L'Allemagne et l'UE ont annoncé mardi envisager des « mesures » de rétorsion contre Téhéran après l'exécution en Iran du dissident iranien naturalisé allemand Jamshid Sharmahd.
Âgé de 69 ans, il a été exécuté lundi matin, selon l'organe de presse du pouvoir judiciaire iranien, après avoir passé plusieurs années en captivité pour son implication présumée dans un attentat contre une mosquée à Chiraz (sud) en avril 2008. Cette attaque avait fait 14 morts et quelque 300 blessés.
Sa famille a toujours clamé son innocence et affirmé qu'il avait été arrêté par les autorités iraniennes en août 2020 tandis qu'il transitait par les Émirats arabes unis.
Le chancelier Olaf Scholz a qualifié cette exécution de « scandale » et le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell l'a condamnée « avec la plus grande fermeté ».
L'Union européenne envisage des « mesures en réponse » contre Téhéran, a ajouté Josep Borrell. Le ministère allemand des Affaires étrangères a dit « se réserver la possibilité de mesures supplémentaires ».
Mardi à Bruxelles, une porte-parole de la Commission européenne n'a pas précisé le type de mesures qui pourraient être adoptées, rappelant qu'elles devraient d'abord être « discutées avec tous les Etats membres » de l'UE. A Berlin, le ministère allemand des Affaires étrangères a annoncé avoir convoqué le chargé d'affaires iranien pour lui adresser sa « vive protestation ».
Dans le même temps, l'ambassadeur allemand à Téhéran a rencontré le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, et « protesté avec la plus grande fermeté contre l'assassinat de Jamshid Sharmahd ».
M. Araghchi a dénoncé les critiques de Berlin sur X. « Aucun terroriste ne bénéficie de l'impunité en Iran. Même s'il est soutenu par l'Allemagne (...) Arrêtez de soutenir les tueurs d'enfants », a-t-il dit, s'adressant à son homologue allemande, Annalena Baerbock.
Cette dernière a rappelé en Allemagne son ambassadeur à Téhéran pour « des consultations ».Berlin a fait savoir à plusieurs reprises que « l'exécution d'un ressortissant allemand aurait de graves conséquences ».
« Régime inhumain »
Lundi, Mme Baerbock avait condamné le « régime inhumain » iranien après l'exécution du dissident.
« Le meurtre de Jamshid Sharmahd montre une fois de plus quel type de régime inhumain règne à Téhéran : un régime qui utilise la mort contre sa jeunesse, sa propre population et les ressortissants étrangers. » « Personne n'est en sécurité sous le nouveau gouvernement » du président Massoud Pezeshkian, qui a pris ses fonctions en juillet, a aussi souligné la ministre.
Mariam Claren, la fille d'un autre Irano-Allemand détenu en Iran, a écrit sur X que « ce meurtre d'État aurait pu être évité si le gouvernement allemand l'avait vraiment voulu ». Mais selon Annalena Baerbock, l'Allemagne a travaillé « sans relâche » pour éviter l'exécution de Jamshid Sharmahd, envoyant notamment des diplomates à plusieurs reprises.
La ministre s'est entretenue lundi avec la fille de Jamshid Sharmahd, et soutient le voeu formulé par cette dernière de voir son corps « restitué rapidement afin que sa famille puisse lui dire au revoir », selon des sources proches du ministère allemand des Affaires étrangères.
Amnesty a qualifié cette exécution de « cruelle et inhumaine ».
Une autre ONG, le Centre européen pour les droits humains et constitutionnels, a jugé « choquante » la mort de Jamshid Sharmahd qui « n'a pas eu un procès juste et une défense indépendante », a commenté Wolfgang Kaleck, le secrétaire général de l'ONG.
Né à Téhéran, Jamshid Sharmahd avait émigré en Allemagne dans les années 1980 et vécu à partir de 2003 aux Etats-Unis. Il s'était en particulier illustré par des déclarations hostiles à la République islamique sur des chaînes de télévision satellitaires en persan.
Ces dernières années, l'Iran, qui ne reconnaît pas la double nationalité pour ses ressortissants, a fait exécuter plusieurs binationaux, comme en mai 2023 le dissident irano-suédois Habib Chaab, condamné à mort pour « terrorisme ».
L'an dernier toujours, Téhéran avait provoqué une vague d'indignation internationale avec l'exécution de l'Irano-britannique Alireza Akbari, un ancien responsable de la Défense reconnu coupable d'espionnage.