Le Parlement européen,
– vu ses résolutions antérieures, en particulier celles du 17 décembre 2020 sur l'Iran, et notamment le cas de la lauréate du prix Sakharov 2012, Nasrin Sotoudeh(1), du 19 septembre 2019 sur l'Iran, notamment la situation des défenseurs des droits des femmes et des binationaux de l'Union européenne emprisonnés(2), du 13 décembre 2018 sur l'Iran, notamment le cas de Nasrin Sotoudeh(3), et du 31 mai 2018 sur la situation des binationaux de l'Union européenne emprisonnés en Iran(4),
– vu les déclarations sur l'Iran du 18 mars 2021 du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme demandant la libération immédiate du Dr Ahmadreza Djalali, et du 25 novembre 2020 demandant à l'Iran de suspendre son exécution, ainsi que l'avis du 24 novembre 2017 de son groupe de travail sur la détention arbitraire concernant le cas d'Ahmadreza Djalali (République islamique d'Iran),
– vu la déclaration du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran, du 26 octobre 2020, demandant instamment que des comptes soient rendus pour la répression violente de manifestations, ainsi que son rapport du 21 juillet 2020 sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran,
– vu la 5e édition du dialogue de haut niveau entre l'Union européenne et l'Iran du 9 décembre 2020,
– vu les orientations de l'Union européenne concernant la peine de mort, la torture et autres traitements cruels, la liberté d'expression en ligne et hors ligne et les défenseurs des droits de l'homme,
– vu le pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques, auquel l'Iran est partie, et les garanties contre la torture et les détentions arbitraires prévues par la Constitution iranienne,
– vu les élections présidentielles qui ont eu lieu en Iran le 18 juin 2021,
– vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,
– vu l'article 144, paragraphe 5, et l'article 132, paragraphe 4, de son règlement intérieur,
A. considérant que le Dr Ahmadreza Djalali, médecin suédo-iranien spécialisé en médecine d'urgence, et universitaire et professeur à la Vrije Universiteit Brussel (VUB, Belgique) et à l'Université italienne du Piémont oriental, a été arrêté le 24 avril 2016 par les forces de sécurité iraniennes; qu'il a été condamné à mort pour de faux motifs d'espionnage en octobre 2017 à la suite d'un procès manifestement inéquitable fondé sur des aveux forcés obtenus sous la torture; que cette peine a été confirmée par la Cour suprême iranienne le 17 juin 2018; qu'il a déclaré, dans une lettre rédigée à la prison d'Evin à Téhéran, avoir été emprisonné lors d'un voyage en Iran pour avoir refusé d'espionner les institutions européennes; qu'il a été informé par le parquet, le 24 novembre 2020, de l'imminence de son exécution et qu'il a ensuite été transféré en cellule d'isolement durant plus de 100 jours jusqu'en avril 2021, après quoi il a été transféré dans l'une des ailes générales; qu'il s'est vu refuser des visites et des conversations téléphoniques avec sa famille en Suède; que sa peine de mort n'a pas été commuée depuis son transfert dans une aile générale; qu'il n'a eu accès à son avocat que de manière intermittente au cours des sept derniers mois et pas du tout avant cela;
B. considérant qu'en novembre 2017, le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a conclu que la privation de liberté du Dr Ahmadreza Djalali (en violation des articles 3, 5, 8, 9, 10 et 11 de la déclaration universelle des droits de l'homme et des articles 7, 9, 10 et 14 du pacte international relatif aux droits civils et politiques) était arbitraire et a demandé sa libération;
C. considérant que la santé du Dr Ahmadreza Djalali s'est détériorée jusqu'à atteindre un stade critique après des mois d'isolement prolongé; qu'il s'est vu refuser de recevoir des soins médicaux de l'extérieur de la prison depuis 2016 et qu'il est détenu dans une pièce constamment éclairée à forte puissance; que son état physique et psychologique s'est gravement détérioré depuis, qu'il est privé de sommeil, a perdu énormément de poids et a des difficultés à parler;
D. considérant que l'Iran a emprisonné de nombreux ressortissants étrangers pour faire pression sur les gouvernements étrangers; qu'au moins une dizaine de ressortissants de l'Union sont détenus arbitrairement en Iran; que Fariba Adelkhah, universitaire franco-iranienne et directrice de recherches à Sciences Po Paris, a été arbitrairement détenue depuis juin 2019, d'abord à la prison d'Evin puis assignée à domicile depuis octobre 2020; que le photographe français Benjamin Brière est détenu arbitrairement depuis le 26 mai 2020 dans la prison de Mashhad et qu'il a été accusé d'espionnage le 30 mai 2021; que Nahid Taghavi, citoyen germano-iranien, est détenu de manière arbitraire depuis octobre 2020 à la prison d'Evin sous des accusations douteuses de sécurité nationale; que l'Iran ne reconnaît pas la double nationalité, imitant ainsi l'accès des ambassades étrangères à leurs binationaux;
E. considérant que l'Iran détient aussi arbitrairement ses propres citoyens dans des conditions déplorables; que les tribunaux refusent souvent aux prévenus le droit à un procès équitable et limitent les conseils juridiques et les visites des autorités consulaires, des Nations unies et des organisations humanitaires; que les peines sont souvent fondées sur des allégations non étayées; que le système judiciaire et les juges iraniens sont loin d'être indépendants et ne respectent pas les normes internationales; que les autorités iraniennes n'ont pas enquêté sur les allégations de torture ni sur d'autres violations graves des droits des détenus; que le harcèlement judiciaire est utilisé pour museler les défenseurs des droits de l'homme;
F. considérant que l'Iran enregistre le plus grand nombre d'exécutions par habitant au monde;
