragement et redoubler d'efforts.


La France a, comme une centaine d'Etats, aboli la peine de mort au nom de l'universalité des droits de la personne humaine. Oui, la peine de mort est fondamentalement une violation des droits de l'Homme.

C'est pourquoi aujourd'hui, nous continuons le combat. C'est pourquoi j'ai fait de l'abolition une priorité de la diplomatie française que nous conduisons une campagne mondiale qui mobilise l'ensemble de notre réseau.

Que faisons-nous ? Nos ambassades et centres culturels agissent en partenariat et à destination des médias, d'associations, d'intellectuels, d'étudiants. Nous sensibilisons les législateurs, qui constituent évidemment des acteurs décisifs. Nous agissons surtout en direction des jeunes, parce qu'ils sont les citoyens et pour certains, les décideurs de demain. Le 10 octobre prochain, pour la journée mondiale contre la peine de mort, une centaine de ces jeunes venus du monde entier se réuniront à Paris pour lancer un appel.

Nous sommes aussi mobilisés, avec nos partenaires, dans les enceintes multilatérales. A l'Assemblée générale, les résolutions adoptées ces dernières années montrent que la cause de l'abolition progresse.

Au Conseil des droits de l'Homme, l'évènement organisé en mars dernier, à l'initiative du Bénin, du Costa Rica, de la Moldavie, de la Mongolie et de la France, a constitué une étape importante. Je me réjouis que la résolution adoptée en juin dernier nous permette de maintenir la dynamique en faveur du moratoire et, à plus long terme, d'une abolition universelle.

Ce texte est le premier adopté par les Nations unies qui déplore les violations des droits de l'Homme découlant de l'application de la peine de mort. C'est une avancée très significative.




Mesdames, Messieurs,

Je veux insister sur le rôle individuel de chacun, sur la responsabilité personnelle de chaque dirigeant.

Tous les pays qui ont mené à bien le combat contre la peine de mort n'y sont parvenus qu'au prix d'une volonté politique forte et de la détermination de quelques-uns.
C'est notamment ce qu'illustre l'exemple de la France. Vous le savez, notre cheminement vers l'abolition fut particulièrement long. Cette question a divisé la France jusqu'en 1981. A l'époque, l'opinion était majoritairement en faveur de la peine de mort.

L'impulsion est venue du plus haut niveau et, trente-trois ans après, l'abolition fait partie de notre patrimoine et est inscrite dans notre Constitution.
L'opinion publique ne peut servir de prétexte pour maintenir la peine capitale. Pour abolir la peine de mort, il faut savoir précéder la société, lui montrer le chemin. Il faut faire preuve de courage, de détermination et de persévérance.

Mais ce « leadership » doit aussi être collectif. Il est des batailles que nous ne pouvons gagner seuls, et la lutte contre la peine de mort est de celles-ci. C'est ensemble que tous, gouvernements, organisations internationales et régionales, parlementaires, société civile, citoyens nous y parviendrons.

Mesdames et Messieurs,

Il y a quelques siècles, le père du droit pénal contemporain, Beccaria, écrivait : "Si je prouve que la mort n'est ni utile ni nécessaire, j'aurai gagné la cause de l'humanité". Nous devons convaincre qu'il est juste et qu'il est possible d'abolir la peine de mort, quelles que soient les circonstances.

A cet égard, la publication diffusée aujourd'hui par le Haut-Commissariat, qui réunit des analyses et témoignages reflétant une large diversité géographique de parcours nationaux, est un outil utile. Je tiens à remercier à cette occasion le Haut-commissaire pour son engagement déterminé dans cette cause.


Nous savons tous ici que la route vers l'abolition est longue et difficile. Mais nous savons aussi qu'au regard de nos idéaux partagés de justice et de dignité de la personne humaine, chaque condamné à mort est un condamné de trop.

Le combat contre la peine de mort est un combat qui doit être gagné. Tous les pays qui s'engagent sur cette voie trouveront la France à leurs côtés.

Abolir la peine de mort, la France en est convaincue, c'est faire progresser la justice et l'Humanité toute entière. C'est ce message que portent la France et la diplomatie française. Merci.
(Mme Annick Girardin, secrétaire d'Etat chargée du développement et de la francophonie)

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