Matraques à pointes, bracelets à électrochocs, cocktails létaux: l'Union européenne veut bannir le commerce de tout ce qui sert à torturer ou mettre à mort, et tentera lundi à l'ONU de rallier un maximum de pays autour de mesures visant à le tarir.
Argentine et Mongolie se sont déjà associées aux Européens sur ce dossier, mais beaucoup d'autres pays sont encore loin.
Parmi eux, la Chine, l'Iran ou l'Arabie Saoudite, où les exécutions sont courantes, mais aussi les États-Unis, où les injections létales administrées aux condamnés à mort sont directement dans le collimateur de l'UE.
Les États-Unis sont aussi sur la sellette pour «une utilisation très large par les forces de l'ordre» de bracelets ou ceintures à électrochocs, selon l'ONG Omega Research Foundation, qui suit l'utilisation de ce genre d'équipements à travers le monde.
Dans de nombreux États américains, les détenus sont obligés de porter ces bracelets ou ceintures, activables à distance, lors de transferts ou d'audiences au tribunal.
Même lorsqu'ils ne sont pas activés, ces équipements «constituent un mauvais traitement, en maintenant le porteur dans une crainte permanente de douleur», souligne l'ONG basée à Londres, dans un récent rapport sur ces équipements dans les 57 pays membres de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe.
L'Union européenne, qui a fait de la lutte contre la torture et la peine de mort une des priorités de sa politique étrangère, s'est elle dotée depuis 2005 de mesures visant à bannir le commerce de ces produits. Mesures renforcées l'an dernier avec l'interdiction de la promotion et du transit de ces produits via le sol et les ports européens.
«Tuer les gens»
Décidée à utiliser son portefeuille pour défendre les droits de l'Homme, la commissaire européenne au Commerce, la Suédoise Cecilia Malmström, soulignait récemment que ces mesures avaient déjà «eu des résultats positifs».
La production européenne, privée d'exportations, a baissé et les prix des produits utilisés pour les injections létales ont augmenté, selon des données fournies par Bruxelles.
Mais les fabricants «essaient de contourner la législation», déplorait aussi la commissaire. «Plus il y aura de pays (signataires), plus ce sera efficace».
Les Européens espèrent que l'adoption solennelle d'une déclaration politique, prévue lundi après-midi en marge de l'Assemblée générale annuelle de l'ONU, marquera le début d'une collaboration internationale plus large.
Plus de 50 pays -dont le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et plusieurs pays latino-américains- devraient la signer dans un premier temps, avec l'espoir que ce nombre augmentera progressivement jusqu'à arriver à un large consensus, voire à une convention internationale légalement contraignante.
Les pays signataires de cette déclaration politique s'engageront à «contrôler et restreindre» les exportations de ces produits, à l'aide d'une plateforme commune qui surveillera les flux commerciaux et alertera sur les nouveaux produits qui pourraient arriver sur le marché.
Les signataires coopéreront également pour adopter la législation et les mesures de contrôle les plus efficaces.
Les fabricants multiplient les ruses pour éviter les contrôles, faisant passer ces produits dans des livraisons aux intitulés «complètement innocents» pour éviter leur détection, a expliqué un porte-parole européen.
«Ces produits ont pour seul but d'infliger des douleurs terribles et de tuer les gens. Nous ne devrions jamais permettre qu'ils puissent être vendus comme n'importe quel bien, il est temps d'agir concrètement pour stopper ce commerce méprisable,» a affirmé Mme Malmström.