G. considérant que l'Union et ses États membres n'ont cessé de participer à des pourparlers diplomatiques visant à améliorer les relations avec l'Iran, ce qui a conduit à l'adoption du plan d'action global commun le 18 octobre 2015; que l'Union reste déterminée à améliorer ses relations sous certaines conditions; que le respect des droits de l'homme est un élément essentiel du développement des relations entre l'Union et l'Iran;
1. demande à l'Iran, sous la direction du président nouvellement élu Ebrahim Raisi, d'annuler l'exécution imminente du professeur suédo-iranien Ahmadreza Djalali, de le libérer immédiatement et sans condition et de lui permettre de retourner dans sa famille en Suède; condamne fermement les faits de torture et la détention arbitraire dont il est victime et la peine de mort à laquelle il a été condamné à la suite d'accusations non fondées, comme l'indique dans un avis de 2017 le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme sur la détention arbitraire; prie instamment l'Iran, compte tenu de ce qui précède, de lui permettre de s'entretenir régulièrement avec sa famille et son avocat, de garantir sa sécurité et de lui fournir de toute urgence les soins médicaux nécessaires; demande à l'Iran de cesser de menacer sa famille en Suède et en Iran;
2. déplore la politique de détention arbitraire pratiquée par l'Iran à l'égard de ressortissants de l'Union, du Royaume-Uni et d'autres ressortissants afin d'obtenir des aveux politiques;
3. demande instamment à l'Iran d'abandonner immédiatement toutes les charges retenues à l'encontre du Dr Ahmadreza Djalali et de tous les ressortissants de l'Union détenus arbitrairement, dont les ressortissants allemands Nahid Taghavi et Jamshid Sharmahd, les ressortissants français Benjamin Brière et Fariba Adelkhah, cette dernière restant soumise à une interdiction de voyager, les ressortissants autrichiens Kamran Ghaderi et Massud Mossaheb, les ressortissants britanniques Morad Tahbaz, Anoosheh Ashoori, Mehran Raoof et Nazanin Zaghari-Ratcliffe, ce dernier étant assigné à résidence.
4. regrette profondément que, depuis la résolution du 17 décembre 2020 du Parlement, aucun État membre de l'Union n'ait réussi à rencontrer les ressortissants européens détenus arbitrairement, y compris le Dr Ahmadreza Djalali; presse une nouvelle fois le vice-président de la Commission et haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR) et les États membres de l'Union à tout mettre en œuvre pour empêcher l'exécution du Dr Ahmadreza Djalali;
5. invite le Conseil à envisager d'autres sanctions ciblées, y compris le gel des avoirs des fonctionnaires et entités du régime iranien impliqués dans la détention arbitraire et la condamnation à mort de ressortissants de l'Union, y compris, en cas de maintien en détention du Dr Ahmadreza Djalali, en recourant au régime actuel de sanctions de l'Union en matière de droits de l'homme à l'encontre de l'Iran ou au régime mondial de sanctions de l'Union en matière de droits de l'homme (loi Magnitsky);
6. se félicite que, le 12 avril 2021, huit Iraniens et trois entités iraniennes aient été ajoutés au régime de sanctions de l'Union, qui a gelé leurs avoirs et leur a interdit d'entrer sur le territoire de l'Union compte tenu de leur rôle dans le meurtre d'au moins 303 manifestants en 2019; note que c'est la première fois que l'Union prend une telle décision depuis 2013;
7. réaffirme sa ferme opposition à la peine de mort en toutes circonstances et souligne qu'aucune justification morale, juridique ou religieuse ne saurait être invoquée pour y souscrire; demande à l'Iran de déclarer toutes affaires cessantes un moratoire sur les exécutions capitales, dans la perspective d'une abolition totale de la peine de mort;
8. demande à l'Iran de libérer également les prisonniers politiques, y compris les défenseurs des droits de l'homme, détenus arbitrairement pour avoir exercé leurs droits fondamentaux à la liberté d'expression, de conviction, d'association, de publication, de réunion pacifique et de liberté des médias; invite l'Iran à enquêter en bonne et due forme sur les responsables de graves violations des droits de l'homme et l'exercice d'une force excessive et létale contre les manifestants; dénonce le recours systématique à l'isolement cellulaire prolongé, en violation des obligations internationales de l'Iran;
9. appelle instamment le Conseil à faire des violations des droits de l'homme un élément central de sa coopération bilatérale avec l'Iran, conformément à la déclaration commune convenue par le VP/HR et le ministre iranien des affaires étrangères en avril 2016; invite le Service européen pour l'action extérieure (SEAE) à continuer d'inclure les droits de l'homme dans le dialogue de haut niveau UE-Iran; invite l'Union et ses États membres à renforcer leur protection et leur soutien aux défenseurs des droits de l'homme, en particulier les femmes, notamment par des dotations d'urgence au titre de l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme;
10. condamne fermement la détérioration croissante de la situation des droits de l'homme en Iran, en particulier pour les personnes appartenant à des minorités ethniques ou religieuses, du fait d'une discrimination politique, économique, sociale et culturelle systémique; déplore une surenchère alarmante concernant le recours à la peine de mort à l'encontre des manifestants, des dissidents et des membres de groupes minoritaires;
11. appelle l'Iran à autoriser les visites et à coopérer pleinement à toutes les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme des Nations unies ainsi qu'avec le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran;
12. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission/haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, ainsi qu'au Secrétaires général des Nations unies, au Guide suprême et au Président de la République islamique d'Iran et aux membres du Parlement iranien.
(1) Textes adoptés de cette date, P9_TA(2020)0376.
(2) JO C 171 du 6.5.2021, p. 17.
(3) JO C 388 du 13.11.2020, p. 127.
(4) JO C 76 du 9.3.2020, p. 139.