DÉLÉGUÉS DES MINISTRES
Décisions
12 mars 2025
1522e réunion, 11 et 12 mars 2025
4.1 Abolition de la peine de mort – Discussion thématique
Documents de référence
CM/Del/Dec(2001)769/4.4, CM/Del/Dec(2024)1508/4.2, DD(2025)50
Décisions
Les Délégués
1. réaffirment leur opposition sans équivoque à la peine de mort, y compris à toute réintroduction de celle‑ci, en tous lieux et en toutes circonstances, et réitèrent l'objectif du Conseil de l'Europe de créer une zone sans peine de mort en Europe et au-delà et de poursuivre son combat contre son rétablissement et en faveur de son abolition universelle, conformément à la Déclaration de Reykjavík adoptée par les chefs d'État et de gouvernement le 17 mai 2023 ; rappellent qu'aucune exécution n'a eu lieu dans les 46 États membres du Conseil de l'Europe depuis 1997 ;
2. se félicitent de la tendance mondiale continue vers l'abolition de la peine de mort dont témoigne l'adoption par l'Assemblée générale des Nations Unies, le 17 décembre 2024, de la 10ème résolution pour un moratoire sur l'application de la peine de mort, soutenue par un nombre record de 130 voix, dont celles de tous les États membres du Conseil de l'Europe ; mais déplorent profondément la hausse du nombre d'exécutions recensées dans le monde ;
3. réitèrent leur préoccupation quant au fait que, même dans les pays où la peine de mort a été abolie, la cause abolitionniste pourrait être minée par l'instrumentalisation d'un sentiment croissant d'insécurité au sein de la population et que des propositions et débats politiques se font jour concernant la possibilité de réintroduire la peine de mort ;
4. rappellent qu'il n'existe aucune preuve concluante de la valeur dissuasive de la peine de mort, et appellent les États membres à rester fermes dans leur engagement à s'y opposer, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme ; soulignent que l'adoption du Protocole n° 13 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relatif à l'abolition de la peine de mort en toutes circonstances, avait notamment été motivée par le fait qu'en temps de guerre ou de danger imminent de guerre, le risque d'exécuter des innocents augmente dans la mesure où les garanties juridiques peuvent être affaiblies et les pressions exercées peuvent être plus fortes ;
5. se félicitent de nouveau de la signature du Protocole n° 13 par l'Azerbaïdjan le 8 mars 2023 et encouragent l'Azerbaïdjan, dernier État membre à ne pas l'avoir encore ratifié, à procéder rapidement à sa ratification ;
6. encouragent à nouveau les autorités compétentes de Bosnie-Herzégovine à assurer la pleine mise en œuvre de la décision de 2019 de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine sur la disposition relative à la peine de mort dans la Constitution de la Republika Srpska ;
7. réitèrent leur appel aux autorités de la Fédération de Russie à transformer le moratoire sur la peine de mort, établi par la Cour constitutionnelle, en une abolition dejure de la peine de mort ;
8. déplorent que le Belarus ait eu recours aux infractions passibles de peine de mort ajoutées récemment à son code pénal pour condamner à mort ; réitèrent leur appel pressant aux autorités du Bélarus pour qu'elles cessent toutes les exécutions en attendant l'abolition de la peine de mort et qu'elles appliquent les peines de substitution prévues par la législation pénale du Bélarus ; saluent la position prise par la dirigeante des forces démocratiques bélarusses en faveur de l'abolition ; encouragent la mise en œuvre des activités relatives à la peine de mort prévues dans le cadre du Groupe de contact entre le Conseil de l'Europe et les forces démocratiques et la société civile bélarusses et saluent à cet égard l'organisation d'un séminaire rassemblant les courants des forces démocratiques du Belarus ;
9. regrettent que les exécutions se soient poursuivies en 2024 et 2025 à travers les États aux États-Unis, État observateur du Conseil de l'Europe ; notent avec regret la récente initiative réglementaire sur le rétablissement de la peine de mort et la protection de la sécurité publique ; rappellent la déclaration du Comité des Ministres du 30 janvier 2024 exprimant être particulièrement préoccupé par le recours sans précédent dans l'État de l'Alabama à une nouvelle méthode d'exécution controversée appelée hypoxie à l'azote, en dépit des préoccupations sérieuses qui ont été émises par un certain nombre d'organisations internationales, y compris les Nations Unies, considérant qu'elle « … peut être constitutive de torture, de traitement cruel, inhumain ou dégradant » ; notent avec regret que cet État a continué à procéder à des exécutions en utilisant cette méthode et que plusieurs autres États des États-Unis d'Amérique ont autorisé son utilisation ; notent que l'État de l'Indiana ait procédé à une exécution après une interruption de 15 ans, et que l'État de Caroline du Sud a procédé à la première exécution par peloton d'exécution depuis 15 ans ; appellent à nouveau les autorités du Japon et des États-Unis, États observateurs, à promouvoir un débat ouvert et démocratique en vue de l'abolition de la peine de mort, notant que le dénouement du cas de M. Hakamada, qui a passé plus de 45 ans dans le couloir de la mort avant d'être acquitté, démontre le risque inhérent à la peine de mort ;
10. réitèrent que le Conseil de l'Europe est prêt à partager son expérience en matière d'abolition de la peine de mort avec ses États observateurs, en particulier les États-Unis et le Japon, par le biais d'initiatives en concertation avec eux ;
11. saluent le pas en avant positif effectué par le Maroc qui a voté pour la première fois en faveur de la résolution de l'Assemblée Générale des Nations Unies pour un moratoire sur l'application de la peine de mort ; réitèrent que le Conseil de l'Europe se tient également prêt à poursuivre les échanges sur ce thème avec les États couverts par la politique du Conseil de l'Europe à l'égard des régions voisines, en particulier le Maroc ;
12. encouragent à poursuivre les initiatives du Conseil de l'Europe et de ses États membres visant à promouvoir l'abolition mondiale de la peine capitale, en particulier des initiatives concernant les jeunes ; se félicitent du développement de la formation au plaidoyer à destination de jeunes, et de la tenue d'initiatives similaires à destination de jeunes bélarussiens, et de jeunes de pays du Sud (dans le cadre du Centre Nord-Sud) ; dans ce contexte, encouragent à mettre en œuvre le nouveau programme de coopération multilatérale « La mort n'est pas la justice : Abolition de la peine de mort en Europe et au-delà » et invitent les États membres à considérer de faire des contributions volontaires ;
13. attendent avec intérêt le rapport du Comité directeur pour les droits humains sur son examen de la mise en œuvre de la Recommandation CM/Rec(2021)2 du Comité des Ministres sur des mesures contre le commerce de biens utilisés pour la peine de mort, la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, suite à son atelier sur ce thème tenu le 27 novembre 2024 ;
14. réaffirment la disposition du Conseil de l'Europe à contribuer au prochain Congrès mondial contre la peine de mort, qui aura lieu en France en 2026 ;
15. conviennent de reprendre l'examen de cette question lors d'une de leurs prochaines réunions, au plus tard le 10 octobre 2025.